Enseigner, un metier pour demain
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Mission de réflexion sur le métier d'enseignant ENSEIGNER, UN METIER POUR DEMAIN Rapport au ministre de l'éducation nationale Présenté par Jean-Pierre Obin Mars 2002 Lettre de mission Sommaire Introduction : enseigner dans dix ans Première partie L'enseignement du second degré, d'hier à aujourd'hui : une profession en crise ? Les leçons de l'histoire Les motivations àenseigner Le métier tel qu'il se vit et se dit Un métier dissocié Les aspirations des jeunes aujourd'hui Seconde partie Le métier d'enseignant, demain : vers une profession plus attractive Surmonter les difficultés de recrutement Attirer les jeunes… et les moins jeunes Dessiner un métier plus rassemblé et plus attrayant Donner de nouvelles libertés et confier de nouvelles responsabilités Mieux gérer la première affectation et le mouvement Développer la formation et l'aide pédagogique Evaluer et reconnaître Débattre, associer aux décisions et développer la solidarité Conclusion : piloter autrement 2 Annexes 1- Eléments d'analyse historique de la littérature officielle sur les enseignants du Secondaire (P. Savoie) 2- Note de synthèse sur les motivations àdevenir enseignant (F. Clerc) 3- Cadre démographique du renouvellement des enseignants du second degré 4- Note de perspective internationale sur la pénurie d’enseignants (J-M. Leclercq) 5- Compétences attendues des enseignants dans les nouveaux dispositifs d'enseignement et d'éducation (groupe d'experts présidé par J.

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Langue Français

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Mission de réflexion sur le métier d'enseignant
ENSEIGNER, UN METIER POUR DEMAIN
Rapport au ministre de l'éducation nationale Présenté par JeanPierre Obin
Mars 2002
Lettre de mission
Sommaire
Introduction : enseigner dans dix ans
Première partie L'enseignement du second degré, d'hier à aujourd'hui: une profession en crise ? Les leçons de l'histoire Les motivations à enseigner Le métier tel qu'il se vit et se dit Un métier dissocié Les aspirations des jeunes aujourd'hui
Seconde partie Le métier d'enseignant, demain : vers une profession plus attractive Surmonter les difficultés de recrutement Attirer les jeunes… et les moins jeunes Dessiner un métier plus rassemblé et plus attrayant Donner de nouvelles libertés et confier de nouvelles responsabilités Mieux gérer la première affectation et le mouvement Développer la formation et l'aide pédagogique Evaluer et reconnaître Débattre, associer aux décisions et développer la solidarité
Conclusion : piloter autrement
2
Annexes 1 Eléments d'analyse historique de la littérature officielle sur les enseignants du Secondaire (P. Savoie) 2 Note de synthèse sur les motivations à devenir enseignant (F. Clerc) 3 Cadre démographique du renouvellement des enseignants du second degré 4 Note de perspective internationale sur la pénurie d’enseignants (JM. Leclercq) 5 Compétences attendues des enseignants dans les nouveaux dispositifs d'enseignement et d'éducation (groupe d'experts présidé par J. Losfeld) 6 Etat des flux interacadémiques pour les enseignants du second degré 7 Les dispositifs de formation dans l'enseignement et la fonction publique 8 L'école en tant que "cadre" pour les élèves et les professeurs (D. Ginet)
Liste des personnalités et organisations rencontrées
Introduction : enseigner dans dix ans
3
Le métier d'enseignant ! Voilà sans doute un sujet de réflexion aussi vaste que le corps est nombreux : près d'un million de personnes exercent en effet ce métier en France, dont 817.000 dans l'enseignement public (315.000 dans le premier degré, 420.000 dans le second et 82.000 dans le supérieur). Mais leur importance dans la société est loin de se réduire à ce poids démographique, d'ailleurs croissant (ils étaient en effet près de 100.000 de moins il y a dix ans), car les évolutions culturelles comme la crise économique ont considérablement développé les attentes des Français visàvis de l'école. Comment leur donner tort quand tout montre que l'éducation est le facteur le plus important de la croissance économique et de la vitalité d'une nation ? Cette place centrale de la profession enseignante en fait de nos jours un objet infini de controverses : les enseignants sontils trop ou pas assez nombreux, travaillent ils moins ou davantage que les autres, ontils trop ou pas assez de liberté dans leur travail, favorisentils les enfants qui leur ressemblent ou contribuentils à l'égalité des chances ? Il n'est pratiquement plus de jour où les médias ne développent l'un ou l'autre de ces thèmes, tout simplement parce qu'ils intéressent les Français, dont l'éducation des enfants est au cœur de la vie et des espoirs.
Ce sont ces controverses, mais aussi nos propres représentations, opinions et sans doute préjugés sur ce métier que nous avons voulu mettre de côté pour entreprendre cette étude avec une certaine disponibilité intellectuelle, une capacité de découvrir et même d'être surpris par un sujet trop connu, et pour aborder le métier avec un regard un peu neuf, bienveillant mais non complaisant. La méthode que nous avons retenue est liée à cette attitude, et comporte six axes que nous détaillons dans l'encadré cidessous : une étude historique, des synthèses des travaux de recherche sur les enseignants et sur les jeunes d'aujourd'hui, une étude de comparaison internationale, des enquêtes et des entretiens avec des étudiants, des stagiaires et des professeurs, un séminaire sur les compétences des enseignants, enfin l'audition de nombreuses personnalités et de responsables d'organisation.
La première partie de cette étude a pour ambition de mieux décrire et de mieux comprendre le métier de professeur du second degré ; carles métiers restent encore assez différents, malgré des convergences, entre le premier et le second degrés. Dans notre pays, contrairement à d'autres qui ont mis en place une "école de base" correspondant à la scolarité obligatoire, les identités forgées par des histoires séparées restent vives. Même si instituteurs et professeurs ne se lancent plus les anathèmes que relève Viviane IsambertJamati dans son 1 étude historique sur les rapports entre les deux ordres d'enseignement , Primaire et Secondaire sont des continents qui ne dérivent que lentement l'un vers l'autre. Dans le premier degré les maîtres, que chacun continue d'appeler "instituteurs" malgré une promotion largement entamée au grade de professeurs des écoles, forment un corps qui a su rester uni dans son identité comme dans ses attitudes pédagogiques. Dans le second degré la multiplicité des statuts, qui a jusqu'à présent été la règle, laisse progressivement place aux deux corps jumeaux de professeur de lycée professionnel et de certifié de collège et de lycée. De leur côté les agrégés, dont la proportion ne cesse de diminuer (à peine plus d'un professeur sur dix) constituent de plus en plus un corps de promotion et un marchepied vers les classes préparatoires et l'enseignement supérieur. Partout la féminisation continue de progresser, pour atteindre à la fin de la présente décennie sans doute 80% dans le premier degré et 60% dans le second. Mais d'autres évolutions s'annoncent plus brutales, comme le renouvellement des corps, surtout dans le second degré, où l'on devra recruter quelque 200.000 professeurs dans la période 20042014.
1 V. IsambertJamati, "Les primaires, ces incapables prétentieux",Revue française de pédagogien°73, 1985
4 La mesure de ces difficultés de recrutement inaugureseconde partie une  tournée vers l'avenir. Dans le second degré, ce problème, qui touche déjà certains pays voisins constitue un défi mais aussi une chance. La concurrence assez vive qui se profile sur le marché de l'emploi des cadres nous oblige à évoluer, à nous frotter à d'autres méthodes, à entreprendre un examen approfondi du métier, de son identité profonde, de ce qui constitue ses atouts et ses handicaps, à le voir tel qu'il est vraiment et à le concevoir tel qu'il pourrait être. Les propositions qui font l'essentiel de cette partie ne visent donc pas uniquement à traverser une mauvaise passe (bien qu'il faudra sans doute faire flèche de tout bois pour attirer vers les concours des publics plus nombreux et plus variés), elles cherchent aussi à dessiner pour l'avenir, c'estàdire pour la fin de la décennie, un métier plus attrayant, notamment pour les jeunes, plus ouvert sur la création, l'imagination, l'innovation et la dimension internationale. Un métier tourné davantage vers les attentes qui montent de la société : de plus grandes libertés dans la vie personnelle et un besoin accru de protection et de sécurité dans la vie sociale, une reconnaissance des diversités culturelles conjuguée à un impératif d'intégration sociale et politique, un effort soutenu de solidarité et une affirmation de l'égalité des chances, notamment par la mise en place de la formation tout au long de la vie. Dix ans, ce n'est pas trop long pour organiser une telle ambition, prendre le temps de débattre de ses formes avec les enseignants comme avec le reste de la société, pour préparer, expérimenter et mettre en œuvre de nouvelles formes de recrutement, d'affectation, de travail individuel et collectif, de formation et de reconnaissance, et aussi pour continuer à promouvoir des rapports plus confiants entre les enseignants et leur institution.
C'est sans doute au prix de ce renouvellement, qui est déjà bien entamé depuis deux ans, que le métier d'enseignant pourra fondamentalement continuer de répondre aux besoins de la nation et d’une société en pleine évolution.
Le travail de la mission s’est organisé autour de six axes complémentaires
5
1Une étude historique : depuis la création du lycée (1802) comment les attentes sociales et politiques visàvis des professeurs du secondaire ontelles évoluées ? Objectifs : situer les attentes actuelles dans une continuité historique ; mieux cerner ce qui résiste dans certaines injonctions au changement. Moyen : étude historique des grands rapports sur l’éducation.
2Des synthèses des travaux de recherche sur les jeunes et sur les enseignants du second degré : surtout sociologiques, ils ont été menés par des universitaires, en France et à l’étranger, ou produits par la DEP puis la DPD. Objectif : avoir une meilleure connaissance des attentes des jeunes d'une part, et d'autre part de la profession et de ses évolutions, ainsi que des représentations, craintes et attentes de ses membres, tant sur le plan professionnel que sur celui du statut social. Moyens : analyse des résultats des recherches, entretiens avec des chercheurs.
3Une étude internationale sur la manière dont la profession évolue dans les autres pays développés. Objectifs : connaître les problèmes auxquels sont affrontés nos partenaires de l’OCDE et les solutions qu’ils ont éventuellement dégagées. Moyen : étude menée par un expert des questions éducatives internationales.
4Des enquêtes et des entretiens auprès d’étudiants et d’enseignants. Quatre populations nous ont intéressés : les étudiants susceptibles de présenter un concours, les stagiaires en fin de seconde année d’IUFM, les jeunes enseignants et les enseignants en milieu de carrière. Objectifs : compléter la connaissance fournie par les travaux de recherche sur des points particuliers ; en particulier mieux cerner les représentations et les attentes des jeunes par rapport à la profession ; tester des pistes de propositions. Moyens : questionnaires et entretiens individuels.
5Une étude organisée par le groupe d’experts « Nouvelles pratiques d’enseignement et d’éducation »définir les nouvelles missionspar le recteur Losfeld. Objectif : aider à  présidé et compétences des enseignants du second degré dans un contexte d’élargissement et de diversification de leurs activités. Moyen : séminaire élargi suivi d'un travail interne du groupe.
6Des auditions de personnalités et de responsables d’organisation. Quatre groupes d’interlocuteurs ont été entendus : des responsables ministériels, ès qualités ou à titre personnel, notamment des doyens de groupes de l’IGEN ; des représentants des principaux syndicats d’enseignants et des fédérations de parents ; des représentants de la société civile et des responsables des ressources humaines. Objectifs : mieux connaître les analyses et les attentes internes et externes concernant la profession enseignante ; dégager des propositions pour la rendre plus attractive. Moyens : entretiens et réunions de travail.
Sept personnes ont accepté d’apporter leur collaboration à cette mission, ce sont : JeanPierre Bellier, chargé d'études sur l'emploi et les qualifications Françoise Clerc, professeure de sciences de l’éducation à l’université Lumière de Lyon Dominique Ginet, maître de conférences de psychologie à l'université Lumière de Lyon MarieClaude Grandguillot, formatrice MAFPEN et IUFM à Rouen JeanMichel Leclercq, ancien collaborateur de la DRIC Nadine Milhaud, IAIPR, chef du SAFCO de Toulouse Philippe Savoie, chercheur au service d’histoire de l’éducation de l’INRP
Première partie
L'enseignement du second degré, d'hier à aujourd'hui : une profession en crise ?
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"Les enseignants d'aujourd'hui vivent avec leurs élèves une situation trop difficile et trop décevante ; les élèves actuels diffèrent de ceux pour lesquels le système ancien avait été conçu; la société remet en question l'école et sa culture de façon trop radicale pour que le rapport pédagogique traditionnel puisse encore être accepté naturellement et vécu comme un accomplissement. A tout prendre, l'étonnant n'est pas que nous connaissions aujourd'hui une crise de l'acte pédagogique, mais bien qu'elle ne soit pas encore plus vive, et que les 2 enseignants réagissent aussi bien".Ce constat, extrait du rapport de Louis Joxe , date de 1972 ; tout y reste d'actualité… sauf peutêtre le dernier membre de phrase.
Le sentiment de dégradation des conditions d'exercice du métier qui affecte les enseignants du second degré, a été souligné par tous nos interlocuteurs et ressort de la plupart des entretiens que nous avons menés avec des enseignants en milieu de carrière (1520 ans d'ancienneté). Ce que décrivent le plus souvent, avec des accents bien sûr différents, les professeurs du second degré, les chercheurs ou les responsables syndicaux, est une détérioration liée aux évolutions des élèves : plus nombreux à être scolarisés dans le second degré, ils seraient moins bien préparés par leur éducation familiale et sociale à une scolarisation longue à laquelle ils n'aspireraient pas forcément, beaucoup seraient touchés par les effets de la crise économique (ségrégation urbaine, pauvreté croissante, délinquance…) et par les mutations de la famille (éclatement des couples, doute des parents sur l'autorité…). Ces évolutions leur apparaissent d'autant plus décourageantes qu'elles dépassent largement le cadre scolaire et provoquent un décalage entre les idéaux démocratiques des enseignants et une expérience professionnelle vécue comme décevante.
Mais si le constat est globalement partagé les analyses divergent profondément. Pour certains, la profession montre une sorte d'incapacité atavique à s'adapter à ces évolutions : la "culture enseignante" est par essence libérale et conservatrice, et le "corporatisme" constitue un frein puissant à toute évolution. Pour d'autres, les problèmes que rencontrent les enseignants dans leurs classes, et plus largement ceux auxquels l'école est confrontée, ne sont pas des problèmes proprement scolaires et ne peuvent donc trouver de solutions pédagogiques : les enseignants souffrent d'être renvoyés à leur impuissance sociale, ils sont les premiers témoins de la "misère du monde" et des effets dévastateurs de la mondialisation libérale, leur mission s'avère de plus en plus comme une mission impossible. Pour un troisième groupe de nos interlocuteurs, l'État est le principal responsable des difficultés des professeurs ; cette critique est classique, et légitime pour des syndicats dans leur relation avec leur employeur. Elle tend néanmoins à évoluer en passant du registre habituel de l'avarice à celui plus nouveau de l'impéritie : l'État n'assumerait plus vraiment son rôle républicain traditionnel de direction et de transformation de la société, au mieux il jouerait encore un rôle de régulation et d'arbitrage entre groupes sociaux (mais le plus souvent au profit des familles et au détriment des professeurs), au pire il laisserait le navire dériver sur son aire et le métier de professeur se dissoudre progressivement dans une accumulation de demandes sociales hétérogènes et contradictoires. D'autres enfin qui, il n'y a pas si longtemps, protestaient lorsqu'on évoquait le 2 L. Joxe,La fonction enseignante dans le second degré, Rapport au ministre de l'éducation nationale, 1972
7 "malaise enseignant", n'hésitent plus à parler de "crise de la profession". Certes, expliquent ils, le sentiment d'abandon et le ressentiment contre l'État, exacerbé par le conflit de 1999, est encore présent, mais plus profondément, c'est le doute, la disparition des repères et des certitudes professionnelles qui caractérisent cette "crise". Plus un problème qui ne fasse débat ou même qui ne divise la profession : l'éducation, le collège unique, la pédagogie, la prolongation des études, etc., aucune de ces questions ne fait plus accord, le consensus a 3 disparu . Le "corps enseignant", hier uni autour d'un partage de valeurs et de finalités consensuelles, semble laisser place à des individus en proie au doute, divisés sur tout, et partagés au fond d'euxmêmes sur les solutions à adopter et les décisions à prendre.
Ces différentes analyses, qui d'ailleurs ne s'excluent pas, invitent à entreprendre une étude approfondie de l'état de la profession. Avant toute proposition, nous avons voulu comprendre de quoi est fait ce "malaise", voire cette "crise", d'autant plus que ces mots ne sont pas nouveaux : ils sont utilisés depuis au moins un siècle dans des rapports officiels, et cette permanence pose d'autant plus problème que la situation de l'école et celle des professeurs ont, pendant ce temps, profondément évolué. C'est pourquoi notre étude débute par une approche historique, sans laquelle, pour reprendre l'image de Kenzaburo Oé,"le présent n'est que cette lumière à laquelle se heurte le papillon affolé", et l'on ne dispose d'aucun recul pour appréhender les singularités du temps présent et pour aborder, avec un peu moins d'incertitude, l'avenir plutôt préoccupant qui s'annonce avec le renouvellement profond du corps enseignant.
3 Le sondage effectué en 2001 par la Sofres à l'occasion du congrès du Snes est intéressant à cet égard
Les leçons de l'histoire
8
er L'enseignement secondaire public est né il y a précisément deux siècles, le 1 mai 1802, avec la création du lycée par la loi Fourcroy. Nos traditions administratives (l'établissement scolaire, le proviseur et son équipe de direction, le "bureau d'administration" ancêtre du conseil d'administration), comme nos normes pédagogiques (des professeurs formés à l'université, des contenus d'enseignement définis au niveau national, le contrôle de l'inspection générale) s'enracinent dans cette réforme essentielle, qui fut complétée à l'époque par le développement des Grandes écoles et l'institution de l'Université impériale. Cette fondation  à la fois fonctionnelle et symbolique  s'avérera d'une efficacité redoutable. Le modèle administratif et pédagogique du lycée, conçu pour accueillir une petite élite (12 000 élèves à la fin de l'Empire), scolarise de nos jours plusieurs millions d'élèves, et a progressivement ème imposé ses règles de fonctionnement à tout le second degré, au fil des réformes du 20 siècle : l'un après l'autre l'enseignement féminin, l'enseignement technique, les écoles primaires supérieures, les cours complémentaires, l'enseignement professionnel se sont agrégés au tronc commun du Secondaire et ont adopté la forme administrative du lycée et la légitimité universitaire de son enseignement. Depuis la réforme de 1989 en particulier, tous les maîtres du second degré sont formés à l'université, reçoivent dans les mêmes instituts universitaires une formation identique, puis bénéficient de la même carrière. Si elle est intellectuellement divisée, jamais la profession n'a été aussi administrativement et pédagogiquement unifiée. De façon paradoxale, la réalisation du vieil idéal unitaire et égalitaire qui a mobilisé autour du "corps unique" des générations de militants, et qui a orienté nombre de propositions de réforme, du rapport Ribot de 1899 au rapport Joxe de 1972, signe peutêtre aujourd'hui, pour les jeunes enseignants, et comme on le verra plus loin, la fin du sentiment dominant d'appartenance à un même corps.
Dans les rapports officiels, quelques thèmes récurrents
La profession enseignante, ses missions, son organisation, sa formation sont bien entendu souvent au cœur des réflexions, des propositions et des réformes qui ponctuent les deux ème siècles qui nous séparent de l'institution du lycée. De ce point de vue, le 19 siècle est principalement marqué par la volonté d'Hippolyte Fortoul, ministre du Second Empire, de s'attaquer entre 1852 et 1856 à la définition strictement disciplinaire du recrutement des 4 professeurs , réforme dont le but est, déjà, de remédier à une trop grande dispersion de l'enseignement. Mais cette tentative, vécue par les professeurs comme une sorte de "primarisation" du Secondaire, fait long feu, et ses traces sont déjà effacées quand en 1899 la commission parlementaire Ribot jette les bases de la réforme des lycées de 1902.
Cette contribution constitue le premier d'une longue série de rapports officiels qui dénotent pendant un siècle une remarquable continuité des thèmes abordés et des conceptions réformatrices. Ces textes souhaitent en général plus d'engagement des professeurs dans l'action éducative et davantage de présence dans l'établissement en dehors des cours. Ils insistent sur le rôle fondamental que devrait tenir l'établissement comme lieu d'élaboration de l'action pédagogique et éducative et réclament plus d'autonomie pour l'établissement, plus d'autorité et de moyens pour son chef, mais aussi davantage de responsabilités, et notamment de responsabilités collectives pour les enseignants en matière de pédagogie, d'organisation scolaire, d'élaboration partielle ou au moins de modulation des contenus d'enseignement. Ils regrettent une spécialisation disciplinaire excessive et le bachotage des élèves. Ils souhaitent une formation plus cohérente, capable d'intégrer les savoirs et savoirfaire particuliers dans un
4 Dans tout ce qui suit, on peut se référer, pour une analyse plus détaillée, à la note de Philippe Savoie, chercheur au service d'histoire de l'éducation de l'INRP, placée en annexe 1.
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