POIL DE CAROTTE

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Extrait de la publication Extrait de la publication POIL DE CAROTTE Extrait de la publication Du même auteur dans la même collection HISTOIRES NATURELLES Extrait de la publication JULES RENARD DE POIL CAROTTE Édition établie par Léon Guichard Bibliographie mise à jour (2010) par Clarisse BARTHÉLEMY GF Flammarion Extrait de la publication © Flammarion, 1965. Édition corrigée et mise à jour en 2010. ISBN : 9782081234932 Extrait de la publication INTRODUCTION AprèsFrançois le Champide George Sand, il faut e attendre le dernier quart duXIXsiècle pour voir un enfant paraître comme personnage principal d’un roman français, avecJack, d’Alphonse Daudet (1876) etL’Enfant de Vallès (1878, en feuilleton, et 1881 en volume). Tous deux, fils uniques, sont, avant Poil de Carotte, des enfants malheureux. La détresse de Jack vient de sa nais sance irrégulière et des situations fausses où elle le place. Mais il est fin, délicat, il adore sa mère, et sa mère l’aime à sa façon, démonstrative, légère, superficielle. Celle de Jacques Vingtras vient de conditions d’existence diffi ciles, de la position sociale inférieure et de l’attitude veule de son père, d’un milieu moralement sordide dont l’enfant voudrait se dégager et qui le mène à la révolte. Au contraire, Poil de Carotte est né et grandit dans une famille normale, où la vie est aisée.
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POIL DE CAROTTE
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Du même auteur dans la même collection
HISTOIRES NATURELLES
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JULES RENARD
DE
POIL CAROTTE
Édition établie par Léon Guichard
Bibliographie mise à jour (2010) par Clarisse BARTHÉLEMY
GF Flammarion
Extrait de la publication
© Flammarion, 1965. Édition corrigée et mise à jour en 2010. ISBN : 9782081234932
Extrait de la publication
INTRODUCTION
AprèsFrançois le Champide George Sand, il faut e attendre le dernier quart duXIXsiècle pour voir un enfant paraître comme personnage principal d’un roman français, avecJack, d’Alphonse Daudet (1876) etL’Enfant de Vallès (1878, en feuilleton, et 1881 en volume). Tous deux, fils uniques, sont, avant Poil de Carotte, des enfants malheureux. La détresse de Jack vient de sa nais sance irrégulière et des situations fausses où elle le place. Mais il est fin, délicat, il adore sa mère, et sa mère l’aime à sa façon, démonstrative, légère, superficielle. Celle de Jacques Vingtras vient de conditions d’existence diffi ciles, de la position sociale inférieure et de l’attitude veule de son père, d’un milieu moralement sordide dont l’enfant voudrait se dégager et qui le mène à la révolte. Au contraire, Poil de Carotte est né et grandit dans une famille normale, où la vie est aisée. Poil de Carotte, on le sent bien à la lecture, est un portrait de l’auteur. Jules Renard est né d’une inadver tance de ses parents. Son père avait alors quarante ans, sa mère vingthuit. Mariés de dix ans, les deux époux étaient depuis assez longtemps fatigués l’un de l’autre et résignés à la coexistence. « Oh ! toi, lui dit un jour son père, tu es venu sans que je le veuille. – Ça ne me froisse pas », répondit le fils. Les derniers venus sont facilement ou plus choyés ou moins bien traités que les autres : ben jamins ou cendrillons. Jules Renard fut de ces derniers, comme le vilain petit canard du conte d’Andersen.
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POIL DE CAROTTE
Les lecteurs dePoil de Carotte, et surtout les specta teurs de la pièce et des films, conservent de lui l’image sommaire d’un enfant malheureux, sinon martyr. Mais le petit bonhomme est plus complexe qu’il y paraît d’abord. Il nous est facile, grâce aux confidences de Renard, de discerner assez précisément sous l’influence de quels sentiments il a écrit ce livre, ce qui nous aide à pénétrer dans l’âme fermée de Poil de Carotte et à comprendre pourquoi l’auteur luimême qualifiait son œuvre de « mé lange déplaisant ». Nous pouvons écarter l’épithète, mais il faut retenir l’idée. Poil de Carotte naquit en effet, vers 1890, de la ran cune de Jules Renard contre sa mère, d’un parti pris d’ordre littéraire, et de souvenirs renaissants. Après son départ pour Paris, Jules Renard avait peut être oublié son enfance et ses mauvais moments, lorsqu’en 1889, pour les premières couches de sa jeune femme, il revint à Chitry. Il vit, il entendit à nouveau sa mère et souffrit de l’hostilité qu’elle témoigna à sa belle fille. Il a noté dans sonJournall’attitude blessante, les aigres répliques, les petites vexations infligées à sa bru par Mme Lepic, et il a écrit, en marge de ces « Paroles de bellemère », lors de la lecture qu’il fit de sonJournal, à partir de 1906 : «C’est cette attitude avec ma femme qui m’a poussé à écrire» La bellemèrePoil de Carotte. raviva le souvenir de la mère. Si pénible que soit le mot « vengeance », et, plus encore que le mot, ce sentiment, dans le cœur et sous la plume d’un fils, Renard a eu l’atroce franchise de l’employer, de l’avouer, en travaillant à sa pièce : « Il faut au moins que je profite un peu du désir que j’ai de me venger. » Il l’a fait en créant le type de la mauvaise mère, aussi inoubliable que celui de l’enfant mal aimé. Et ce désir de vengeance l’a poussé à accentuer le côté souffredouleur de Poil de Carotte, à le poser en victime innocente de la méchanceté de
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Mme Lepic, méchanceté contre nature, qui révolte beau coup de mères et de lecteurs. Mais Renard se proposait aussi, en écrivantPoil de Carotte, de rétablir, contre les « idées reçues », les images traditionnelles, les sentiments convenus, répandus par tant d’écrivains, poètes ou romanciers, la vérité sur l’enfant. « L’enfant, notaitil en février 1890, Victor Hugo et bien d’autres l’ont vu ange. C’est féroce et infer nal qu’il faut le voir. D’ailleurs la littérature sur l’enfant ne peut être renouvelée que si l’on se place à ce point de vue. Il faut casser l’enfant en sucre que tous les Droz ont donné à sucer au public. L’enfant est un petit animal nécessaire. Un chat est plus humain. Non l’enfant qui fait des mots, mais celui qui enfonce ses griffes dans tout ce qu’il rencontre de tendre. La préoccupation du parent est continue, de les lui faire rentrer. » Comme beaucoup d’autres œuvres de Renard,Poil de Carotteest donc une rectification, une mise au point. Ce souci de la vérité, cette volonté de protestation contre l’image poétique du « bel ange » aux cheveux blonds, aux ailes d’azur, au « doux sourire », aux « pieds tendres et purs », au « doux regard qui brille… innocent et joyeux », et contre le tableau romanesque de la vie tout en rose deMonsieur,Madame et Bébé, nous expliquent pourquoi Renard insiste sur ce que les autres passaient sous silence, nous montre la laideur, la malpropreté, la crasse de Poil de Carotte, qui noircit instantanément l’eau du baquet dans lequel il plonge ses pieds, qui rap porte des poux de la pension SaintMarc et qui « s’oublie » au lit, pourquoi il le montre, avec des excuses, menteur et voleur, et – cette fois sans excuse, par simple perversité et pour entrer dans le jeu de sa mère – sournoi sement méchant envers la vieille Honorine, qu’il fait ren voyer de la maison. Il tue une taupe, pour jouer avec ; il tue un chat, pour pêcher des écrevisses. « Dans les batailles à coups de boules de neige, il met des pierres dans les boules. Il vise à la tête, c’est plus court. » C’est
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