La lecture à portée de main
Description
Sujets
Informations
Publié par | bibebook |
Publié le | 10 janvier 2013 |
Nombre de lectures | 92 |
EAN13 | 9782824710631 |
Licence : |
En savoir + Paternité, partage des conditions initiales à l'identique
|
Langue | Français |
Extrait
GEORGES COU RT ELI N E
LES F EMMES D’AMIS
BI BEBO O KGEORGES COU RT ELI N E
LES F EMMES D’AMIS
1888
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1063-1
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
Lir e la licence
Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.Pr emièr e p artie
U N E CANAI LLE
1CHAP I T RE I
Lav er nié eut e xpliqué que son e x-ami
Laurianne le traitait couramment de canaille à cause d’un ser-Q vice , que lui, Lav er nié , avait der nièr ement r endu audit
Laurianne , il y en eut qui bétonnèr ent, d’autr es qui ho chèr ent la tête , d’un
air fix é et entendu de g ens blasés sur les sur prises de l’ e xistence et que
ses p etites vilenies n’ en sont plus à fair e rê v er .
― Il y a ser vice et ser vice , dé clara cep endant Christian Lestenet, il ne
s’agit que de s’ entendr e .
― Oh, c’ est bien simple , dit très sérieusement Lav ernié , j’ai couché
av e c une maîtr esse à lui.
Lestenet é clata de rir e et appliqua une claque sonor e sur la cuisse du
jour naliste en le traitant d’aimable far ceur , mais le p oète Ge or g es Lahrier
qui était philosophe à ses moments p erdus, dit simplement :
― Eh ! ne blaguons p as sans sav oir ! D’ab ord, c’ est toujour s l’ oblig er
que débar rasser un ami d’une femme assez misérable p our consentir à le
2Les femmes d’amis Chapitr e I
tr omp er sans motif. V oilà déjà qui tomb e sous le sens.
― Parbleu ! e x clama Lav er nié , et puis enfin, si je l’ai fait, c’ est p ar ce
que l’ami lui-même m’avait eng ag é à le fair e . Oh ! mon cas est assez sp
écial, mais il n’a en soi rien d’ e xtraordinair e , étant basé sur l’éter nelle
niaiserie humaine et ce b esoin de forfanterie qui est la pr emièr e manifestation
de la bêtise , comme l’instinct de la conser vation est la pr emièr e
manifestation de l’intellig ence . A v ez-v ous un q uart d’heur e à p erdr e , l’histoir e
vaut assez la p eine d’êtr e é couté e et il y a pr ofit à tir er de la morale qui
s’ en dég ag e ?
― Bah ! dit Fabrice , un quart d’heur e ! on p eut toujour s risquer cela !
― D’autant, répliqua le jeune homme , que v ous en ser ez quies p our
m’ enle v er la p ar ole si cee histoir e v ous embête , comme celle du p etit
navir e qui n’avait jamais navigué .
Et ayant fait r e v enir un plate au de b o cks mousseux, en pré vision
d’une nar ration un p eu longue , Lav er nié p arla comme suit.
Il y avait plus de dix ans que nous nous tuto yions, quand nous av ons
cessé de nous v oir , Laurianne et moi, il y a six mois de cela.
Je l’avais connu au quartier , à l’ép o que où je faisais mon dr oit. Ce
n’était certes p as un aigle , mais c’était un b on g ar çon, en sorte qu’il
m’avait plu tout de suite et que je continuai à le v oir assidûment, une fois
les études ter miné es. Laurianne m’aimait b e aucoup aussi et c’était rar e
qu’il laissât s’é couler la semaine sans donner un coup de pie d jusqu’au
jour nal, en sortant de son ministèr e , comme dans la chanson du Brésilien.
Il ar rivait, pr enait une chaise , s’installait, et dé v orait silencieusement les
jour naux, s’inter r omp ant de temps en temps p our jeter un coup d’ œil
furtif sur ma copie , ou p our compter des y eux la quantité de feuilles noir cies
aligné es de vant moi, côte à côte . Timide , de cee timidité puérile des g ens
qui se sav ent un p eu b or nés et se sentent dans un milieu qui n’ est p as le
leur , il était sag e comme une p etite fille , p arlait tout bas, comme dans une
église et r eniflait p endant des heur es, p ar crainte d’air er l’aention en
se mouchant. Enfin, la pâtur e quotidienne ache vé e et le p araphe p osé au
bas de la der nièr e p ag e , nous descendions au b oule vard, pr endr e à une
ter rasse quelconque le v er mouth de l’amitié .
Le plus souv ent, ces jour s-là , nous p assions la soiré e ensemble ;
Laurianne me pr enait sous le bras et m’ entraînait jusque chez lui, place du
3Les femmes d’amis Chapitr e I
théâtr e , à Montmartr e , où nous dînions en camarades, moi, Laurianne , et
la maîtr esse de Laurianne . Mes enfants, une r ude fille , crisli ! D es car
nations !. . . Un v rai Rub ens ! Je l’avais prise en amitié à cause de ses b elles
couleur s et aussi de son b on caractèr e ; et, de fait, il était imp ossible de
ré aliser mieux que cee fille le ty p e idé al de la femme d’ami. Pas de nerfs !
T oujour s de b onne humeur ! Je n’ai jamais r encontré — j’ai p ourtant bien
connu des femmes — de camarade plus char mante et plus g aie .
Nous jouions ensemble comme des g osses ; je lui pinçais le gras des
bras, ou les hanches, et elle m’ env o yait des talo ches que je lui r endais
av e c usur e , tandis que Laurianne , la pip e à la b ouche , criait :
― N’aie p as p eur , Lav er nié , vas-y ; tap e dessus ; la bête est dur e !
J’ai toujour s aimé ces jeux de br ute .
Un soir , comme en sortant de table , j’avais emmené Laurianne pr endr e
un b o ck dans une brasserie du b oule vard Clichy , je ne sais quelle idé e me
prît de lui dir e à brûle-p our p oint :
― Ah ! c’ est ég al, Angèle est v raiment une b elle fille !
Bon, ne v oilà-t-il p as mon homme qui me r eg arde fix ement et me
demande si elle me plaisait !
Je lui dis :
― Elle me plaît sans me plair e ; qu’ est-ce que tu v eux qu’ Angèle me
plaise dès l’instant qu’ elle est av e c toi ? Je la tr ouv e b elle fille , v oilà tout.
En v oilà encor e une question !
Il r eprit :
― Ah ! je vais te dir e ; c’ est p ar ce que si quelquefois tu en avais la
moindr e envie , il ne faudrait p as te gêner .
Je le r eg ardai, à mon tour .
― Ah çà , lui dis-je , qu’ est-ce qui te pr end ? Est-ce que je te p arle de
tout ça, m oi ? Je te dis que je tr ouv e Angèle une b elle fille , tu me rép onds :
« Il ne faut p as te gêner ! » Elle est bien b onne , p ar e x emple . Comme s’il
ne me suffisait p as qu’ elle soit la femme d’un camarade p our que je n’aie
jamais p ensé à v oir en elle autr e chose qu’une camarade !
― Mon cher , fit alor s Laurianne , la question n’ est p as de sav oir ce que
tu as pu p enser ou ne p as p enser ; je te connais depuis assez longtemps,
n’ est-ce p as, p our sav oir à qui j’ai affair e ; ce n’ est donc p as de ça qu’il
s’agit. Je n’ en suis p as moins p our ce que je te disais : ne te gêne p as si
4Les femmes d’amis Chapitr e I
le cœur t’ en dit. D’ab ord, Angèle , en v oilà assez comme ça ; six mois de
liaison, mer ci bien ! je n’ai p as b e aucoup l’habitude de m’éter niser dans
le collag e ; et puis enfin si tu as p eur de me fâcher , mon vieux, tu p eux
êtr e tranquille : celle-là qui me fera br ouiller av e c un ami de dix ans n’ est
p as encor e près d’êtr e fondue .
Je rép ondis à Laurianne qu’il me faisait suer av e c ses bravades, qu’il
avait été dé coup é sur le même p atr on que les autr es