Les secrets de Noyettes (Prix TALENT 2014 au Concours Littéraire "Maestro")
330 pages
Français

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Description

Julien Privas décide de s'installer à Noyettes, dans la propriété familiale. des surprises innombrables l'y attendent.Pendant qu'il s'occupe de les découvrir, il doit s'impliquer dans la recherche de sa soeur jumelle Carole, mal embarquée dans une drôle d'histoire d'amour en Ouzbékistan, où une secte lui fait subir un sort peu enviable. Julien réussira-t-il à la tirer de là sans trop de dommages ? Voici une intrigue forte dans un roman à la gloire du pays Cévenol, de l'amitié et de l'amour.
LA PRESSE EN DIT CECI :
Le Midi Libre (03/01/2013)...ainsi l'Alésien Claude Brahic signe avec bonheur le 2ème tome de sa saga sur "Les Bédigas". Avec ses personnages cette lignée vogue vers son destin au travers d'un roman atypique, à l'intrigue captivante qui nous fait découvrir des lieux fascinants au fil d'une histoire d'amour. Et tout cela est dit avec des expressions qui fleurent bon le terroir des Cévennes.
LES RENCONTRES "SAURAMPS" (26/03/2013) ... voici donc, un roman qui entraîne le lecteur dans des pays lointains où fleure bon l'exotisme, mais dont les effluves de la terre natale finissent, peu à ,peu par revenir. Partir des Cévennes, pour aller vers les vertes plaines d'Irlande pour terminer en parcourant la Route de la Soie, ce n'est pas banal. Le héros trouvera-t-il assez de temps pour découvrir ce qu'il souhaite ?

Informations

Publié par
Publié le 16 juin 2014
Nombre de lectures 88
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Claude BrahicLes secrets de NoyettesRoman
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© Claude Brahic, 2012 © Images de couvertures : Première de couverture : La maison dAlain Dupieu (tableau de lauteurLa porte bleue n° 98/94) Quatrième de couverture : « La Charbonnière » (tableau de lauteur n° 185B/98) © Images intérieures : La rue Rollin et la cathédrale dAlèsPrix artistique du 29° Salon International de Revin (nov. 1996)(tableau de lauteur n° 150/95) Le secret (tableau de lauteur n° 99/94) Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou ayant existé relèverait de la pure coïncidence.
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Le Cévenol est un saumon... comme lui, il revient toujours là où il est né.
« Goûte la vie avec la femme que tu aimes durant les jours de ta vaine existence. » LEcclésiaste
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Ici, jaime tout ; le ciel et lété, lhiver et même le vent, mon carré de menthe verte et les touffes de thym, les châtaigniers et les genêts, les odeurs et les gens. Dans ma vie, je nai pas eu à chercher un peu de mon enfance parce quelle est toujours restée près de moi, dans cette Cévenne que je nai jamais voulu quitter, parce que cest : le plus beau pays du monde.
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PREMIÈRE PARTIE Il sappelle Julien... En Cévennes, début dautomne. Debout sur le pas de la porte-fenêtre entrouverte, il restait là ; immobile, regardant la plaine sous ce vent brutal qui soufflait en rafales incessantes depuis qu’il était arrivé chez lui. Il était bientôt vingt et une heures. Si d’ici un tour d’horloge cette purge de mistral ne tombe pas, alors il va repartir pour trois jours de plus, se dit-il. C’est le dicton du coin: on dit que le vent du nord est comme la pisse chaude, quil marche par trois ;s’il ne tombe pas vers les dix heures du soir, tu en prends pour un tour supplémentaire. Cest ainsi : trois, six ou neuf jours. Au-delà, tout le monde sait que ce vent démoniaque est tellement fatigué d’avoir secoué la nature qu’il s’arrête aussi vite qu’il sest levé. Les platanes du bord de la route voyaient donc fuir leurs dernières feuilles jaunies et les hauts peupliers bordant la rivière ployaient leurs branches déjà déplumées comme un vassal qui se prosterne en signe de soumission devant la puissance de son maître. La plaine semblait avoirmis sa robe d’hiver en laissant pâlir les herbes des bords des champs ; dans quelques jours, les premières gelées blanches finiraient de les rôtir et la couleur marron clair règnerait définitivement sur ces hectares plats habituellement peuplés de plants de melons et de courges. Au-dessous de lui, le grand pré qu’il dominait montrait ses mottes d’herbe rase et les traces des pneus qu’un camion y avait incrustées. Il pensa que cela était la conséquence du déménagement de sa sœur.Au loin, dans la faible clarté de ce soir d’automne il distinguait encoremais pour bien peu de tempsles créneaux des deux tours du château de Ravières qui, depuis des siècles, se
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dressait à l’entrée de la plaine commeune sentinelle issue des époques révolues, devenu ensuite, au fil du temps, le témoignage vivace de ces périodes incertaines et mouvementées. Du village den face il ne voyait plus grand-chose, la lumière trop faible de cette fin de jour ne lui offrait pas ce plaisir, mais, bof !!! il connaissait si bien ces lieux où il avait passé toute sonenfance et une partie de sa jeunesse qu’il aurait pu dire, au jugé, le nom de presque tous les propriétaires des maisons et des fermes qui l’entouraient.Peut-être que seul le curé avait dû être remplacé parce qu’il était déjà bien âgé lorsqu’il s’était éloigné du clocher et de ce lieu voici plus de dix ans. Pour le reste, il était certain que demain, quand il irait chercher son pain et le journal, il arpenterait les pavés des mêmes ruesen pente que lorsqu’il était plus jeune, reverrait le portail d’entrée, le préau et la cour de l’école où, avec sa sœur, ils firent leur première rentrée des classes; qu’il rencontrerait les mêmes gens qu’auparavant et quil serait reconnu. Une chauve-souris rasa les tuiles rondes de la poutre sablière de la terrasse et lui fit lever les yeux. Le ciel était limpide, propre comme un sou neuf, lavé, essoré de tout nuage, de toute vapeur d’eau.lui, la grosse boule orangée montrait le Devant bout de son nez juste au-dessus de lhorizon, cette ligne noire que faisait la masse des arbres de la forêt, à gauche de la maison ; dans peu de temps ce serait une nuit de pleine lune. Au loin, une chouette hululait et, sur la petite route, une voiture passa en trombe, tous phares allumés. Un coup de vent plus fort que les autres arriva, comme pour dire que c’était le dernier ? Comme si le vent faisait son baroud d’honneurComme pour lui faire ? sentirqu’il n’était pas assez vêtu? Que la température était un peu frisquette ? Alors, il rentra dans la pénombre du grand salon pour allumer le feu dans la cheminée et prendre possession de lun des deux fauteuils restés là. Seuls les chuchotements des flammes dans l’âtre et les crépitements des bûches de chêne vert et d’arbousier qui s’y consumaient vinrent alors interrompre le silence qui l’entourait. La grande maison dormait, recroquevillée comme un bombyx dans son cocon et il aima retrouver cette ambiance de solitude, perdue depuis bien longtemps. À la lueur des flammes tremblantes il se retrouvait ainsi dans Noyettes, la maison familiale que sa mère avait quittée pour toujours voici déjà un an et que son père n’avait que peu habitée puisque, bien longtemps avant elle, il s’en était allé voyager
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définitivement dans un royaume toujours promis, mais encore inconnu des gens d’ici-bas. Ses parents l’avaient achetée peu après le suicidedu vieux papé Bédigas quand, un soir d’avril, Michèle sa mère, annonça à son homme rentrant de son travail qu’enfin leurs efforts pour avoir un enfant étaient couronnés de succès. La dernière de leurs nombreuses tentatives avec traitements aux hormones et inséminations n’avait pas été vaine; d’autant plus que cette grossesse tardive et tant espérée promettait des jumeaux. Pour se consacrer totalement à sa progéniture, Madame la Notaire décida derechef de vendre les parts qu’elle détenait dans l’étude d’Alès, de vendre aussi le mas de Malataverne dans la vallée du Galeizon cejolimas qu’ils habitaient depuis leur mariageet de se retirer ici, au calme et au large, en plein dans la campagne cévenole. Le coin lui avait plu, elle avait décidé de vivre là et son mari avait simplement dit : «si c’est ce que tu souhaites»Noyettesne date pas d’hier! C’est une ancienne bâtisse qui a vu passer plusieurs générations de ces autochtones un peu rustres et têtus qui peuplent le piémont des Cévennes. Elle est bien calée contre la pente sévère de l’une des premières montagnes qui forment, avec les collines raides et les vallons encaissés, le haut du Pays Grand Combien. Orientée plein sud, mais pas assez abritée des vents du nord pour être considérée comme un « Petit Nice», elle regarde d’un air supérieur les deux ou trois maisons bien plus modestes qui se trouvent à quelques centaines de mètres d’elle, là-bas sur le versant den face. Elle dépend du village de La Bégude qui n’est pas bien loin ;trois cents mètres à peine au-delà du charmant ruisseau coulant de lautre côté de la route et qui, tout en musardant dans la petite plaine, va finir sa course là-bas, dans le Gardon. D’ici on entend sonner les heures au clocher de l’église et, un mercredi par mois, la sirène de la mairie qui s’essaie en vue d’unappel d’urgence, des fois que… Derrièrela maison,c’est, encore par endroits, le royaume des chênes verts, des kermès et des cades, mais, aussi, de rares arbousiers parce que pour peu de temps le terrain y est encore calcaire. Ensuite, bien plus haut,mais pas très loin, c’est le schiste cévenol qui reprend ses droits et cela devient le domaine des pins noirs aux troncs rectilignes, des châtaigniers séculaires, des genêts, de quelques poiriers et merisiers sauvages, des hautes fougères et de quelques courageux mimosas. Depuis la route un petit chemin gravillonné, bordé de
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buis bien taillés,permet d’accéder àNoyettes. Quand on y arrive, la première chose que l’on remarque c’est cet escalier monumental qui s’imposedevant cette massive et lourde construction tout en pierre de couleur ocre ; un mélange de demeure bourgeoise et de magnanerie encadrée de chaque côté par six énormes palmiers chamaerops et deux séquoias géants. C’est une construction classique, simple. Sa façade ne présente aucun artifice incongru pouvant être interprété comme du «m’as-tu-vu ». Non ! Une bonne et grosse maison comme on savait faire ici à une certaine époque ; large, à un seul étage, ouverte presque entièrement sur une terrasse abritée qui court sur toute sa longueur. Son toit, à deux pentes dissymétriques, fait de tuiles rondes parfois moussues au rouge délavé par le temps, se prolonge donc sur cette terrasse, l’abritant ainsi en toute saison, car supporté par un mur de façade fait de six beaux piliers en pierre taillée reliés par quatre arcades en plein cintre. De lextérieur, en trois paliers, on parvient directement à la terrasse et aux pièces à vivre par un imposant escalier central bordé par des balustres ; un de ces vieux escaliers très évasés en bas, mais se rétrécissant au fur et à mesure quon le grimpe, vous offrant ses marches basses, larges et arrondies pour vous assurer une montée avec aisance. Sur chacun des paliers sont scellées deux jarresd’Anduze, mais en cette saison les habituels géraniums colorés qui y fleurissent dès le printemps ont déjà été victimes de la première barbaste. Au rez-de-chaussée, de part et d’autre de l’escalier,deux grandes portes-fenêtres vitrées flanquées de deux grands portails en plein cintre et en bois de châtaignier sont en harmonie avec les arcades de la terrasse. C’est là que sont les dépendances pour l’été parce que de plain-pied; c’est plus commode pour jouer au ping-pong, pour utiliser le spa et remiser tables, bains de soleil, hamac et fauteuils de jardin. Sur le côté gauche, un peu en retrait de la maison, l’ancienne clède a été réparée puis transformée voici plusieurs années. En premier lieu, ces travaux permirent d’y accoler un appentis pour mettre à l’abri des intempéries non seulement le bois pour la cheminée, mais également un véhicule et tous les outils nécessaires à l’entretien de la propriété. Le rez-de-chaussée, clos par deux grandes portes à double battant, fut consacré pour une moitié au garage pour deux automobiles et
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pour l’autre — maisil y a des lustres aucheval de mademoiselle Privas qui rêva, peut-être, de devenir un jour médaillée olympique en équitation. Un escalier extérieur en bois fut construit pour accéder facilement à l’étage utilisé à l’époque pour faire sécher les châtaignes ; car rapidement les nouveaux propriétaires le transformèrent en une grande salle de jeux familiale avec un billard, un baby-foot et un coin pour jouer aux cartes. Au fil des ans, elle devint un remisadou*les lorsque visites des enfants devenus adultes se firent de plus en plus rares. Aujourd’hui, débarrassée de ses accessoires de jeux, elle est devenue un mélange de bric-à-brac et de grenier qui n’intéresse personne. Sur le côté droit de la maison est un coquet petit jardin qui, durant des années,monopolisa l’amour et l’attention de maman Michèle. Il est planté de ces herbes communes mais nécessaires à toute maîtresse de maison cévenole qui prétend faire une cuisine locale et raffinée. Dans le fond, il y a un jeune laurier sauce qui a bien grandi puis, plus loin, le carré de menthe verte qui embaume dès que l’on caresse ses feuilles, voisin de quelques touffes de thym ; enfin, un peu plus bas, il y a des plants de sarriette dont seulement quelques brins mis dans la sauce d’une daube de bœuf vont donner l’illusion de humer la bonne odeur des cèpes de nos montagnes. Un tout petit coin est réservé à deux pauvres rangées de carottes et de salade doucette. Ce petit jardin est ceint d’une haie basse de romarins bien taillés attendant le printemps nouveau pour offrir aux abeilles leurs mignonnes fleurettes bleues. Cet endroit fut de toujours la grande fierté de la patronne qui le fit clôturer d’unfort grillage vert afin de le protéger des attaques incessantes des nombreux sangliers. Parce qu’à n’importe quel moment de la journée elle les voyait envahir la propriété en quête d’une très improbable nourriture ; elle ne les aimait pas, les considérant comme de fieffés destructeurs de cultures. / Dans le peu de provisions que sa sœur lui avait laissées, il découvrit, rangée dans le fond d’un placard, une bouteille qui était aux trois quarts vide : elle contenait un reste de cognac. À côté d’elle, un bocal en verre blanc de belle taille portait une étiquette jaunie sur laquelle il put lire avec difficulté, parce
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qu’écrit au crayon et en partie effacé par des doigts de serveurs peu méticuleux : «Conf…de l’of…20» Que voilà au moins deux bonnes choses pour finir cette soirée, se dit-il. Il prit les deux flacons, passa par la cuisine où il trouva sur une étagère un verre ordinaire qui avait sans doute contenu en son temps une quelconque moutarde, et revint se mettre près de la cheminée. Il déposa le tout sur la petite table basse. Qu’allait-il choisir ? Il renifla le contenu de la bouteille. Même s’il était un peu éventé parce que là depuis bien longtemps, le cognac ne devait pas être mauvais; à voir l’étiquette et parce que connaissant sa mère qui nelésinait pas sur la qualité de ce qu’elle achetait, il n’avait pas de doute; ce devait être du bon ! Le bocal, fermé à l’émeri par son joli bouchon de verre, était bien tentant :il adorait la confiture de l’officier. Sa mère avait toujours prétendu qu’elle ne faisait qu’appliquer une recette que toutes les femmes de la famille avaient utilisée avant elle, au fil des générations. Le contenu de ce bocal ne pouvait donc qu’être bon étant donné son âge. Tous ces fruits récoltés au gré des saisons, judicieusement choisis puis minutieusement nettoyés et, enfin, découpés en petits morceaux macérant dans de l’eau de vie à 45° depuis plus de dix ans… bien sûr que cela devait avoir un goût particulier. Ne pouvant se décider, il quitta de nouveau son siège, retourna dans la cuisine prendre un bol et une petite cuillère servant pour le petit déjeuner et revint s’asseoir. Ainsi, le verre était pour la bouteille et le bol pour le bocal. Pas de jaloux, les deux flacons allaient servir. Se laissant envahir par la double chaleurde l’âtre et de l’alcool, bien calé par les coussins de son fauteuil, les jambes allongées et les pieds reposant sur la petite table basse, tête en arrière, verre en main, il laissa aller sa machine à souvenirs. Julien ! Pourquoi diable ses parentsl’avaient-ils appelé ainsi? Il n’avait jamais pensé à leur poser la question et eux ne lui en avaient jamais parlé. Bref ! D’une seule traite il avait fait rapidement le trajet depuis son domicile de Paris. Son cœur n’était pas particulièrement léger, car lon ne quitte jamais facilement, sans interrogations parce que sans désir de retour, la personne avec qui on a vécu durant des années.
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