[1]Les Nuits blanches Fédor Mikhaïlovitch Dostoïevski1848Traduction du russe par Ely Halpérine-Kaminsky Et n’était-ce pas sa part de bonheur,Vivre seulement un instantDans l’intimité de ton cœur ? IV. TOURGUENEFF.Sommaire1 PREMIÈRE NUIT2 DEUXIÈME NUIT3 HISTOIRE DE NASTENKA4 TROISIÈME NUIT5 QUATRIÈME NUIT6 LE MATIN7 NotesPREMIÈRE NUITLa nuit était merveilleuse — une de ces nuits comme notre jeunesse seule enconnut, cher lecteur. Un firmament si étoilé, si calme, qu’en le regardant on sedemandait involontairement : Peut-il vraiment exister des méchants sous un si beauciel ? — et cette pensée est encore une pensée de jeunesse, cher lecteur, de laplus naïve jeunesse. Mais puissiez-vous avoir le cœur bien longtemps jeune !En pensant aux « méchants », je songeai, non sans plaisir, à la façon dont j’avaisemployé la journée qui venait de finir. Dès le matin, j’avais été pris d’un étrangechagrin : il me semblait que tout le monde me fuyait, m’abandonnait, qu’on melaissait seul. Certes, on serait en droit de me demander : Qui est-ce donc ce « toutle monde » ? Car, depuis huit ans que je vis à Pétersbourg, je n’ai pas réussi à mefaire un seul ami. Mais qu’est-ce qu’un ami ? Mon ami, c’est Pétersbourg toutentier. Et s’il me semblait ce matin que « tout le monde » m’abandonnait, c’est quePétersbourg tout entier s’en était allé à la campagne. Je m’effrayais à l’idée quej’allais être seul. Depuis déjà trois jours, cette crainte germait en moi sans que ...
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