Les Harangueurs provençauxIl parut, comme on sait, sous le règne de Louis XIV un ambassadeur perse enFrance ; ce prince aimait à attirer à sa cour des étrangers de toutes les nations quipussent admirer sa grandeur, et rapporter dans leur pays quelques étincelles desrayons de la gloire dont il couvrait les deux bouts de la terre ; l'ambassadeur, enpassant à Marseille, y fut reçu magnifiquement. Sur cela, MM. les magistrats duParlement d'Aix désirèrent, quand il arriverait chez eux, de ne pas se trouver enreste avec une ville au-dessus de laquelle ils placent la leur avec assez peu deraison ; en conséquence, le premier de tous les projets fut de complimenter lePersan ; le haranguer en provençal n'eût pas été difficile, mais l'ambassadeur n'yeût rien compris ; cette difficulté arrêta longtemps. La cour délibéra : il lui faut peude chose pour délibérer, un procès de paysans, un train à la comédie, etprincipalement une affaire de catins, tout cela sont de grands objets pour cesmagistrats oisifs, depuis qu'il ne leur est plus possible de porter encore, commesous François Ier, le fer et la flamme dans la province et de l'arroser des flots dusang des malheureux peuples qui l'habitent.On délibéra donc, mais comment parvenir à faire traduire cette harangue, on avaitbeau délibérer, on n'en trouvait pas le moyen. Se pouvait-il que dans une société demarchands de thon accidentellement vêtus d'une jaquette noire, dont pas un seul nesait seulement le français, il se ...
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