C’ ’ que j’ai entendue, et son nom. Un message assourdi sur le répondeur. Je me suis figé pour écouter chaque mot, guetter chaque intonation. Plusieurs fois je me suis repassé l’enregistrement. Jamais je n’aurais imaginé que cet homme eût répondu, et jamais qu’il compterait tant pour moi pendant quelques années. Il avait lu le manuscrit que je lui avais adressé trois semaines plus tôt. Il en disait du bien et demandait que je lui téléphone le lundi qui suivait. Un week-end entier m’en séparait. Enfin, j’avais pu parler à celui que je n’appelais pas encore par son prénom, Max. Le vieil homme avait été chaleureux et distant: il proposait que nous nous rencontrions. Je n’ai pris ni bus ni métro ce jour-là. J’ai marché. Je crois que je voulais savourer chaque pas. Si ce manuscrit n’était certes pas accepté, ma confiance s’était ravivée. Depuis que j’écrivais, il y avait eu plusieurs personnes pour affirmer qu’on devinait quelque chose dans mes textes. Quelque chose. Ce je ne sais quoi qui assure de l’existence d’un livre en gestation. Et chacun de ces avis m’avait protégé contre l’impatience. Ce qui différait cette fois, c’est que cet homme était éditeur. Max m’accueille au haut de l’escalier qui mène à son bureau :Vous avez bonne mine, dit-il. Je souris. Je le suis jusque dans une sorte de mansarde et m’assois face à lui. Je pense: il est là devant moi. C’est un vieux monsieur, un des grands psychanalystes français.
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