Plante enchantée (La)Armand Silvestre(1896)A mon ami MarianiIOr, l’aventure se passa précisément en 1547, l’année où mourut le très galant roiFrançois Ier. On ne peut douter de la véracité d’une histoire dont la date estprécisée aussi nettement.Donc, en ce temps-là, vivait, dans le castel seigneurial de Cantezac, en mon bonpays de Gascogne, où les nuits sont si belles, et les femmes plus belles encore queles nuits, damoiselle Izoline de Cantezac, fille du dernier seigneur de ce nom,noblement trépassé à Pavie, orpheline et n’ayant pour tuteur qu’un vieil oncleimbécile, et renommée, dans le pays même, pour l’éclat de ses charmes.Jamais fille du pays du soleil n’en avait gardé, en soi, plus de rayons, et c’était unenchantement que toute sa personne, depuis ses cheveux noirs moirés comme desailes de corneille, jusqu’à ses pieds petits et cambrés où se lisait toute l’aristocratiede la race ; fort pieuse avec cela, douce aux pauvres, sans grande volonté que cellede ne chagriner personne ; et tout le monde se découvrait sur son chemin, ledimanche, quand elle allait à la messe des pauvres gens, son livre d’heures sous lebras ; car la chapelle du château était fermée – et le château, lui-même, en ruines –le dernier seigneur de Cantezac n’ayant rapporté, de notre défaite en Espagne, quel’honneur, quand on ramena pieusement sa dépouille au caveau de ses aïeux,attention pieuse de sa fille, mais à laquelle avaient passé les ressources dernièresde la maison ...
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