Guy de MaupassantContes du jour et de la nuitC. Marpon et E. Flammarion, 1885 (pp. 343-354).◄ Souvenir La ConfessionMarguerite de Thérelles allait mourir. Bien qu’elle n’eût que cinquante et six ans, elleen paraissait au moins soixante et quinze. Elle haletait, plus pâle que ses draps,secouée de frissons épouvantables, la figure convulsée, l’œil hagard, comme si unechose horrible lui eût apparu.Sa sœur aînée, Suzanne, plus âgée de six ans, à genoux près du lit, sanglotait. Unepetite table approchée de la couche de l’agonisante portait, sur une serviette, deuxbougies allumées, car on attendait le prêtre qui devait donner l’extrême-onction et lacommunion dernière.L’appartement avait cet aspect sinistre qu’ont les chambres des mourants, cet aird’adieu désespéré. Des fioles traînaient sur les meubles, des linges traînaient dansles coins, repoussés d’un coup de pied ou de balai. Les sièges en désordresemblaient eux-mêmes effarés, comme s’ils avaient couru dans tous les sens. Laredoutable mort était là, cachée, attendant.L’histoire des deux sœurs était attendrissante. On la citait au loin ; elle avait faitpleurer bien des yeux.Suzanne, l’aînée, avait été aimée follement, jadis, d’un jeune homme qu’elle aimaitaussi. Ils furent fiancés, et on n’attendait plus que le jour fixé pour le contrat, quandHenry de Sampierre était mort brusquement.Le désespoir de la jeune fille fut affreux, et elle jura de ne se jamais marier. Elle tintparole. Elle prit des ...
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