Extrait de "Retour à Niceville" - Carsten Stroud
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Extrait de "Retour à Niceville" - Carsten Stroud

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Description

Tout droit sortie de la tradition du Southern Gothic, Niceville incarne le Sud, avec ses propriétés somptueuses, ses chênes festonnés de mousse espagnole et sa moiteur soporifique. Le seul problème, c'est que le Mal y vit beaucoup plus longtemps que les hommes. Plusieurs disparitions inexpliquées entachent la réputation du lieu, à commencer par celle du jeune Rainey Teague, littéralement volatilisé en plein jour devant la vitrine d'un antiquaire de la rue principale. C’est aussi le territoire où sévissent des flics peu scrupuleux qui braquent des banques et descendent froidement leurs collègues au fusil à lunette...
Quand Nick Kavanaugh, policier hanté par ses combats en Irak, et son épouse Kate, élégante avocate issue d'une des vieilles familles de la ville, décident de tirer tout cela au clair, ils n'imaginent pas dans quel enfer ils ont mis le pied.
Niceville est un polar mutant qui donne la chair de poule, une saga toxique où la violence contemporaine alterne avec des scènes troublantes dont les acteurs ne sont pas forcément de chair et d’os.
Vous n’avez jamais rien lu de tel.
Carsten Stroud est journaliste, auteur d'un ouvrage de non-fiction, Close Pursuit (longtemps sur la liste des best-sellers du New York Times) et de thrillers —dont deux récompensés par un Arthur Ellis Award — inspirés par son service dans l'armée américaine et ses missions d'infiltration dans des gangs de bikers. Il vit à Toronto.

Informations

Publié par
Publié le 21 mai 2014
Nombre de lectures 16
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

C a r s t e nS t r o u d
R E T O U R À NI C E V I L L E r o m a n
t r a d u i td el ’ a n g l a i s( é t a t s  u n i s ) p a ro l i v i e rg r e n o t
É D I T I O N SD US E U I L e 2 5 ,b dR o m a i n - R o l l a n d ,P a r i sX I V
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C O L L E C T IO ND I R IG É E PA RM A R I E - C A R O L I N EAU B E R T
Titre original :The Homecoming Éditeur original : Alfred A. Knopf, Random House, New York © Esprit D’Escalier, 2013  original : 978-0-307-70096-4
ISBN: 9782021045543
© Éditions du Seuil, mai 2014, pour la traduction française
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 3352 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
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Il est des morts qu’il faut qu’on tue
Fernand Desnoyers, 1858
Peutêtre l’univers estil suspendu à la dent de quelque monstre
Tchekhov, 1892
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Après la chute
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Ce que signifie l’expression militaire « déployéverticalement sur le terrain»
Le Learjet chinois était là, en bout de piste sur l’aéro-drome de Mauldar Field, réservoirs pleins, portes verrouillées, flèche prête à jaillir d’un arc bandé, réacteurs rugissants, freins fumants, volets battants… quand le téléphone de la tour de contrôle sonna : un hurlement strident, métallique. John Parkhurst, directeur de l’aérodrome, décrocha d’un geste brusque et – d’après ce qu’il dit un peu plus tard aux flics – se prit une engueulade magistrale. Bon, sachez que Parkhurst est à temps partiel un pasteur pentecôtiste et que certains mots percutants ne font pas partie de son vocabulaire. Bref, l’individu en ligne prétend qu’il est agent du FBI et braille à tue-tête que ce qu’il veut, c’est que ce p… de Learjet chinois soit immédiatement immobilisé. Parkhurst, genre mec tatillon qui aurait dû plutôt être dentiste que contrôleur aérien, lui demande son numéro de matricule et le gars perd alors complètement les pédales et recommence à hurler, si bien qu’au milieu d’une phrase qui commence par «espèce de c» Parkhurst lui raccroche au nez. Deux minutes plus tard, le Learjet, un 60 XR Luxe, 10 millions de dollars au bas mot, s’élance vers le ciel, grimpe presque à la verticale, façon montagnes russes, les deux réacteurs plein pot au point qu’ils font vibrer les fenêtres à 2 kilomètres à la ronde, et Parkhurst se rassoit, les oreilles encore en feu. Il dit «oh là là» puis encore
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« ohlà là», soupire, hoche la tête et pense :en plus,« Et le jour du Seigneur…» Et puis il se calme et son regard fait le tour de la pièce. Ses collègues ont les yeux fixés sur lui et se demandent ce qui lui arrive. Il constate que, à l’extérieur et grâce à Dieu c’est bien encore un superbe dimanche matin de printemps; le ciel est bleu et lumineux, il n’y voit aucun nuage, à part ce truc curieux du côté du sud-est. Ça ressemble à une traînée de fumée noire. Ou à des feuilles qui volent dans le vent. Parkhurst médite un instant sur la traînée noire, se deman-dant vaguement ce que ça peut être… Pendant ce temps, à 1000 pieds d’altitude et quelques, à 800 mètres de là, le Learjet chinois bascule légèrement sur l’aile et vire gracieusement vers le sud. Et tandis que Parkhurst essaye vainement de se concentrer sur un psaume, une étincelle d’appréhension se met à crépiter au fin fond de ses méninges. Il se retourne pour vérifier le radar Doppler. La traînée y apparaît dans un retour diffus, embrouillé. Il prend ses jumelles pour l’observer de plus près. En moins de deux secondes, il réussit à faire le point et dès qu’il comprend ce qu’il voit, sa gorge se serre, sa poitrine se paralyse. Ce n’est pas un nuage de fumée, ni une volée de feuilles. C’est un vol de corbeaux. Unénormede corbeaux. vol Parkhurst se précipite sur la radio : « Vol zéro six cinq dan-ger Learjet chinois redescendez immédiatement au palier… » Mais, compte tenu de la vitesse de l’avion, il est juste un peu trop tard. Parkhurst reçoit une brève réponse du copilote : « Volzéro six cinq à la tour, nous sommes…» suivie d’un juron perçant en chinois. Le jet rouge et or, scintillant dans la lumière matinale, fonce dans le vol de corbeaux et émerge de l’autre côté, son fuselage strié de sang, de chiures et de plumes noires emmêlées, le moteur tribord traînant un fin panache de fumée bleue. L’avion perd déjà de l’altitude.
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Le pilote est de nouveau en ligne : «La tour, ici vol zéro six cinq, nous avons de multiples impacts d’oiseaux, je répète multiples impacts d’oiseaux… visibilité zéro…» puis on n’entend plus que craquements et parasites. Dans la tour de contrôle, tout le monde est tétanisé à la vue du Learjet qui bascule sur la gauche et commence à piquer du nez. Le virage sur l’aile se change rapide-ment en tonneau puis en spirale de plus en plus serrée, l’avion pique, pique, la radio se réveille soudain, le pilote 1 est passé au hakkaet braille dans le micro. Derrière lui, des voix, des cris, et la trépidation assourdissante de l’avion. Le pilote revient alors à l’anglais :« Mayday mayday may…» On entend encore : «Dites à mon fils», puis un cri rauque… Le Learjet percute le sol à 3 kilomètres de là, en plein milieu du green, au trou 14 du golf Anora Mercer. Une boule de feu jaune, rouge et noire s’élève vers le ciel. Quelques instants plus tard, tout le personnel de la tour sent l’onde de choc frapper les vitres, une déflagration violente, suivie d’un grondement roulant. Ma carrière est fichue, pense Parkhurst. Et puis il se ravise :Les pauvres… À 1000 pieds au-dessus de l’endroit où l’avion s’est écrasé, les corbeaux se regroupent, dessinent un nuage étroit qui prend la forme d’une faux et tournoie au-dessus de la ville à basse altitude. Il monte ensuite en flèche vers le ciel, emplissant l’air pur et frais de cris stridents et métalliques, puis s’élève en une masse compacte et disparaît vers l’est, en direction du Mur de Tallulah. Dans la tour de contrôle, le silence d’outre-tombe est rompu par quelqu’un qui, du fond de la pièce, s’exclame d’une petite voix glacée d’effroi : «Putain de merde! »
1. Dialectehan parlé dans le sud de la Chine.(Toutes les notes sont du traducteur.)
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Parkhurst avale douloureusement sa salive et appelle la sécurité incendie. Pendant ce temps-là, l’un des contrôleurs aériens, Matt Lamarr, un nouvel embauché, s’est plongé dans la liste des vols au départ. Il regarde ses collègues, qui ont toujours les yeux braqués sur le champignon noir au-dessus du terrain de golf mais qui se sont mis à aboyer et hurler comme une meute de labradoodles barjots. – Eh,les mecs! tente-t-il par-dessus le vacarme. Et puis, un peu plus fort : – Lesmecs ! Tous, sauf Parkhurst, se taisent aussitôt et se retournent vers lui. – Quoi? – MorganLittlebasket a bien pris son Cessna à 10 h 22, non ? – Ouais,répondit un des gars. Et alors? – Etalors, il est où?…
En quatre minutes à peine, la police de Niceville fut sur le lieu du crash, suivie de près par les pompiers. L’incendie faisait rage et des mares de kérosène flambaient autour du point d’impact. Pas moyen de combattre le sinistre. La chaleur était trop intense. Seule chose à faire : attendre qu’il se calme et rechercher les dommages collatéraux aux alentours. En fait de dommage collatéral, on trouva un petit homme qui zigzaguait sur le terrain, l’air hébété, le nez fortement endommagé et le visage à moitié carbonisé. Il déclara se nommer Thad Llewellyn. De son galimatias hystérique, les personnels de secours réussirent à saisir que sa femme se trouvait à l’endroit exact où l’avion avait percuté le sol au milieu du green du 14. Elle s’appelait Inge et apparemment tenait le drapeau en l’air tandis qu’il essayait de sortir sa balle du bunker.
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Les flics se gardèrent bien de faire la fameuse vanne du trou en un – du moins en sa présence – et le conduisirent à l’hôpital Notre-Dame-de-Grâce. Puis ils délimitèrent un périmètre de sécurité afin de maintenir les curieux à distance – des personnels d’entretien et quelques gars qui s’étaient retrouvés dans la salle Hy Brasail pour un brunch du dimanche – et attendirent que l’incendie s’atténue et que les autorités viennent les voir. L’épave du Learjet n’était plus qu’un amas de métal fumant et rougeoyant de verre et de restes humains. Le vent poussait la fumée vers l’est, dans la direction opposée à celle où stationnaient les véhicules de police, mais les flics sentaient la chaleur à plus de 30 mètres de là. La pelouse du fairway était noire de suie et de débris. En fait, le green du 14 tout entier n’était plus qu’un cratère carbonisé de 15 mètres de profondeur et 30 de circonférence. Ce qui est somme toute normal quand un avion se déploie verticalement sur le sol.
Nick Kavanaugh et son adjoint Beau Norlett furent sur place quelques minutes après le crash. Les camions des secours étaient agglutinés le long de la voie des caddies et les pompiers en combinaisons de protection HazMat déversaient de la mousse carbonique tout autour de la zone d’impact. Les restes des passagers et de la femme de Thad Llewellyn finiraient étiquetés et emballés par les gars de la forensique ou l’équipe enquêtes-accidents de la sécurité des transports. Nick gara la Ford Crown Victoria bleu marine derrière un gros Chevrolet Suburban noir. Sur le hayon, le mot « superviseur »était écrit en lettres d’or : c’était le véhicule de service de Mavis Crossfire. Nick ouvrit sa portière et jeta un regard à Beau. – Préviensle lieutenant qu’on est là. Dis aussi à Tig que le sergent-chef Crossfire est sur les lieux. Après, tu iras voir ce que les premiers secours peuvent nous apprendre.
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Jeune Black bâti comme une pièce d’artillerie, Beau Norlett était un gars brut de décoffrage, mais zélé, coriace et gagnant chaque jour en compétence. Il travaillait avec Nick depuis seulement une semaine, et leur courte collaboration avait été pour le moins mouvementée. Pour mémoire : le braquage d’une banque à Gracie avec six morts, dont quatre flics. La disparition sans laisser de traces d’une vieille dame bien nantie, Delia Cotton, et de son jardinier, Gray Haggard, lui aussi âgé. Une prise d’otage à l’église avec intervention d’un tireur d’élite. Et la veille, encore une disparition : celle du beau-père de Nick, Dillon Walker, qui n’était plus dans son bureau du Virginia Military Institute et dont on n’avait pas de nouvelles. Et maintenant ça. Putain de semaine. – J’y vais, patron, dit Beau, encore dopé par son taux d’adrénaline des derniers jours. J’ai vu le camion de ravi-taillement là derrière, Nick. Vous voulez un café? P’tit pain au miel? – Un café, ça ira très bien, mais surtout ne m’appelle pas p’tit pain au miel devant tous ces flics en tenue. Beau éclata de rire. Nick referma la portière et prit le temps de défroisser sa veste de costume gris avant de l’enfiler. Il était en civil. Il accrocha à sa ceinture l’insigne doré de policier, glissa le Colt Python dans son holster côté droit, et observa la scène, histoire de se mettre dans le bain. Nick était encore jeune pour être un inspecteur de la brigade criminelle, mais avec huit ans passés dans les Forces spéciales, ses trente-deux ans étaient bien plus remplis que ceux du gars hirsute qui vit encore chez papa maman et termine à peine sa thèse de doctorat sur les préjugés de genre et de race dans l’herméneutique néokantienne. Nick – 1,83 mètre, les yeux gris-bleu, les cheveux noirs grisonnant aux tempes, le corps ferme et l’allure élégante –, marié à Kate Walker, avocate spécialisée dans les affaires
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