"Entre mes mains le bonheur se faufile" de Agnès Martin-Lugand - Extrait de livre
6 pages
Français

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Description

Depuis l’enfance, Iris a une passion pour la couture. Dessiner des modèles, leur donner vie par la magie du fil et de l’aiguille, voilà ce qui la rend heureuse. Mais ses parents n’ont toujours vu dans ses ambitions qu’un caprice : les chiffons, ce n’est pas « convenable ». Et Iris, la mort dans l’âme, s’est résignée.
Aujourd’hui, la jeune femme étouffe dans son carcan de province, son mari la délaisse, sa vie semble s’être arrêtée. Mais une révélation va pousser Iris à reprendre en main son destin. Dans le tourbillon de Paris, elle va courir le risque de s’ouvrir au monde et faire la rencontre de Marthe, égérie et mentor, troublante et autoritaire…
Portrait d’une femme en quête de son identité, ce roman nous entraîne dans une aventure diabolique dont, comme son héroïne, le lecteur a du mal à se libérer.

Informations

Publié par
Publié le 02 juillet 2014
Nombre de lectures 1 159
Langue Français

Extrait

Pour Guillaume, Simon-Aderaw et Rémi-Tariku, mes bonheurs.
Le bonheur est un rêve d’enfant réalisé dans l’âge adulte.
Sigmund FREUD
Le plus beau vêtement qui puisse habiller une femme, ce sont les bras de l’homme qu’elle aime.
Yves SAINT LAURENT
– 1 –
Comme tous les dimanches midi, je ne voulais pas y aller. Comme tous les dimanches midi, je traînais des pieds, je faisais tout pour gratter un peu de temps. Sauf que... – Iris ! appela Pierre. Qu’est-ce que tu fais ? – C’est bon, j’arrive. – Dépêche-toi un peu, on va être en retard. Pourquoi mon mari était-il si pressé d’aller déjeuner chez mes parents ? Alors que moi, j’aurais donné n’importe quoi pour y échapper. Seul avantage, cela me permettait d’étrenner ma dernière robe. J’avais réussi à mettre la touche finale la veille au soir, et j’étais satisfaite du résultat. J’essayais tant bien que mal de ne pas perdre la main et d’entretenir mon doigté de couturière. Et puis, dans ces moments-là, j’oubliais tout : mon travail à la banque d’un ennui mortel, la routine de ma vie, le délitement de mon couple. Je n’avais plus l’impression de m’éteindre. Au contraire, j’étais vivante ; lorsque je faisais équipe avec ma machine à coudre ou que je dessinais des modèles, je palpitais. Je me regardai dans le miroir une dernière fois et soupirai. Je rejoignis Pierre dans l’entrée, il pianotait sur son téléphone. Je pris un petit temps pour l’observer. Voilà près de dix ans que je le connaissais, sa tenue du dimanche n’avait pas changé d’un iota ; chemise oxford, pantalon de toile et les éternelles chaussures bateau. – Je suis là, lui dis-je. Il sursauta, comme pris en faute, et rangea son portable dans sa poche. – Ce n’est pas trop tôt, râla-t-il en enfilant sa veste. – Regarde, j’ai fini ça hier. Qu’en penses-tu ? – Très joli, comme d’habitude. Il avait déjà ouvert la porte d’entrée et se dirigeait vers la voiture. Il ne m’avait pas jeté un coup d’œil. Comme d’habitude.
À 12 h 30 pétantes, notre voiture se garait devant la maison de mes parents. Mon père nous ouvrit la porte. La retraite ne lui allait pas, il prenait de l’embonpoint, et sa cravate du dimanche l’étranglait de plus en plus. Il serra la main de son gendre, prit tout juste le temps d’embrasser sa fille avant d’entraîner Pierre au séjour pour boire le traditionnel porto. De mon côté, je passai brièvement dire bonjour à mes deux frères aînés, qui en étaient à leur deuxième verre. L’un était accoudé à la cheminée, l’autre lisait le journal dans le canapé, et ensemble ils commentaient l’actualité politique. Ensuite, je partis rejoindre le clan des femmes à la cuisine. Ma mère, tablier autour de la taille – cela faisait près de quarante ans que cela durait –, surveillait la cuisson de son gigot du dimanche et ouvrait les conserves de haricots verts pendant que mes belles-sœurs s’occupaient du déjeuner de leur progéniture. Les plus petits au sein. Quant aux plus grands, ils interrompirent leur repas de fête – pommes de terre dauphine et tranche de rôti froid – pour faire des bisous à leur tante. Je donnai un coup de main à ma mère, j’essorai la laitue et préparai la vinaigrette en les écoutant toutes les trois cancaner sur madame Untel qui avait fait un scandale à la pharmacie ou sur monsieur X à qui on avait découvert un cancer de la prostate. Et ma mère qui disait suivant le cas : « Elle devrait avoir honte de se comporter comme ça, ça ne se fait pas » ou « C’est quand même malheureux, si jeune... » De mon côté, je restais silencieuse, je détestais ces commérages.
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