Le jansénisme et les sacrements
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- mémoire - matière potentielle : du p
- identification finale du jansénisme avec le déisme
- ressemblance frappante avec le déisme des philo sophes rationalistes
- roi des rois
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LE JANSÉNISME ET LES SACREMENTS.
Premier article.
I.
Pourquoi ramener encore la question du jansénisme?
A qui nous tiendrait ce langage, nous répondrions avec
Joseph de Maistre : Ignorez-vous donc que a l'Église, de-
a puis son origine, n'a jamais vu d'hérésie aussi extraor-
« dinaire que le jansénisme? » (De F Église gallicane, 1.1,
ch. m.) L'historien Fleury rapporte, en y souscrivant, le
jugement d'un magistrat de ses amis qui appelle le jan
sénisme l'hérésie la plus subtile que le diable ait jamais tissue.
Chacun sait les deux vers de Voltaire :
Les raisonneurs de calvinistes
Et leurs cousins les jansénistes,
auxquels Joseph de Maistre ajoute comme commentaire :
« S'il n'a pas dit frères au lieu de cousins il ne faut s'en :
« prendre qu'à Ye muet. » (ZHd ch. iv.) M
Enfin, le socialiste Louis Blanc constate que dans les
chefs de la secte « il y avait du Calvin; —que la politique
« est au fond du débat ; — que ce n'est pas une des
« moindres gloires de Richelieu d'avoir su deviner les
« nouveaux sectaires; — que Ton sera étonné de tout ce
« qu'il y eut de sauvage dans leurs doctrines, etc. » {His
toire de la Révolution française tom. I, ch. IV») %26 LE JANSÉNISME ET LES SACREMENTS.
Est-il possible qu'une hérésie jugée si perfide par les
catholiques, et si bien accueillie par les protestants et les
philosophes, n'ait pas exercé une influence destinée à lui
survivre, et dès lors comment ne serait-elle pas l'objet de
la légitime préoccupation du théologien?
Or, l'histoire nous dit assez que les déplorables effets
d'incrédulité qui depuis plus d'un siècle ravagent notre
sol jadis si chrétien, sont en grande partie le fruit du
jansénisme. N'était-il pas de moitié avec les parlements
dans leur guerre contre l'Église et son Chef; avec les phi
losophes, dans leur travail de propagande en faveur du
déisme ; avec les révolutionnaires et les démagogues, dans
leurs efforts de bouleversement social? Assurément, per
sonne ne voudra le nier. Tout au plus sera-t-il possible de
contester l'existence d'un complot sourdement ourdi,
dont, pour les avoir prévues d'avance, les complices
doivent s'imputer à eux-mêmes toutes les conséquences
désastreuses. Aussi bien il importe peu. Nous n'entrerons
pas dans l'examen de la question, si intéressante d'ail
leurs, de la réalité du projet de Bourg-Fontaine. Il nous
suffit de constater que le jansénisme, à le considérer dans
ses doctrines, dans ses disciples et dans sa marche, offre
une ressemblance frappante avec le déisme des philo
sophes rationalistes. Y avait-il dans son camp un parti
pris de supplanter la révélation de Jésus-Christ? A-t-il
prévu et volontairement accepté toutes les ruines qui se
sont faites depuis? Encore une fois, nous ne l'affirmons
pas : du moins, les choses se sont passées comme dans
l'hypothèse d'une conspiration réellement existante.
Ce n'est pas que nous nous en rapportions à la parole
des jansénistes qui ont toujours cherché à repousser, en
la niant, une accusation aussi grave. L'on sait aujourd'hui
quelle valeur mérite leur témoignage. Quelle créance ac
corder à des hommes qui, érigeant le mensonge en système, 1 £ JANSÉNISME ET LES SACREMENTS. 27
s'imposent pour règle « de ne faire point de difficulté de
« désavouer la doctrine de l'évêque d'Ypres et de dire
« qu'ils ne sont point jansénistes », lorsqu'ils se rencon
treront avec des gens suspects, et auxquels la prudence
ne permet pas de se livrer? (Mémoires du P. Rapin>tom< III,
p. 34. Règlements et instructions de Messieurs les disciples de
saint Augustin de f Union.) Mais si les dénégations des jan
sénistes ne doivent pas nous émouvoir beaucoup, les dif
ficultés élevées par des historiens sérieux sur la réalité
d'un aussi détestable complot nous touchent davantage.
C'est pourquoi nous n'insistons pas (1).
Quant à l'identification finale du jansénisme avec le
déisme, c'est autre chose. Nier que Jésus-Christ soit mort
pour tous les hommes et nier la rédemption, n'est-ce pas
tout un? Enlevez la rédemption de l'homme par Jésus-
Christ, que devient la révélation de l'Homme-Dieu?Nous
voilà donc au pur déisme. Hélas ! il faut changer le mot,
et en prononcer un bien plus triste : nous voilà arrivés au
fatalisme. Gomment voir autre chose que l'aveugle destin
dans ce Dieu terrible de Jansénius qui impose sa loi à une
créature privée de liberté et destituée de grâce?
Cependant dos dogmes si sauvages, le mot est de Louis
Blanc, ne se persuadent pas aisément à un peuple raison
nable. Il y avait encore moins d'apparence de séduire une
foule de croyants. D'ailleurs, l'expérience de tous les hé
résiarques n'apprenait-elle pas qu'on ne fait accepter les
nouvelles doctrines qu'en affectant des dehors de religion
et d'attachement au culte établi? L'exemple de Calvin
n'était-il pas là pour inspirer plus de réserve et de sa
gesse? Calvin, disait un jour Saint-Cyran à saint Vincent
de Paul, Calvin soutenait une bonne cause, mais il l'a mal
(1) M. l'abbé Maynard discute fort solidement la question dans sa belle édition
ou plutôt son excellente réfutation des Provinciales de Pascal. (Tom. II, p. 215.
Inttod* à la 16° provinciale*) 28 LE JANSÉNISME ET LES SACREMENTS.
servie : Bene sensi't, maie locutus est (1). (Histoire du Jansé
nisme, par le P. Ra pin , édit. de M. Domenech, p. 321.)
Il fallut donc se couvrir de la peau de brebis. On se
disait catholique et dévoué à l'Église, alors que Ton résistait
à ses jugements et que Ton minait son autorité. On ne par
lait que du respect dû à la sainte hiérarchie, tandis que Ton
déchirait les pasteurs, en les vilipendant auprès de leurs
troupeaux. Et toutefois, par un secret instinct diabolique,
les jansénistes comprirent qu'il fallait mettre enjeu un
autre artifice, afin de tromper les multitudes.
Les sacrements sont le côté pratique de la religion de
Jésus-Christ. Par eux, la grâce coule, se maintient, se re
nouvelle et s'augmente dans les âmes; par eux, les fidèles
restent unis à Jésus-Christ et à son Eglise. Otez les sa
crements, la religion n'a plus de corps. Les fidèles ne
savent où se réunir; leurs croyances finissent par dispa
raître; la religion elle-même s'évanouira bientôt. C'est
donc aux sacrements qu'il faut s'attaquer.
Voilà ce qu'une révélation infernale vint apprendre au
jansénisme. Jamais peut-être le démon ne fut mieux
compris.
Aussitôt Ton entendit des doléances multipliées sur le
peu de respect dont les prêtres de Jésus-Christ entou
raient l'auguste, la sainte, la redoutable majesté des sa
crements. Tantôt l'on gémissait de voir les sacrements
avilis par la prodigalité des ministres ; tantôt l'indigna
tion éclatait à propos des mauvaises dispositions que Ton
tolérait dans les fidèles désireux de boire aux sources de
la grâce. Sancta sanetn! s'écriait-on sans cesse avec la vé
nérable antiquité. Évidemment, ajoutait-on pour conclu
sion pratique, une réforme est devenue indispensable. H
faut à tout prix, et sans délai, ôter le scandale du milieu
de Sion. Désormais, les sacrements s'administreront avec
(1) La Vie de saint Vincent de Paul, par Abelly, donne les mêmes détails. tE JANSÉNISME ET LES SACREMENTS. 29
une parcimonieuse réserve. Une barrièTe infranchissable
arrêtera les téméraires qui n'auront pas travaillé à s'en
rendre dignes par les efforts redoublés d'une longue et
pénible préparation.
Sans perdre de temps , le s novateurs se mirent à l'œuvre.
Avec une incroyable activité, ils publièrent leurs théories
sur les dispositions requises par rapport au sacrement de
Pénitence, sur l e délai de l'absolution, sur la fréquente
communion. Il ne reculèrent même pas devant la pénitence
publique qu