Mathias R EIMANN Professeur à l’University of Michigan Law School
RÉSUMÉ. — Cet article étudie, de manière expérimentale, l’américanisation du droit européen selon l'éclairage d'un processus de réception. Il s’appuie sur la distinction entre le plan (étroit) du droit positif et la sphère (plus vaste) de la culture juridique. D’une part, il estime que l’influence américaine sur le droit positif européen est plus limitée qu’on ne le pense généralement. D’autre part, il observe que l’impact sur la culture juri-dique, surtout sur l’organisation et le style des pratiques juridiques, est plus marqué qu’on ne pourrait le penser. Il conclut que, comme dans bien d’autres réceptions anté-rieures, ses effets sur la culture juridique, c’est-à-dire sur les méthodes, les sources, les pratiques et les rôles professionnels, seront probablement plus significatifs à long terme qu’un quelconque changement des règles positives.
INTRODUCTION En s’attaquant à la question posée par ce colloque 1 , il faut veiller à ne pas partir du mauvais pied. Il ne s’agit pas de savoir si l’américanisation du droit européen est ou bien un mythe ou bien une réalité, parce qu’elle est certainement un peu des deux. Le vrai problème est de savoir jusqu’à quel point elle est l’un ou l’autre, dans quels domaines et jusqu’où le droit européen a réellement dérivé dans la direction américaine, et ce que cela signifie pour les Européens et leur droit. Ce court article souhaite éclaircir ces points en considérant l’américanisation du droit européen comme un processus de réception. Une telle perspective n’est pas totalement originale – après tout, dire que nous sommes confrontés à une nouvelle occurrence de ce genre de phénomène dans une longue tradition n’a rien d’une découverte 2 . Cet article ne
1 L’américanisation du droit. Mythes ou réalités ? Traduction Florence Barberousse. 2 D’autres l’ont parfaitement souligné, cf. Wolfgang Wiegand, « The Reception of American Law in Europe , 30 American Journal of Comparative Law 2239 (1991) ; Rolf Stürner, « Die Rezeption des U.S-amerikanischen Rechts in der Bundesrepublik [p. 61-75] M. R EIMANN Arch. phil. droit 45 (2001)