M. Butterfly de Cronenberg
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
Site : abc-lefrance.com

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Langue Français

Extrait

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Fiche technique
Canada - 1993 - 1h41 -
Couleur
Réalisateur :
David Cronenberg
Scénario :
David Henry Hwang
d’après sa pièce
Montage :
Ronald Sanders
Musique :
Howard Shore
Interprètes :
Jeremy Irons
(René Gallimard)
John Lone
(Song Liling)
Barbara Sukowa
(Jeanne Gallimard)
Ian Richardson
(l’ambassadeur Toulon)
Annabel Leventon
(Frau Baden)
Shizuko Hoshi
(le camarade Chin)
FICHE FILM
Résumé
Gallimard, comptable à l’ambassade de
France en Chine, en 1964, tombe amoureux
de la diva Song Liling qui interprète
Madame Butterfly
. Liaisons fatale car Song
Liling est un homme…
Critique
David Cronenberg prend, apparemment,
ses distances avec l'horreur graphique qui
caractérisait la plupart de ses films précé-
dents. Mais le spectateur attentif
remarque que les thèmes habituels du
maître ontarien - la mutation, les désordres
psychologiques et corporels, les jeux déli-
cats sur l'identité… - ont été fondus, dans
M. Butterfly
, pour former une trame appa-
remment fluide, faisant en tout cas l'éco-
nomie des débordements dionysiaques qui
marquaient la filmographie, de Cronenberg
jusqu'à
La mouche
. Comme
Faux-sem-
blants
et
Le festin nu
,
M. Butterfly
s'ins-
pire d'une oeuvre préexistante, la pièce
homonyme de David Henry Hwang, tirant
1
M Butterfly
de David Cronenberg
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elle-même une partie de son argumen-
taire de l'opéra début de siècle de
Puccini,
Madame Butterfly
. Ce dernier
opus cronenbergien apparaît comme son
film le plus «littéraire» avec
Le festin
nu
, celui aussi ou science et science-fic-
tion n’interviennent nullement, même
sous forme métaphorique. Les territoires
du film ainsi délimités, on s'aperçoit, à
sa vision, que l'auteur y poursuit essen-
tiellement sa quête de l'identité indivi-
duelle initiée avec
La mouche
: avant,
les protagonistes, personnages neutres
et sans qualités, étaient agis involontai-
rement par des forces qu'ils ne domi-
naient pas ; depuis cette bande, les
héros cronenbergiens recherchent volon-
tairement un ailleurs corporel ou psy-
chologique, même s'ils risquent la mort
ou la désintégration. Le pari que pose et
tient ici le cinéaste canadien est de
savoir si, en sortant totalement du genre
fantastique, il réussirait à préserver son
univers tout en approfondissant
quelques unes de ses thématiques. On a
donc, à l'origine, deux cobayes : l'em-
ployé d'ambassade timoré René
Gallimard résidant à Beijin (interprété
par un Jeremy Irons tout droit sorti de
Faux-semblants
, et prolongeant le rôle
du frère faible, Beverly) et l'acteur tra-
vesti (
l’onnagata
du théâtre kabuki japo-
nais) Song Liling. Car, même situé hors
de toute problématique scientifique, ce
film n'en épouse pas moins les schémas
synthétiques et déductifs des autres tra-
vaux de Cronenberg Gallimard admire
une prestation de la star Song Liling
interprétant “Madame Butterfly”.
L'univers éblouissant, mystérieux, styli-
sé qui irradie de la diva bouleverse
l’employé qui souhaite en partager des
parcelles. On peut soutenir sans risque
d'erreur que c’est cet ailleurs (culturel,
sexuel…, en tout cas encore indéfini
dans l'esprit de Gallimard) qui attire le
bureaucrate plutôt qu'un amour de type
traditionnel. Il est dans la même posi-
tion que Max Renn dans
Vidéodrome
(présentateur médiocre de grivoiseries
télévisées, il entre en contact avec un
programme de «hard TV» qui l'aspire lit-
téralement) ou que le professeur
Brundle dans
La mouche
qui fait l'ex-
périence limite de la fusion avec un
insecte. Comme Brundle devient
Brundlefly, Gallimard se métamorphose,
de sa propre main mais guidé par le
désordre des sens qu’a provoqué en lui
Song Liling, en M. Butterfly : curieux
effet-repère dont Cronenberg a le
secret. Avant de poursuivre, il faut noter
un léger dysfonctionnement dans le
tissu dramatique cronenbergien.
M.
Butterfly
est le seul film (avec
Le fes-
tin nu
) de l'auteur à se situer en dehors
de l'espace nord-américain. Or, ce qui
faisait la force extrême des films du
cinéaste, c'est qu'ils inscrivaient leurs
hypothèses délirantes dans un environ-
nement réaliste à défaut d'être réel.
Quoi que détenteurs de pouvoirs ou
d'une science hors normes, les héros de
Dead zone
ou de
Faux-semblants
évoluaient dans des milieux banalisés,
reconnaissables comme quotidiens par
les spectateurs d'origine. Dans ce der-
nier opus, la Chine de 1964 et la France
de 1968 semblent être des toiles de
fond un peu trop rapidement dressées.
Mais l'ouverture du film, très stylisée,
nous indique que toute l'intrigue se
jouera sur une permutation de masques
et d'identités coulissantes. Comme dans
Scanners
et
Vidéodrome
, la quête du
“héros” est parasitée par sa confronta-
tion à une intrigue de type «thriller».
Song est une espionne chinoise qui tire
de Gallimard, rapidément promu vice-
consul de France, des renseignements
sur la politique américaine en Asie ; les
«yankees» n'ayant pas d'ambassade,
guerre froide oblige. Ce scénario-leurre
n'est pas destiné à être finalisé en lui-
même, mais sa logique interne (la diva
et son amant, arrêtés par les services
secrets français, sont confrontés l'un à
l'autre : Gallimard a alors la révélation
de l'identité sexuelle de sa concubine)
précipite et précise la nature de la quête
du protagoniste central. Il inscrira sur
son corps les fantasmes de la double
identité de Song avant de se donner la
mort. La fin n'est pas si différente de
celle de
Vidéodrome
où Renn, devenu
homme-machine, se suicide pour
renaître dans une «nouvelle chair» ; ou
de celle de
Faux-semblants
qui scelle
la fusion post-mortem des frères sia-
mois. Ne nous y trompons pas,
Cronenberg reste fidèle à lui-même,
c'est bien cette recherche de l'altérité,
de la différence qui guide Gallimard du
travestisme au transsexualisme, il n'y a
qu'un pas que M. Butterfly franchit en
se donnant la mort (opération suprê-
me !), pour renaître métaphoriquement,
ailleurs, en «Song Gallimard». Ce qu'il y
a de nouveau dans la dernière oeuvre de
David Cronenberg, c'est qu'elle permet
une lecture au premier degré de l'in-
trigue : une sorte d'amour fou tel qu'au-
raient pu en concevoir les surréalistes
s'ils n'étaient aussi homophobes.
L'idéalisation du partenaire (Gallimard
possède Song habillé, croyant, comme
ces amants trop confiants, à l'intégrité
de l'apparence et ne demandant pas de
preuves supplémentaires ; ici, sur l'iden-
tité sexuelle, ailleurs, sur la fidélité sen-
timentale de l'aimée) permet, car on est
dans un univers de fantasmes, ce type
d'«invraisemblance». Cronenberg autori-
se cette double lecture absente des
autres films où
l'expérience
ne laisse
aucune place à la relation amoureuse,
sans la censurer mais sans la souhaiter
vraiment, et tant mieux si de nouveaux
spectateurs découvrent son oeuvre à tra-
vers ce “faux-semblant”. (…)
Raphaël Bassan
Le Mensuel du Cinéma n°16
SALLE D'ART ET D'ESSAI
C L A S S É E R E C H E R C H E
8, RUE DE LA VALSE
42100 SAINT-ETIENNE
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RÉPONDEUR : 04.77.32.71.71
Fax : 04.77.32.07.09
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Rarement, un auteur aura montré autant
de constance dans sa thématique. De
ses premiers films expérimentaux à ses
oeuvres les plus récentes, David
Cronenberg n'a jamais cessé de mettre
en scène le pouvoir de l'esprit sur le
corps et celui du corps sur l'esprit. Dans
le même temps, il a renouvelé son inspi-
ration (au point de dérouter parfois son
public) en s'éloignant progressivement
du carcan d'un genre, la science-fiction,
qui lui valut la reconnaissance du grand
public, pour en intégrer certains codes à
un propos plus vaste. Sous ses allures
de drame psychologique,
Faux
Semblants
cultivait la figure du méde-
cin fou et mariait d'ancestrales peurs du
corps à une gémellité monstrueuse tan-
dis que
Le Festin nu
(le premier film de
Cronenberg sans savant ni homme de
sciences) détournait la magie des effets
spéciaux au profit d'une métaphore sur
les affres de la création.
Apparemment dépouillé des oripeaux du
fantastique,
M Butterfly
intègre encore
une part d'imaginaire dans sa représen-
tation du réel, à commencer par la
reconstitution du Pékin des années
soixante qui rappelle au détour d'une
ruelle les dédales de l'Interzone. Sauf
erreur, Cronenberg est le premier
Occidental à avoir tourné à Pékin depuis
les événements de la place Tiananmen.
Mais des plans de studio ostensible-
ment insérés au milieu des prises de
vues en extérieurs réels créent un déca-
lage qui, loin de nuire à la crédibilité de
l'édifice, accentue au contraire le hiatus
entre l'orientalisme de bazar dans lequel
se complaît le héros et la sordide mysti-
fication dont il est la victime. Dans cette
variation fictive (adaptée d'une pièce à
succès) sur l'histoire vraie de ce diplo-
mate qui a découvert, au terme d'une
liaison de plusieurs années, que sa maî-
tresse chinoise était en fait un agent
secret de sexe masculin, Cronenberg ne
cherche pas à leurrer le spectateur
comme le fait Mankiewicz avec le
double personnage de Michael Caine
dans
Le Limier
. Il s'interdit le subterfu-
ge des prothèses qui auraient empêché
de reconnaître John Lone derrière les
maquillages ambigus de Song Liling et
fait cohabiter sur l'écran la réalité et son
fantasme, dans des scènes différentes
d’abord, puis à l'intérieur d'un même
plan.
Le procédé, repris du
Festin nu
, émeut
davantage ici dans la mesure où il
illustre la tragédie d'un amour impos-
sible (dans son adaptation, le réalisateur
a gommé autant qu'il était possible l'his-
toire d'espionnage liée à cet incroyable
fait divers). René Gallimard n'est pas
tombé amoureux de Song Liling, la can-
tatrice, mais de Madame Butterfly, le
personnage qu'elle/il incarnait lors de
leur première rencontre (sa confusion
entre la nationalité japonaise de l'héroï-
ne de Puccini et celle, chinoise de son
interprète est significative). Obsédé par
cette image idéale de la femme orienta-
le (créée de toutes pièces par un artiste
européen), il tient absolument à la
retrouver dans son quotidien et, au
mépris de toute contingence matérielle,
amène Song Liling à lui jouer la comédie
dans la vie. D'où l'importance des
maquillages et des costurnes riches en
couleurs derrière lesquels se travestit le
Chinois. Pius qu'un élément de séduc-
tion, ces artifices alimentent les rêveries
romantiques de René et lui permettent
de ne pas voir la réalité (le pénis de son
partenaire) lors de leurs étreintes à
peine suggérées en plan général. Aux
détails scabreux de cette liaison hors du
commun abondamment commenté dans
la presse à l'époque du scandale, le réa-
lisateur canadien préfère le flou poé-
tique de l'espion chinois au tribunal :
«J’imitais René à des pratiques orien-
tales que j'inventais au fur et à mesure
pour lui seul.»
D'un point de vue dramatique, les
parures exotiques remplacent les mons-
trueuses altérations physiologiques des
précédents films de Cronenberg.
Lorsque, dans le fourgon cellulaire, Song
Liling se déshabille pour révéler sa véri-
table identité à René, on pense à la ter-
rible apparition de Roy Scheider derrière
la peau déchirée de la lesbienne dans
Le Festin nu
. A cela près qu'ici, l'émo-
tion l'emporte sur la surprise. Bourreau
cruel d'un Jeremy Irons irradiant de dou-
leur, John Lone, dans le plus simple
appareil, redevient une dernière fois
Madame Butterfly. Face à ce corps nu
qu'il ne veut pas voir mais qu'il ne peut
plus ignorer, René comprend brusque-
ment que depuis le début, la véritable
Butterfly, c'était lui. S'accrochant à son
rêve brisé, il poursuivra jusqu'au bout la
représentation, abolissant définitive-
ment la barrière entre la réalité et son
imaginaire dans un geste qui renvoie au
sacrifice d'Elliot Mantle (également
interprété par Jeremy Irons) à la fin de
Faux-Semblants
.
Cet épilogue éblouissant donne après
coup une nouvelle signification au titre et
montre assez comment Cronenberg s'est
approprié la pièce de David Henry Hwang
pour en faire une libre adaptation de
l'opéra de Puccini, dont l'air le plus connu
se prolonge dans la superbe partition de
Howard Shore. Le film doit beaucoup au
talent de ses deux principaux comédiens,
mais on ne saluera jamais assez le travail
de techniciens complices qui ont permis
à l'auteur de
Videodrome
de s’imposer
parmi les meilleurs réalisateurs du
moment. Faisant contraster les ocres des
scènes d'ambassade avec le rouge vif de
la culture chinoise, la décoratrice Carol
Spier poursuit une recherche chroma-
tique particulièrement fructueuse depuis
La Mouche
. La photo de Peter
Suschitzky, outre qu'elle s'attache à sou-
ligner la féminité des traits de John Lone,
oppose dans ses éclairages le lyrisme
des scènes romantiques à la crudité des
retours au réel.
Je laisserai à d'autres la comparaison de
M Butterfly
avec le beau film de Chen
Kaige
Adieu ma concubine
. Car si cer-
tains thèmes des deux ouvrages se
recoupent, leurs ambitions sont par trop
dissemblables. (…)
Philippe Rouyer
Positif n°399 - Mai 1994
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Le réalisateur
Réalisateur canadien né en 1943.
Une suite remarquable de films d’horreur
au scénario très original. Dans
Parasite
Murders
, des parasites, destinés à libé-
rer la sexualité, envahissent un
immeuble, provoquant d’épouvantables
bacchanales. On n’oubliera pas le plan
où les chères petites bêtes, des
monstres gluants qui se déplacent par
les tuyaux, pénètrent dans la baignoire
de Barbara Steel. Dans
The Brood
, sous
la direction d’un psychiatre (Oliver Reed)
une femme matérialise ses haines en
donnant naissance à des enfants
mutants et meurtriers. Une image-choc:
la scène où Samantha Eggar relevant sa
chemise nous montre comment naissent
les chérubins. Tout Cronenberg s’y trou-
ve résumé, Mais à force d’outrance,
Cronenberg
finit
par
lasser.
Vidéodrome,
au splendide sujet (la
chaîne de télévision spécialisée dans le
porno), sombre dans les effets spéciaux
les plus grossiers. On peut lui préférer
Dead Zone
d’après un roman de S.
King, histoire d’un homme qui peut pré-
voir l’avenir et découvre qu’un candidat à
la présidence des Etats-Unis risque, s’il
est élu, de déclencher une guerre mon-
diale. Que faire ? Le dénouement était
extraordinaire et bien dans la ligne des
oeuvres de Cronenberg. On comprend
qu’il ait été tenté par un remake de l’hor-
rifiante
Mouche
de Kurt Neumann, puis
par le thème des jumeaux dans le mal-
sain
Dead Ringers
- et enfin par l’adap-
tation du chef-d’oeuvre de William
Burroughs,
Le festin nu
.
Filmographie
Stereo
1968
Crimes of the future
1969
The Parasite murders
1974
Frissons
Rabid
1976
Rage
Fast company
1978
The brood
Chromosome 3
Scanners
1979
Vidéodrome
1981
The dead zone
1986
The fly
La mouche
Dead ringers
1988
Faux-semblants
The naked lunch
1991
Le festin nu
M.Butterfly
1993
Crash
1996
eXistenZ
1999
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