Lutte contre les sfrattis à Turin
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lutte contre les sfratti a turin assemblees piquets et occupations 2011-2012 PLAN DU QUARTIER Corso Novara Via Soana Via Lanino Piazza della Repubblica SOMMAIRE AVANT-PROPOS p 6 BRÈVE CHRONOLOGIE D’UNE LUTTE EN COURS p 8 Sfratto et procédure p 9 UNE ASSEMBLÉE POUR S’AUTO-ORGANISER p 10 DES LIEUX QUI CONCRÉTISENT LA LUTTE Via Lanino, « Coch Mrdoch, la Maison Volée » p 13 Corso Novara, « Scarface » p 15 Via Soana, « Ni concession ni charité » p 17 UNE MANIÈRE DE RÉSISTER, LES PIQUETS Récit du 19 juin p 19 Tactique, retour sur le 17 juillet p 21 12 septembre, piquet offensé passe à l’offensive p 23 18 septembre, une journée de barricades p 24 QUELQUES RÉFLEXIONS Un objectif minimum désirable p 27 Une bonne soeur à la matraque. La San Paolo à Turin p 32 -5- AVANT-PROPOS e sont des journées comme celles du 19 juin ou du 18 septembre 2012, les balades 1Cdans les rues de Porta Palazzo et de Barriera di Milano , mais aussi des petits détails au quotidien qui permettent de réaliser l’ampleur qu’a prise la lutte contre les 2sfratti.

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Publié le 03 juin 2014
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

lutte contre les sfratti a turin
assemblees piquets et occupations 2011-2012
PLAN DU QUARTIER
Corso Novara
Via Lanino
Via Soana
Piazza della Repubblica
SOMMAIRE
AVANT-PROPOS6 p BRÈVE CHRONOLOGIE D’UNE LUTTE EN COURS8 p Sfratto et procédurep 9 UNE ASSEMBLÉE POUR S’AUTO-ORGANISER p10 DES LIEUX QUI CONCRÉTISENT LA LUTTE  ViaLanino,« Coch Mrdoch, la Maison Volée »p 13  CorsoNovara,« Scarface »p 15  ViaSoana,« Ni concession ni charité »p 17 UNE MANIÈRE DE RÉSISTER, LES PIQUETS  Récitdu 19 juinp 19  Tactique,retour sur le 17 juilletp 21  12septembre, piquet offensé passe à l’offensivep 23  18septembre, une journée de barricadesp 24 QUELQUES RÉFLEXIONS  Unobjectif minimum désirablep 27  Unebonne soeur à la matraque.  LaSan Paolo à Turinp 32
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AVANT-PROPOS e sont des journées comme celles du 19 juin ou du 18 septembre 2012, les balades C 1 dans les rues de Porta Palazzo et de Barriera di Milano , mais aussi des petits détails au quotidien qui permettent de réaliser l’ampleur qu’a prise la lutte contre les 2 sfratti. En terme de rapport de force, alors qu’il suffit en principe d’un huissier et d’un serrurier pour exécuter unsfratto, ce sont des centaines de flics que la préfecture mobilise au cours de ces journées, pour finalement n’expulser que dessfrattandiqui avaient choisi de ne pas résister. Quant à l’existence effective de la lutte dans le quartier, ce ne sont pas que les nombreux tags et affiches qui recouvrent les murs qui donnent des indications. En est une autre, le fait, quand on vit dans le quartier et qu’on participe à cette lutte, d’être arrêté-e dans la rue par des gens qui souhaitent en discuter, pour faire part de leur propresfrattomais aussi pour donner leur avis.
Nous avons vécu des étapes importantes de cette lutte, cela fait quelque temps que nous habitons le quartier ou que nous y passons souvent. Passé l’enthousiasme de prime abord, il nous a paru aussi qu’en termes de pratiques, de méthodes et de perspectives cette lutte revêtait des aspects qui valaient la peine de s’y intéresser et de les partager.
Le choix d’une assemblée d’abord, qui rassemble des compagnon-ne-s, qui s’organisent aussi ensemble par ailleurs, et des personnes du quartier qui sont soussfrattoou qui s’intéressent au parcours de lutte en cours. S’y pose, la question de l’organisation avec des individus qui font le choix de lutter pour sortir d’une situation à laquelle, isolés, ils ne trouvent pas d’issue. Il n’est pas question là de demander des logements sociaux ou une réforme qui mettrait fin aux expulsions de logements, mais de s’opposer concrètement à ces expulsions, en s’organisant sans médiation et sans revendication. Il s’agit de trouver par nous-mêmes (nous entendons là tous les participants à la lutte) un moyen de résoudre le problème dans l’immédiat, notamment par les occupations. En outre, l’objet de cette lutte a la caractéristique de ne pas se poser que dans le court terme mais d’avoir une existence dont la fin n’est pas imaginable en dehors d’un bouleversement radical de la société. De fait, nous ne pensons pas que l’État soit en mesure de mettre fin au « problème du logement ». À cela, s’ajoute le fait que même les maigres concessions que faisait encore l’État ne sont aujourd’hui plus d’actualité : même de miettes, il ne reste rien. Ainsi, dans la mesure où les risques de récupération sont minces puisqu’il n’y a rien à proposer, et que cette lutte s’inscrit dans une continuité, il est possible de l’envisager avec des perspectives à long terme. Elle est en effet constituée d’étapessuccessives permettant une évolution tangible et
1Quartiers de Turin. Voir carte p 4.
2 Sfratto (sfratti au pluriel) : c’est une expulsion de logement, suite à un impayé de loyer ou deprêt. Les sfrattandi sont les personnes sous le coup d’une procédure d’expulsion. Les sfrattati sont les personnes qui ont été expulsées. Voir p 9. -6-
déjà largement perceptible depuis un an et demi qu’elle dure. En revanche, ces perspectives vont de pair avec un certain nombre de limites. La continuité de la lutte a pour risque de n’être assumée que par les compagnon-ne-s dans la mesure où beaucoup desfrattandi, une fois qu’illes ont trouvé une autre solution, cessent de participer à l’assemblée. De plus, s’il n’y avait pas une recomposition permanente des modalités de lutte due aux changements de stratégie des flics, et donc liée à un calendrier imposé par eux, la cristallisation de sa forme pourrait en être une autre limite. Alors qu’elle éprouve déjà des difficultés à s’autonomiser, le risque serait d’aboutir à une assemblée pérenne et immuable qui entrerait dans une sorte de routine. Cependant, dans l’hypothèse où ces limites seraient au fur et à mesure dépassées, il est d’ores et déjà imaginable que la réactivité du quartier et les formes que prend cette lutte pourraient amener à une situation ingérable pour les flics et l’État.
Si nous avons rassemblé ces quelques textes, ce n’est en aucun cas pour ériger cette lutte en modèle et en faire un exemple à suivre, mais parce que nous pensons que l’échange de ce type d’expérience permet, là où nous luttons, d’enrichir les débats et d’élargir le champ des possibles. C’est aussi l’expérience d’autres luttes, qui, ici à Turin, nourrit la lutte en cours, que ce soient celles qui ont précédé et continuent dans ces mêmes quartiers, ou les récits de lutte de compagnon-ne-s d’autres villes ou pays.
Les textes qui suivent sont pour la plupart des traductions de textes écrits sur place. 3 Certains d’entre eux ont été publiés sur le siteMacerie, qui rassemble des récits d’évènements survenus dans les centres de rétention, ainsi que des chroniques et histoires de Turin. Nous en reproduisons d’autres qui sont issus du journal mensuel anarchiste italienInvece. Ces derniers, principalement adressés aux compagnon-ne-s, replacent les évènements en terme de perspectives. Nous regroupons aussi divers tracts diffusés lors des piquets anti-sfratti oude nouvelles occupations et quelques affiches collées dans le quartier. Certains textes, pour finir, ont été écrits à l’occasion de l’élaboration de cette brochure en septembre 2012. Ils sont présentés ici dans l’ordre chronologique du déroulement de la lutte, à l’exception des deux derniers qui présentent des aspects plus théoriques et de perspectives.
3 www.autistici.org/macerie/
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BRÈVE CHRONOLOGIE D’UNE LUTTE EN COURS ans le quartier depuis quelques années, l’agitation autour des rafles et des centres D de rétention et la présence régulière des compagnon-ne-s dans la rue en situation concrète de résistance à la police permet de fréquentes rencontres.
À la fin des années 2000, des centres sociaux inondent la ville de tracts et d’autocollants invitant qui est soussfrattopasser à la permanence légale, proposant avocats, à négociations et moyens de pression pour repousser la date de l’expulsion et obtenir des logements sociaux.
La résistance qui se met en place à Porta Palazzo puis à Barriera di Milano en prend le contrepied. Pas de support juridique, pas de demande de relogement, et pas de prise en charge du problème par une tierce personne. La proposition est de résister ensemble : sfrattandi, ami-e-s et solidaires.
Une rencontre d’abord, en janvier 2011, avec une famille qui souhaite résister à son expulsion tout près de la place du marché de Porta Palazzo. Mais cette fois, tout ne se passe pas aussi simplement que prévu : lesfrattandoest devant l’immeuble avec des ami-e-s et des solidaires. Alors l’huissier se voit contraint à renvoyer lesfrattoà une autre date.
Les banderoles et diffusion de tracts, qui accompagnent les personnes venues empêcher physiquement l’huissier d’entrer dans l’immeuble lors des piquets anti-sfratto, rendent visibles la situation, le bouche à oreille surtout fait son effet. Au fur et à mesure, de plus en plus de personnes soussfrattose rencontrent. Elles commencent, fin 2011, à se réunir une fois par mois autour d’un repas pour discuter.
Suite à l’expulsion d’un immeuble occupé Corso Giulio Cesare au mois de novembre de la même année, nouvelle rencontre fortuite : des compagnon-ne-s se joignent aux expulsés, et le 1er décembre illes occupent l’immeuble de Via Lanino. Au repas anti-sfratti, l’idée fait son chemin : il devient possible et envisageable pour beaucoup d’occuper à leur tour. Le 8 mars 2012, alors que les piquets anti-sfrattise multiplient, la famille qui résistait depuis un an et quatre mois est expulsée. Cette fois, il n’aura pas suffi d’un huissier et d’un serrurier : il n’y a pas moins d’une centaine de flics ce matin-là qui boucle le quartier. Une petite manif aux alentours rend encore plus visible la présence des flics et en explicite la raison.
À peine une semaine plus tard, le 16 mars, cette même famille, quelques compagnon-ne-s et d’autressfrattandila maison de Corso Novara. Cette occupation occupent est l’occasion de nombreuses rencontres et apporte un nouveau souffle à la lutte qui est désormais concrétisée par un lieu. Dès lors, c’est un dimanche sur deux qu’on s’y retrouve en assemblée pour résister auxsfratti. -8-
Dans le même temps, la lutte prend un autre tournant quand les différentes personnes soussfrattocommencent à venir toujours plus nombreuses aux piquets les unes des autres. C’est dans le courant du mois d’avril que les flics dévoilent une nouvelle stratégie : concentrer tous lessfrattinous résistons sur une seule et même date. C’est auxquels ainsi que cinq piquets se sont tenus le 19 juin, et bien qu’il n’y ait eu aucune expulsion, quelques jours après, le 22 juin, était occupé l’immeuble de Via Soana. Cette fois sans compagnon-ne-s, mais par des personnes agrégées autour de la dynamique d’occupation. Puis encore des «dates uniques», toujours le troisième mardi du mois, avec quatre piquets le 17 juillet et neuf le 18 septembre 2012. D’autres sont à venir.
La procédure judiciaire du sfratto
Turin est la ville d’Italie qui concentre le plus de sfratti à l’année. La préfecture parle de 3285 sfratti sur l’année 2011, et déjà 1800 sur les six premiers mois de l’année 2012. Les raisons qui amènent à se retrouver sous le coup d’un sfratto peuvent être multiples. Le premier cas est évidemment celui de ne plus payer le loyer. Il peut aussi s’agir d’une cessation de paiement de prêt, auquel cas, c’est la banque qui réclame le sfratto. D’autres fois, il s’agit plus simplement d’un non renouvellement de bail par le propriétaire ou de la vente du logement. La plainte est examinée par un tribunal civil, audience à laquelle est convié le locataire ou futur sfrattando par un recommandé. Assisté d’un avocat, il pourrait obtenir un premier délai, mais bien rares sont les cas où ce recours est exploité. Le plus souvent, le sfrattando reçoit quelques jours après l’audience un simple courrier l’informant du prochain passage de l’huissier, qui n’aura pour cette fois qu’une valeur formelle et n’équivaut que très rarement à une expulsion effective, débouchant sur une prochaine date. Le deuxième passage de l’huissier est exécutif. Il est alors précisé que celui-ci pourra avoir recours à la force publique, il est accompagné d’un serrurier et la présence du propriétaire est nécessaire. S’il rencontre une résistance, l’huissier renvoie indéfiniment jusqu’à l’exécution du sfratto avec finalement une intervention massives des flics. Après l’exécution du sfratto, le propriétaire a l’obligation de se tenir à disposition du sfrattato pendant une certaine période, durant laquelle il doit lui ouvrir la porte pour lui permettre de récupérer ses affaires. -9-
UNE ASSEMBLÉE POUR S’AUTO-ORGANISER
’ assemblée de la lutte anti-sfrattia lieu un dimanche sur deux dans une des maisons L occupées. On se retrouve à 15h, discute un moment avec untel du dernier piquet ou avec telle autre des avancées de recherche de maison pour une nouvelle occupation. Ce moment d’informalité est le signe d’une des caractéristiques de l’assemblée, en ce qu’elle est basée sur un réseau de connaissances. À 16h, l’assemblée commence. Dans la salle, nous sommes parfois une quarantaine, d’autres fois jusque quatre-vingts. Les interventions sont traduites en arabe ou en italien. On parle rapidement des dates dessfrattiqui ne sont pas concentrés sur un même jour, les adresses des piquets, le nombre de passages de l’huissier, qui peut y aller. Puis, on réfléchit à comment s’organiser contre la stratégie de la “ date unique ” des flics, ou bien à l’organisation de la prochaine occupation. Quand c’est nécessaire, on rediscute d’évènements passés : pourquoi on n’ira plus résister chez untel depuis qu’on a découvert qu’alors même qu’il ne payait plus son loyer, il sous-louait une pièce à quelqu’un d’autre. Comment se fait-il que tout le monde ne soit pas venu à l’heure à telsfrattoquand l’horaire avait été discuté ensemble. Quelles sont les différentes situations dans les maisons occupées : déroulement des travaux, passage d’un logement individuel à la vie collective, division des espaces et assemblées, afin d’en tirer des conclusions pour que la prochaine occupation se passe mieux encore. Le passage des repas anti-sfrattià l’assemblée, fait à l’occasion de l’ouverture de la maison de Corso Novara, a permis plusieurs avancées dans la lutte. Il aurait été facile sans cela que nous, compagnon-ne-s, devenions les secrétaires de la lutte, envoyant les messages conviant aux piquets, apportant tracts et banderoles et organisant les différents rendez-vous au sein de nos propres assemblées. En outre, cela a permis de passer d’un réseau de contacts aux mains de peu de compagnon-ne-s, parce que plus connu-e-s dans le quartier, à une possibilité de rencontre plus large, toujours informelle, où l’organisation est partagée. Ce n’est qu’à partir de ce moment là que certains problèmes – continuer de résister ausfrattod’une personne qui ne vient jamais à l’assemblée, par exemple — , mais aussi certaines situations, comme celle de la stratégie de la “ date unique ” des flics, ont pu être affrontés par l’ensemble des participant-e-s à la lutte. Si le problème de la langue nécessite un effort, une fois surmonté, se dévoile le fait que beaucoup de personnes participant à l’assemblée n’en ont souvent jamais fait avant, et sont dans l’attente de la parole des compagnon-ne-s qu’elles ont tendance à considérer comme spécialistes. Ceci est un écueil difficile mais nécessaire à dépasser dans le but de tendre à l’autonomie de l’assemblée. -10-
En un peu plus de six mois d’existence, l’assemblée a tout de même connu de notables évolutions. La stratégie de la “ date unique ” les a probablement accélérées. Aujourd’hui, des propositions plus offensives qu’il y a six mois nous n’aurions pas pensées possibles de faire à l’assemblée sont désormais portées par toutes et tous.
Basta sfratti! Reprenons les maisons. 8 mars 2012 manifestation lors de l’expulsion de la famille qui a résisté un an et quatre mois.
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