Discours de N. VALLAUD-BELKACEM à l Assemblée nationale
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Discours de N. VALLAUD-BELKACEM à l'Assemblée nationale

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Examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel Assemblée nationale 29 novembre 2013 Najat Vallaud-Belkacem Ministre des droits des femmes Porte-parole du gouvernement Monsieur le Président, Monsieur le Président de la Commission spéciale, Madame la Rapporteure, Mesdames et messieurs les Députés, Avant qu’un client puisse acheter une prestation sexuelle, quelque part dans l’une de nos rues ou à la lisière de nos bois, il y a des femmes et parfois des hommes qui sont vendus et achetés, échangés, séquestrés, violés et torturés, trompés, rackettés, spoliés, soumises aux pires aux chantages ainsi que leurs familles et leurs enfants, exportées et importées comme n’importe quelle marchandise, animal ou denrée périssable. Ensuite, seulement, leur vie de prostitués peut commencer : n’oublions pas, n’oubliez pas avant de les considérer comme des prostituées, qui sont ces êtres humains. Et si vous manquiez de force pour imaginer ces derniers, pensez seulement à ces jeunes femmes africaines dont le réseau de proxénétisme nigérian a été démantelé hier soir en Espagne, des jeunes femmes dont les enfants de 3 ans avaient été séquestrés attachés aux pieds d’un lit depuis plus de 2 ans, pour obliger leurs mères à se prostituer, d’abord vendue au Maroc avant d’être exploitées en Europe, en France. Pourquoi tant de violence ?

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Publié le 29 novembre 2013
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Langue Français

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Examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel
Assemblée nationale
29 novembre 2013 Najat Vallaud-Belkacem Ministre des droits des femmes Porte-parole du gouvernement
Monsieur le Président,Monsieur le Président de la Commission spéciale,
Madame la Rapporteure,
Mesdames et messieurs les Députés,
Avantqu’ unclient puisse acheter une prestation sexuelle, quelque part dansl’ unede nos rues ou à la lisière de nos bois, il y a des femmes et parfois des hommes qui sont vendus et achetés, échangés, séquestrés, violés et torturés, trompés, rackettés, spoliés, soumises aux pires aux chantages ainsi que leurs familles et leurs enfants, exportées et importées commen’ importequelle marchandise, animal ou denrée périssable.
Ensuite, seulement, leur vie de prostitués peut commencer :n’ oublionspas,n’ oubliezpas avant de
les considérer comme des prostituées, qui sont ces êtres humains.
Et si vous manquiez de force pour imaginer ces derniers, pensez seulement à ces jeunes femmes
africaines dont le réseau de proxénétisme nigérian a été démantelé hier soir en Espagne, des jeunes
femmes dont les enfants de 3 ans avaient été séquestrés attachés aux piedsd’ unlit depuis plus de 2
ans, pour obliger leurs mères à se prostituer,d’ abord au Maroc avant vendued’être exploitées en Europe, en France.
Pourquoi tant de violence ? Précisément parce que si la prostitution pouvait être exercée sans
répugnance et sans souffrance, il serait moins nécessaired’ utiliserde tels moyens.
Que les visages, les corps, et les destins de ces victimes à jamais abîmées ne vous quittent pas : elles
sontl’ essentielde la prostitutionaujourd’ hui, elles sontl’ essentieldu système prostitutionnel.
 
 
Un système qui brasse 40 milliards de dollars chaque année, qui enrichitd’ abordceux qui vivent de
la traite, du crime, du trafic de drogue.
Un système quin’ existeraitpas, si àl’ autre bout de la chaine, iln’ yavait pasquelqu’ unpour accepter
et pour payer.
Pourquoi payer le corpsd’ une femme ?J’ entends les arguments quis’ expriment plusieurs depuis
jours de la façon la plus décomplexée.C’ estd’ ailleurs,un moment de révélation pour notrece débat, société. Un moment, avec aucur de ce débat, les travaux du Parlement. Un moment de démocratie aussi.
Pourquoi payer le corpsd’ uneque cela a toujours été comme ça, disent certains. Lesfemme ? Parce
femmess’ achtent, ce serait une loi cachée du monde. Il y aurait dans notre planète une loi de
gravité qui ramènerait systématiquement les femmes en dessous des hommes. Quelle chose
curieuse et quelle paresse que des’ arrterlà. Jen’ osecroire que, parmi vous, vous qui faites les lois
et qui en suivez jour après jour, mois après mois, les effets de ces lois, vous puissiez être atteints par
cette idée.
«La doctrine de fatalitéqu’onnous oppose ».disait Jaurès «Je crois pouvoir direqu’elleest contraire à ce quel’humanit,depuis deux mille ans, a pensé de plus haut et a rêvé de plus noble». «De quel
droit » continuait-il, « De quel droit une société qui, par égoïsme, par inertie, par complaisance pour
les jouissances faciles de quelques-uns,n’atari aucune des sources du crimequ’ildépendaitd’ellede
tarir, nil’alcoolisme,ni le vagabondage, ni le chômage, ni la prostitution, de quel droit cette société
vient-elle frapper ensuite, en la personne de quelques individus misérables, le crime même dont elle
n’apas surveillé les origines ?»
Cen’ est la fatalité qui fait les lois. pasC’ est les parlementaires. vousC’ est à vous Mesdames et
Messieurs les députésqu’ il revientd’ viter que la liberté opprime, et de veiller à affranchir le faible.C’ est vous qui avez décidé,c’ tait àl’ poque du général De Gaulle, de la position abolitionniste de la France en matière de prostitution.D’ aborden ratifiant la convention de 1949 sur
l’ exploitation la prostitution deFaut-il en rappeler les termes ici «la prostitution et le mal qui
l’accompagne, savoir àl’exploitation de la personne humaine en vue de la prostitution, sont
incompatibles avec la dignité et la valeur de la personne humaine.» ? -. Ensuite en renouvelant cet
engagement avec la résolution que vous avez adoptée àl’ unanimiten décembre 2011. Ce sont les
députés qui ont adopté en 1946 la loi Marthe Richard et fermé les maisons closes.C’ est votre
 
 
Parlement qui a réformé le code pénal pour en faire sortir la notion de débauche et renforcer encore
la lutte contre le proxénétisme. Mesdames et Messieurs,le mot fatalitén’ a droit de cité dans pas
votre hémicycle.
Pourquoi admettre quel’ on paie le corpsd’ une ? femme Combien de fois ai-je entendu parler des « besoins irrépressibles » des hommes. « Besoins irrépressibles » cette expression est terrible, insupportable, scandaleuse.Elle revient commel’ ultime justification de la demande de certains hommesd’ uneperpétuation du droit de cuissage.Il nes’ agitde riend’ autre.Comment y répondre autrementqu’ avecdes mots simples ? Nous ne sommes pas des bêtes. Nous valons mieux quel’ tat
de nature. Nous devons faire confiance àl’ humanité qui est en tout homme et en toute femme.C’ est
la noblesse même de votre fonction, Mesdames et Messieurs les députés, que de faire ce pari.
Les besoins irrépressibles. Cela me rappelle le rapportd’ Alexandre Parent-Duchâtelet,l’ un des
médecins qui fut parmi les premiers à soutenir des positions réglementaristes et qui assimilait les personnes prostituées à un «réseaud’gouts ou une «vidange organique».L’ und’ entrevous les a » récemment comparées au «sel, au sucre et au gras». Al’ ore de nos travaux sur ce texte, je
voudrais vous exhorter au débat le plus digne, le plus respectueux.
Pourquoi admettre quel’ on le corps paied’ uneParce que le client est parfois en  femme ? souffrance, souffrance sexuelle, sentimentale, affective. Je ne le nie pas que cela existe. Je constate
chaque jour la grande détresse dans laquelle sont certains de nos concitoyens. Les violences faites
aux femmes ont presque toujours pour origine cette détresse de la part des auteurs. Mais la détresse
del’ un ne se soigne pas parl’ exploitation la détresse de del’ autre. Ellen’ est une jamais
justificationDepuis quand notre pays admettrait-il que la liberté aille au-delà de ce qui ne nuit pas
à autrui ? Depuis quand privilégierions une souffrance par rapport à une autre ? Depuis quand le
corps humain devrait-il être assimilé à un médicament ? Depuis quand se soignerait on aux dépens
d’ uneautre personne ?
Au fond, lecurde ma conviction est là : on ne peut vendre son corps à un autre, pour le soind’ unautre, sans en être soi-même affecté.La dissociation entre le corps et la personne est une chimère.
Quand elle se répète, elle crée un sentimentd’ irralit,d’ tranget soi-même, àd’ indiffrence et
d’ insensibilit. seulement que la prévalence des troubles psycho-traumatiques sévères Savez-vous
est équivalente chez les prostituées à celle quel’ ontrouve parmi les personnes victimes de tortures
ou les prisonniers politiques ?«De nos maladies, la plus sauvage est de mépriser notre être» disait
Montaigne.Notre loi ne doit jamais dissocier les droits sur le corps et les droits de la personne.Ne
 
 
plus permettre cette dissociation, voilà la vraie clé pour améliorer durablement la santé des
personnes prostituées.
Mesdames et messieurs les députés, les femmes ont chèrement conquis le droit à la libre
disposition de leur corps. Ce droit est essentiel etc’ tait sûr un droit sexuel. Un droit que je bien soutiens pleinement, vous le savez. Etc’ estprécisément parce que je le soutiens sans faille que je ne reconnais pas le droit à disposer du corpsd’ autrui, que je réfute de toutes mes forces cette vision archaïque selon laquelle le corps des femmes serait un corps disponible. Je ne veux pasd’ une
société dans laquelle le sexe serait un service fourni à des voitures qui défilent comme des
hamburgers à partird’ un menu qui détaille avec des noms de fleurs des prestations dans lequel il
faudrait piocher. Je ne veux pasd’ une où les femmes ont  sociétéun prix. Je ne veux pasd’ une
société où les femmes fontl’ objet,c’ estle cas dans quelques pays,d’ uneristourne pour les clients
séniors,d’ une pour les titulaires de minima sociaux, autred’ une ristourne, pour ceux qui autre
viennent à vélo. Jen’ enveux pas.
Pouvez-vousl’ admettre, vous, cette assemblée qui avez décidé àl’ unanimit de faire un principe
intangible de la règle selon laquelle« Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent fairel’objetd’un droit patrimonialVoici ce qui est écrit àl’ articledu code civil et qui fait parti désormais de notre 16 
Constitution.
Pourquoi payer le corpsd’ une Parce femme ?qu’ elles y consentiraient... Voicil’ argument le plus
récurrent, le plus facile, le plus choquant, le plus paresseux, le plus inopérant qui puisse être avancé
pour justifierl’ achatde service sexuel. Jamais votre Parlementn’ aconsidéréqu’ onpouvait consentir
à mettre son corps dans le commerce.
Le sujet avec la prostitution, cen’ estpas la sexualité.Qu’ ellese dérouled’ unefaçon oud’ uneautre, qu’ ellesoit libérée ou pudibonde.Nous ne sommes pas là pour faire la police desmurs.Mais nous sommes là pour donner corps à nos principes les plus essentiels.
Le sujet avec la prostitution,c’ estl’ argent.C’ estl’ argent qui détermine la volonté des parties et
c’ estce même argent qui nourrit justement le proxénétisme.Dans la prostitution, le consentement
àl’ actelequel ceux qui ont de quoi payer ont droit à la soumissionsexuel est un consentement dans
de ceux quin’ ontd’ autreà canon » pour les hommes. « Chair à prostitution » pour leschoix. « Chair
 
 
femmes, comme le disait le journal Le Populaire au début du siècle.... Quand la domination de
l’ argents’ ajouteà la domination masculine,l’ emprisedevient insupportable.
*****
Mesdames et messieurs les députés,autrefois, pour évoquer les personnes prostituées, on parlait de « filles de noce », de « filles de joie », de « filles publiques » ou encore «d’ enjleuses», par pudeur pour une réalité qui avait envahi tout le corps social.Aujourd’ huion parle des nigérianes,
des chinoises ou des jeunes femmes roumaines, bulgares, ou moldaves.On désigne les prostituées
selon leur nationalité.La prostitution a changé de visage et, avec elle, les mots ont décrit une
réalité toujours plus crue :on parle depute, pourquoi ne pas dire tout simplement, puisquec’ est
un mot qui a envahi notre vocabulaire !
Pute, vousm’ excuserezdel’ introduiredans votre hémicycle, maisc’ estle motd’ uneréalité. Il nous
rappelle des choses intéressantes. Il nous rappellequ’au commencement des violences faites aux
femmes, il y a souventl’ insulte, avec sa charge haineuse. Pute, ce mot est devenu un mot valise dans lequel se déversel’ oppressionordinaire des femmes. Une insulte que les enfantss’ envoientà la figure dans la cour de récré, sans même en connaître le sens. Une simple insulte qui peut être lancée,
comme par « réflexe », au détourd’ une phrase, et quel’ on au coin entendd’ une à la fenêtre rue,
d’ une insulte que les hommes violents utilisent toujours comme une arme pour voiture. Une
humilier leur victime.« pute » soit partout alors que la prostitution,Curieux paradoxe que le mot
elle, se cache.
A cette tribune, à ces femmes, parfois à ces hommes queje pensel’ onréduit à leur condition de
pute alorsqu’ ils sontd’ abord femmes et des hommes des. Je veux leur direqu’ elles etqu’ils ont
une place dans notre société, comme citoyenne et comme citoyen, une place égale à celle de tous les
autres. Je veux leur reconnaître le droit à être autre chose que des marchandises.
Oui il est légitime de prendre quelques heures de votre agenda, qui leur a été si rarement consacré, pour ces êtres qui souffrent et qui se trouvent emprisonnés dans des vies de misère et de
violences.Une prostituéem’ adit un jour «vous savezcen’estpas un métier quel’onquitte un soir en
claquant la porte». Une autre est venue me voir un jour, elle était même accompagnée de militants
qui ne partageaient pas mon point de vue. Nous avons discuté et ellem’ aparlé de sa fille, une fille
pour qui elle voulait le mieux, une fille pour qui elle donnait sa vie et son corps. Lorsque je lui ai
demandé si elle envisageait que sa fille se prostitue elle-aussi, sa réponse fut immédiate. «Non, je
 
 
fais justement ça pourqu’ellen’ait à se prostituer elle aussi pas Et. »c’ est le sens de cette tout
proposition de loi : offrir des alternatives et préparerl’ avenir.
A ces femmes et ces hommes, nous devonsdiscours clair et digne. A ces femmes queun l’ on
relègue loin de nos centres villes, loin de notre vue, devons au contraire la protection, nous nous
devons des alternatives crédibles.A ces femmes nous devons la cohérence entre nos discours et nos actes. ces femmes, nous nous devons Ad’ tre à la hauteur de la position abolitionniste de la France, dans les faits pas simplement dans les textes.
Nous devons faire bloc.
C’ estdans un esprit de rassemblementqu’ aété préparé ce texte et ce rassemblement en fait tout le
prix. Je voudrais saluer le travail remarquable et opiniâtrequ’ aaccompli Guy GEOFFROY avec Danièle
BOUSQUET sur ce texte depuis 2011. travail a permis de libérer la parole. Il avait permis Ce
d’ auditionnerde donner évidemment la parole aux prostituées elles- de 200 personnes et  plus
mêmes. Ce travail était la clé de tout. Il a montré le visage de la prostitution. Ses nouveaux défis.
Monsieur le député Guy GEOFFROY, je dois vous le dire de la façon la plus simple à cette assemblée, j’ aiune grande admiration pour le travail que vous avez accompli.
Ce travail, il a montré clairement le cheminqu’ ilparcourir. La proposition de loi que nous reste à
nous examinons ce jour en découle naturellement. Elle se situe dans notre tradition humaniste, un
humanisme assumé et responsable,qui ne se contente pas, pour reprendre les mots de Gambetta,
de constater des égaux, mais cherche à en faire.
Je veux saluerl’ implication du groupe socialiste dans ce texte. Merci à Maud OLIVIER et meri à
Catherine COUTELLEpour la force de conviction, pourl’ espritd’ coute et le même souci du
rassemblement que celui qui avait présidé à la missiond’ information 2011. Je veux saluer et de remercier Bruno LEROUX, premier signataire, pour son implication exemplaire à leurs côtés.
*******************
Souvent, les voix quis’ expriment assez éloignées des réalités du terrain, assez éloignées des sont
victimes elles-mêmes. Parfois, malgré tout, les personnes prostituées et celles quil’ ont été ont
l’ occasiondes’ exprimer.Ce sont ces témoignages qui me paraissent les plus importants,qu’ ilssoient
apportés par des partisans del’ abolitionou par des personnesqu’ ilfaut convaincre. Ensemble, vous
 
 
avez construit cette proposition de loi à partir de ces témoignages, de ces expériences, de ces
contacts. Je crois quec’ estce qui donne autant de valeur à ce texte.
Monsieur le président de la commission spéciale, Madame la rapporteure, Madame la présidente
de la délégation aux droits des femmes, votre trio a montré que toutes les forces de la République
étaient capables de se retrouver autour de cet humanisme assumé. Je veux saluer à cet égard le travail del’ ensemble des membres de la commission et la contribution de tous les groupes parlementaires qui ont décidé de surmonter les clivages partisans.C’ est suffisamment rare pour le
souligner.
A cette tribune, souvenons-nous aussi que le combat pourl’ abolitionde la prostitution est jalonné
de promesses non tenues et de rendez-vous manqués. Un premier rendez-vous manqué fut la
commissiond’ enqute organisée par Victor parlementaireSchlcher en 1879. Aprèsl’ abolition de
l’ esclavage, à la fin de sa vie, VictorSchlcheret Victor Hugo avaient lancé le combat pourl’ abolition
de la prostitution.C’ est pour cela que nous tenons tellement à ce mot : abolition. La Préfecture de
police, àl’ poque, que son travail empêchan’ aboutisse et il fallut attendre 70 ans pour que le
combat reprenne.
Un autre se présenta sous le Front Populaire. En 1936. Henri Seillier, le Ministre de la Santé, avait alors reçu le soutien actif de Léon Blum pour déposer un projet de loi abolitionniste. Ce texte mettait
fin aux maisons closes et prévoyait la créationd’ undélit de contamination pour les clients atteints de
maladies vénériennes. Mais certains députés, quel’ amicale maîtres et maîtresses desd’ htel
meublés de France avait mobilisés,s’ y sans autre motif que les maisons de tolérance opposèrent
«subsisteront autant quel’humanit ». Cen’ est pas la fatalité qui emporta ce texte, mais plutôt
l’ Histoire,qui ne permit pas au front populaired’ acheverson programme pour notre pays.
En 1976, ce fut Simone Veil et Françoise Giroud qui tentèrent en vain de reprendre le fil
abolitionniste de la République. Le 2 juin 1975, une centaine de prostituées lyonnaises avaient
occupél’ EgliseSaint Nizier. Ces femmes demandaient déjàl’ abrogationdu délit de racolage. Simone Veil avait demandé au magistrat Guy Pinot, celui que les médias appelaient «Monsieur Prostitution», de préparer un rapport, qui confirma la nécessité de cette abrogation. Quelques mois
plus tard, le conseil des ministres décidaqu’ aucune suite ne serait donnée aux propositions de
Monsieur prostitution.
 
 
Nous ne pouvons pas nous permettre un nouveau rendez-vous manqué.Nous ne pouvons pas nous
permettred’ attendreque le débat revienne. Il y a au moins 20 000 femmes etencore un demi-siècle
hommes sur notre territoire qui ne veulent plus être des coupables, qui ont besoin des soutiens
prévus par ce texte, du parcours de sortie de la prostitution, des moyens du fondsd’ insertionet qui
souhaitent avoirl’ assuranceque leurs enfants vivront dans une société àl’ abride la prostitution.
Rien ne nous autorise à attendre plus longtemps.Le rapport quel’ InspectionGénérale des Affaires Socialesm’ a en décembre dernier met en évidence un accroissement très rapide des risques remis sanitaires, des risques infectieux, mais aussi des traumatismes subis par les prostitués.D’ aprs le
rapport du Conseil national du sida, entre 10% et 50% des clients demanderaient des rapports non
protégés. Une étude canadienne a établi que les personnes prostituées ont entre 60 et 120 fois plus
de risques d'être battues ou assassinées que le reste de la population. Enfin, d’ aprs étude une
américaine, letaux de mortalité est deux fois plus élevé chez les femmes se prostituant dans la rue
que chez les femmesd’ ge comparable.La prostitution, mesdames et messieurs les députés,
n’ ayezpas de doutes à ce sujet, la prostitution est en elle-même un drame sanitaire.
Nombred’ associations savent bien. leSi la loi que vous proposezaujourd’ hui adoptée, les est personnes en situation de prostitution pourront bien plus que par le passé être protégées, poser leurs conditions, dénoncer les agressions.
*************
Les pouvoirs publics ont longtemps été piégés dans leurs hésitations et dans leurs contradictions.
Aujourd’ huinousn’ avonspasd’ hsitation.Nous sommes portés par une conviction.
La conviction que lutter contre la traite, la prostitution,c’ estd’ abordprotéger les victimes plutôt que les poursuivre, leur offrir des moyens véritablesd’ en sortir.C’ estévidemment faire la chasse aux réseaux, toujours plus. Maisc’ est aussi responsabiliser chacun des acteurs du système prostitutionnel, y compris les clients.
Toutes les autres politiques, car la question des autres politiques pourrait se poser, mais toutes les
autres politiques ne marchent pas. Les pays ont fait le choix des maisons closes ont fait le choix de la
traite. Ils reconnaissent leurs difficultés.
 
 
Savez-vous que les Pays-Bas font partie de la liste établie parl’ Office nations Unies contre les des
drogues et le crime les lieux de destination privilégiés de la traite ? Un projet de loi-cadre sur la
prostitution est en préparation dans ce pays prévoit la créationd’ unepeine à destination des clients
de la traite. Savez-vous que en Allemagne (où vous le savez, on a aussi ré-ouvert les maisons closes
et où le nombre de personnes prostituées del’ ordre de 400.000 et où le nombre de personnes
prostituées déclarées et donc « protégées » est de 42), en Allemagne donc,l’ accorddecoalition du gouvernement allemand signé ce mercredi qui prévoit notamment un salaire minimum, prévoit aussi une révision en profondeur de la législation allemande sur la prostitution ?Oui, tous ces pays
reconnaissent leurs difficultés. Et à contrario, notre pays à nous, grâce à notre politique
abolitionniste que nous vous proposonsd’ approfondiraujourd’ hui, vu par les réseaux de traite est
comme un pays qui refuse la prostitution.
Ces réseaux, ils nous regardent.Ils suivent ce que nous faisonsla plus grande attention nous leavec
savons. Ils guettent les failles de notre législation. Ils se sont nourris des failles de notre législation,
ces dernières années, avec desorganisations criminelles transnationales étrangères se sont qui
spécialisées dans la traite des êtres humains. Elles ont largement pris la place des « traditionnelles »
comme elles les appellent elles-mêmes. Ces mafias recrutent les victimes dans leur paysd’ origine,et
les conduisent là où ellesn’ ont aucune attache, où elles ne parlent pas la langue du pays, où elles vivent le sans titre de séjour. Et elles doivent rembourser aux criminels le coût très élevé de leur migration.
Ces réseaux, ils ne comprennentqu’ un messagecelui de la fermeté. Et à  cette tribune, je dis
aujourd’ huiles choses en toute clarté. La Francen’ estpas un paysd’ accueilde la prostitution. Nos
portes doivent et resteront fermées au vent mauvais des trafics.
C’ esttout le sens de votre proposition de loi que des’ adapterà cette nouvelle réalité.Remettre à
l’ endroit un système législatif qui faitaujourd’ hui peser la responsabilité du crime organisé sur les
victimes et se désintéresse de la responsabilité des clients, sans donner à la police et à la justice tous les moyensd’ enquter,d’ arrter,de démanteler les réseaux criminels qui sont lesde condamner et vrais coupables.
Nous adhérons sans réserve à ce changement de perspective: lier indissolublementl’ efficacitet la
fermeté pénale à la protection des victimes à travers la responsabilisation des clients etl’ insertion
sociale des personnes prostituées.
 
 
Votre proposition de loi crée les conditionsd’ undémantèlement efficace des réseaux.Démanteler
les réseauxc’ estd’ abordles victimes de leur emprise. Reconnaître à ce titre, un droit au libérer 
séjour pour les prostituées quis’ engagent dans un parcours de sortie de la prostitution est une
disposition essentielle. Ce parcours permettra un soutien financier etl’annulation des dettes fiscales.
Il créera un moment pour se reconstruire, un moment qui devra durer le tempsqu’ il faudra pour
cela.
Cette proposition de loiconstruit une véritable réponse sociale, sanitaire et professionnelle à la détresse à laquelle sont les prostituées. Nous devonsl’ envisager le point de départ commed’ un
large plan pourl’ inclusionsociale et professionnelle des prostituées,qui puisse leur donner accès à
des mesures de prévention efficaces et à des programmesd’ insertionprofessionnelle adaptés.
Rien ne remplace à cet égard le travail des acteurs de terrainnotamment pour aller vers les
prostitues et mettre en uvre des actions de prvention. Rien ne remplace les associations, du
moment que l’ Etat ne se dsengage pas. Votre proposition raffirme le rle de l’ Etat et l’ organise,
c’ est essentiel.
Russir la sortie de la prostitution implique d’ organiser une prise en charge complexe. L’ Etat ne doit pas ajouter à cette complexité sa propre complexité.Il doit s’ organiser pour assurer lacoordination du soutien public aux initiatives locales ; accompagner, héberger et soigner les
personnes prostituées. Il doit accompagner tous les professionnels, que leur action soit
spcifiquement centre sur la rduction des risques sanitaires, sur le logement ou qu’ elle soit plus
globalement autour des projets de la personne.
La cl pour russir les programmes qui sont prvus  l’ article 3 de votre proposition de loi est de
s’ appuyer sur les besoins des personnes et de construire avec elles les solutions.
Je fais miennes les recommandations de l’ IGASsur lanécessité de consolider et simplifier le
financement des acteurs qui participent  l’ insertion des pstroéuti.seVotre proposition de loi nous invite  organiser ce soutien de faon plus prenne et plus ample  travers la cration d’ un fonds pour la prvention de la prostitution et l’ accompagnement social et professionnel des personnes
prostituées. Comme dj eu l’j’ ai le indiquer, de vous l’ occasion gouvernement appuie cette
proposition et s’ y engage, y compris pour prvoir les crdits budgtaires qui permettront d’ abonder
ce fonds de façon satisfaisante dès le vote de la loi.C’ est un effort ddi de 20 millions d’ euros par
an sur le budget de l’ Etatqui sera dégagé pour soutenir cet accompagnement spécialisé, un meilleur
accès aux droits et des programmes de réduction des risques. Cet effort correspond à 10 fois les
 
 
crdits actuellement consacrs par l’ Etat en soutien aux associations. Cet engagement, nous le
prenons, il ne peut être plus clair.
Les pouvoirs publics, je le disais, ont longtemps été piégés dans leurs contradictions, craignant que l’ accompagnement social des prostitues ne gnre un appel d’ air migratoire.Nous n’ avons pas nous cette hsitation car nous renforons notre politique de fermet  l’ gard des rseaux. Protger les personnes prostituées, développer leur accompagnement, faciliter la sortie de la prostitution, sont
des missions q la contrepartie,ui doivent tre exerces par l’ Etat. Et pour que tout cela soit possible,
c’ est videmment ne plus laisser un millimtre de terrain aux rseaux.
********
Les victimes de la prostitution, comme toutes les victimes de la traite, ce sont les prostituées.La
création en 2003 du délit de racolage passif a conduit, là où il a donné lieu à des poursuites, à des
situations inacceptables.On marchait sur la tête en punissant les victimes.
Nous nous sommes engags  abroger ce texte. C’ est un engagement du Prsident de la République qui sera tenu.
Une abrogation du dlit de racolage s’ impose, par ailleurs, pour mettre notre droit en conformit
avec la directive 2011/36, dont l’ article 8 dicte le principe d’ une absence de poursuite des victimes.
Je suis toutefois sensible au fait que cette abrogation ne doit pas induire une moindre capacité à
lutter contre les proxénètes: nous n et l’ avons bien mesur dans nos dbats,ous veillerons à ce que
cette lutte contre le proxénétisme, au contraire, largement renforcée.
Cette proposition de loi propose, je le disais, un véritable changement de perspective et offre une alternative au délit de racolage : lutter efficacement contre les réseaux, nous devons faire pour jouer la responsabilité tout au long de la chaine. Vousproposez ainsi la cration d’ une contravention
de recours  la prostitution et d’ une nouvelle peine de stages de responsabilisation  destination des
clients pour leur faire prendre conscience de leur rôle dans le système prostitutionnel et pour
prvenir la rcidive. C’ est une rponse qui, je le sais, a t trs longuement murie jusqu’  trouver son
équilibre.Elle correspond  un impratif d’ efficacit dans l’ action de terrain.Il s’ agit de mettre ces
 
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