Comment renouveler le contrat social entre les libanais
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Université Saint-Joseph La Chaire Louis D – Institut de France d’anthropologie interculturelle Le Bureau des étudiants de la Faculté de droit Comment renouveler le contrat social entre les Libanais ( 26 Janvier 2005) Par Walid Joumblatt Le thème de cette intervention – comment renouveler le contrat social entre les Libanais – nécessite l’élaboration de certains points, de certains axes fondamentaux dans cette conjoncture historique pleine de changements. - Sur les responsabilités de la guerre Il est, d’après moi, nécessaire de sortir de l’engrenage des accusations réciproques, tout en reconnaissant nos responsabilités dans le cycle de violence que le pays a connu et, donc, dans les conséquences qui en ont résulté. Mais, en même temps, il faut reconnaître qu’en tant que belligérant nul n’a remporté de victoire, car nul ne peut remporter de victoire sur ses propres compatriotes, ses voisins, ses frères, en détruisant une coexistence millénaire. Non ! Mais aussi, il faut se rappeler que quelque part nous étions des pions sur un échiquier arabe et international beaucoup trop complexe pour empêcher la conflagration. Et la réconciliation entamée après la fin des hostilités a été couronnée par la visite du Patriarche Sfeir à la Montagne en l’an 2001. Et de là s’inscrit ma visite à la maison de Samir Geagea. C’est dans cette même logique qu’a eu lieu le contact officiel avec le Général Aoun à Paris. Mais, d’ores et déjà, il ...

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Université Saint-Joseph
La Chaire Louis D – Institut de France d’anthropologie interculturelle
Le Bureau des étudiants de la Faculté de droit
Comment renouveler le contrat social entre les Libanais
( 26 Janvier 2005)
Par Walid Joumblatt
Le thème de cette intervention – comment renouveler le contrat social entre les
Libanais – nécessite l’élaboration de certains points, de certains axes fondamentaux
dans cette conjoncture historique pleine de changements.
-
Sur les responsabilités de la guerre
Il est, d’après moi, nécessaire de sortir de l’engrenage des accusations réciproques,
tout en reconnaissant nos responsabilités dans le cycle de violence que le pays a
connu et, donc, dans les conséquences qui en ont résulté. Mais, en même temps, il faut
reconnaître qu’en tant que belligérant nul n’a remporté de victoire, car nul ne peut
remporter de victoire sur ses propres compatriotes, ses voisins, ses frères, en
détruisant une coexistence
millénaire. Non ! Mais aussi, il faut se rappeler que
quelque part nous étions des pions sur un échiquier arabe et international beaucoup
trop complexe pour empêcher la conflagration.
Et la réconciliation entamée après la fin des hostilités a été couronnée par la visite du
Patriarche Sfeir à la Montagne en l’an 2001. Et de là s’inscrit ma visite à la maison de
Samir Geagea. C’est dans cette même logique qu’a eu lieu le contact officiel avec le
Général Aoun à Paris.
Mais, d’ores et déjà, il nous faut réadapter nos discours, nos slogans, notre façon de
voir en fonction de la nouvelle situation que nous vivons, sachant que le pouvoir,
appuyé par les Syriens, tente par tous les moyens de relancer la tension
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confessionnelle dans le pays, sans parvenir à un résultat. Dans cette perspective, je
voudrais mettre en garde toutes les formations de l’opposition contre le danger de
revenir aux pratiques antérieures en donnant la priorité aux rivalités partisanes sur
l’unité du front opposant. La prochaine échéance électorale est d’une importance
capitale pour l’avenir du pays. Notre but devrait être de mettre fin par des moyens
démocratiques à la tutelle syrienne, de tourner définitivement la page de la guerre, de
jeter les bases d’un Etat de droit, et de relancer le rôle du Liban dans la région.
Dans cette même approche, certains ténors d’une certaine presse prétendent qu’il y
aurait « un axe du mal » entre Druzes, Chrétiens et Sunnites, qui viserait les Chiites.
Je crois que l’accord de Taëf est clair pour ce qui est de la redistribution des pouvoirs,
et que les valeurs universelles de liberté, d’indépendance, de souveraineté, d’Etat de
droit, dépassent les frontières artificielles, confessionnelles ou sectaires.
- Sur le rôle du Liban
Par le fait de maintenir sa formule de coexistence, de diversité, de pluralisme, le
Liban indépendant est un message, un défi, un espoir, oui, un espoir pour les opprimés
du monde arabe, et Dieu sait combien sont nombreux ceux qui misent sur notre
détermination, notre ténacité et notre réussite. Les murs de Berlin dans le monde
arabe doivent tomber.
La force de la raison, de la parole, de la vérité finira par l’emporter sur la logique de la
répression, des prisons, des assassinats et des services de renseignements.
- Sur les relations avec la Syrie
Le Liban ne peut se permettre de se positionner dans un axe régional ou international
anti-syrien. L’expérience douloureuse de l’histoire l’a prouvé. Mais un Liban
satellisé, sous tutelle syrienne, est une aberration.
Comment faire pour imposer la reconnaissance du Grand Liban ? Comment le faire
reconnaître malgré les objections syriennes nationalistes ou baassistes ? Comment
faire pour affirmer que l’arabité en tant que fait culturel et historique diversifié, est un
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destin où chaque chrétien, musulman, juif, kurde ou autre s’est retrouvé à un moment
donné, et que la dimension culturelle de l’arabité ne veut pas dire négation du
pluralisme et acceptation des affirmations nationalistes inspirées d’idéologies fascistes
qui datent du début du siècle passé, et qui sont à jamais révolues. Comment faire pour
établir un consensus des peuples arabes sur le concept du respect de la différence, ou
des différences, en rattachant les libertés fondamentales à l’arabité ?
Il est nécessaire de sortir de l’engrenage de la peur, de la culture de la peur imposée
par le ‘gauleiter’ de la Békaa, et ses acolytes libanais, et d’entamer des discussion
sérieuses sur les relations libano-syriennes, tant sur le tracé des frontières, dont
Chébaa, que sur la régularisation de la situation de la main d’oeuvre, en passant par
des relations économiques et agricoles équitables, et, à la rigueur, demander des
relations diplomatiques entre les deux Etats pour mettre fin à un slogan annexionniste
qui date des années 1920, disant que Libanais et Syriens sont un seul peuple dans
deux Etats.
Quant à la thèse des parcours concomitants, ou l’unité des parcours, quel verbiage
dangereux ! Et bien, oui aux relations d’Etat à Etat qui respectent les intérêts
stratégiques des deux pays et des deux peuples, mais non à un ancrage indéfini du
Liban à la Syrie, sous prétexte de la poursuite du conflit israélo-arabe.
- Sur l’implantation des Palestiniens au Liban
Chassé de Palestine en 1948, ce peuple réfugié au Liban a été un facteur de prospérité
économique à un moment donné, durant les années 50 et 60, dans les domaines
bancaire, agricole et industriel. Plus tard, avec la montée des revendications de la
gauche libanaise, et après la débâcle de la Résistance palestinienne en Jordanie, les
Palestiniens sont devenus un facteur douloureux dans l’histoire du Liban des années
70 et 80, un axe parmi tant d’axes arabes et internationaux qui nous ont coûté très
cher. Une fois l’autorité palestinienne installée en Palestine, le statut des Palestiniens
au Liban est redevenu comme il était auparavant, c’est-à-dire un statut de réfugiés.
Devant nous se présentent deux choix : le premier étant de maintenir le statut des
camps, comme enclaves de misère et de fanatisme avec leurs armes qui ne servent
plus à rien, à part à alimenter des rixes internes au détriment de la population. Ou bien
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engager des négociations avec les représentants de ce peuple pour échanger les armes
contre un minimum de droits civiques et de garanties sociales, à l’exclusion
évidemment du droit à la nationalité, en attendant la création de l’Etat Palestinien.
Quant à la surenchère stupide soutenant que Lahoud est une garantie contre
l’implantation, et bien, c’est une logique bizarre qui n’a rien à faire avec le droit
international ou même avec la simple réalité.
A partir de là, l’Etat libanais devrait accepter une ambassade palestinienne à Beyrouth
et faciliter la tâche de cette mission pour mettre fin à cette situation et empêcher les
surenchères ou l’utilisation de certains groupuscules à l’intérieure des camps par les
services de renseignements syro-libanais dans des buts de déstabilisation.
*****
Le 16 mars 1977 tombait sous les balles traîtresses Kamal Joumblatt, et avec lui
périssaient des centaines de chrétiens innocents.
A juste titre, André Fontaine décrivait l’évènement comme ‘l’Avenir insulté’.
Et pendant des années, le jour de la commémoration de son décès, je déposais une
fleur, comme tant d’autres, sur sa tombe. Et le temps passant, je me résignais au
destin qui veut que « c’est avec des rêves en morceaux qu’on descend, comme tout le
monde, le fleuve de la vie ».
Aujourd’hui, après 28 ans d’attente, j’ai la conscience tranquille. Finalement, je me
sens libre.
On pardonne, disait Mandela, mais on n’oublie pas.
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