Six mois en enfer , livre ebook

Pierre Goltman
Six mois en enfer
Collection T émoignages de la Shoah

Le Manuscrit


© Éditions Le Manuscrit, 2019
ISBN: 9782304034677
Pierre Goltman




Présentation de la collection « Témoignages de la Shoah » de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah
En lançant sa collection « Témoignages de la Shoah » avec les éditions Le Manuscrit, et grâce aux nouvelles technologies de communication, la Fondation souhaite conserver et transmettre vers un large public la mémoire des victimes et des témoins des années noires des persécutions antisémites, de 1933 à 1945.
Aux nombreux ouvrages déjà parus, la Fondation espère ainsi ajouter les récits de celles et ceux dont les voix sont restées jusqu’ici sans é cho : souvenirs souvent enfouis au plus profond des mémoires individuelles ou familiales, récits parfois écrits mais jamais diffusés, témoignages publiés au sortir de l’enfer des camps, mais disparus depuis trop longtemps des rayons des bibliothèques.
Si quelqu’un seul ne peut décrire l’indicible, la multiplicité des récits peut s’en approcher.
En tout cas, c’est l’objectif que s’assigne cette collection à laquelle la Fondation, grâce à son Comité de lecture composé d’historiens et de témoins, apporte sa caution morale et historique.
Face à une actualité où l’instrumentalisation des conflits divers tend à obscurcir, confondre et banaliser ce que fut la Shoah, cette collection permettra aux lecteurs, chercheurs et étudiants de mesurer la spécificité d’une persécution extrême dont les uns furent acteurs, les autres complices, et face à laquelle certains restèrent indifférents et les autres héroïques.
Puissent ces ouvrages inspirer à leurs lecteurs l’esprit de fraternité, le rejet de l’antisémitisme et de toute autre forme d’exclusion.
Consultez le site Internet de la FMS : www.fondationshoah.org




Comité de lecture de la collection (2011)
Serge Klarsfeld, président
Henri Borlant, survivant de la déportation
Isabelle Choko, survivante de la déportation
Olivier Coquard, historien
Katy Hazan(OSE), historienne
Dominique Missika, historienne
Denis Peschanski, historien
Paul Schaffer, survivant de la déportation
Annette Zaidman, enfant cachée
Philippe Weyl, responsable de la collection
Correction : Laurence Beilvert
Voir les autres titres de la collection en fin de volume .


Biographie de Pierre Goltman
1927 Naissance de Pierre Goltman à Montreuil-sous-Bois (de nos jours en Seine-Saint-Denis) dans la maison de ses grands-parents maternels où sa mère, Irène Joseph de son nom de jeune fille, est également née, le 20 août 1901. Elle a travaillé en qualité de secrétaire sténodactylo jusqu’à son mariage, comme la plupart des femmes de son époque, dans la petite bourgeoisie. Elle s’est ensuite consacrée à sa famille. En 1944, après la Libération, son mari étant absent, elle a dû reprendre ce métier, malgré la solidarité familiale.
Marcel, le père de Pierre, est né à Versailles le 21 mars 1897. Ses sept frères et sœurs sont également nés dans cette ville.
Les parents de Pierre se marièrent en 1925, civilement le 2 mai et le 18 sous la khipe (le dais nuptial en yiddish).
Son père travaillait alors comme ouvrier chez Citroën qu’il quitta peu après pour ouvrir une épicerie, qui ne survivra pas à la crise de 1929. Il devint ensuite représentant de commerce.
(Voir Annexe I : Généalogie de Pierre Goltman, pages 127 à 130)
1931 26 mai : naissance de Michel, petit frère de Pierre.
1933 Pierre commence sa scolarité à l’école primaire de Buc (aujourd’hui dans les Yvelines).
1936 Pierre défile avec ses parents et son grand-père paternel pour célébrer la victoire du Front populaire à Versailles, poings levés.
1938 Octobre : Pierre entre en sixième au lycée Hoche à Versailles. Quelques jours plus tôt, son père a reçu son ordre de mobilisation dans l’armée française lors de la crise des Sudètes, close par les honteux accords de Munich du 30 septembre.
1939 Été : la famille quitte Buc pour Le Chesnay (de nos jours dans les Yvelines).
23 août : signature du pacte de non-agression germano-soviétique.
3 septembre : la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l’Allemagne nazie qui a envahi la Pologne deux jours plus tôt ; c’est le début de la Seconde Guerre mondiale en Europe.
Le père de Pierre est mobilisé. Il contracte la tuberculose sous les drapeaux. Il est réformé, rapidement, pour que sa maladie n’ouvre pas droit à pension. Après divers traitements, à domicile, puis à Rambouillet, il poursuivra sa convalescence dans un sanatorium à Briançon (Hautes-Alpes).
1940 10 mai : fin de la « drôle de guerre », début de la guerre éclair. Les Allemands traversent par surprise la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg afin de contourner la ligne de défense française Maginot et d’envahir la France.
١٠ juin : pour fuir l’avance allemande, la famille Goltman quitte Le Chesnay dans la nuit, emmenée par un oncle, Gabriel Goltman, et son épouse, Renée.
Ils se réfugient à Néris-les-Bains, dans l’Allier, chez une sœur de Marcel Goltman, Georgette, mariée à René Tixier, entrepreneur de transport et propriétaire d’un garage.
22 juin : armistice entre la France et l’Allemagne à Rethondes. Trois cinquièmes de la France sont occupés par les armées nazies.
10 juillet : à Vichy l’Assemblée nationale (députés et sénateurs réunis) vote les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. L’État français remplace la IIIe République. Pétain met en œuvre la « Révolution nationale » (réactionnaire, xénophobe, antisémite et anticommuniste).
30 juillet : la ligne de démarcation sépare la zone dite libre gouvernée à Vichy, au sud, de la zone sous occupation allemande, au nord et à l’ouest.
Début octobre : Pierre entre en quatrième A (latin, grec) au lycée de Montluçon.
3 et 4 octobre : le gouvernement de Vichy publie des lois discriminatoires antijuives ; premier statut des Juifs.
1941 2 juin : second statut des Juifs.
4 août : le petit frère de Pierre, Michel, meurt d’un accident de vélo. Leur mère restera inconsolable.
1942 7 juin : entrée en vigueur de l’obligation du port de l’étoile jaune pour les Juifs de plus de 6 ans en zone occupée.
Pierre doit se rendre à Moulins (Allier) pour passer le concours des bourses. Il est reçu premier du département. En revanche, il a alors si peu conscience du danger qu’en se promenant il franchit la ligne de démarcation.
11 novembre : les armées allemandes envahissent la zone dite libre, après le débarquement allié en Afrique du Nord.
1943 2 février : le général allemand Friedrich Paulus capitule à Stalingrad : première grande défaite militaire des nazis.
1944 Mai : la Milice française, bras armé du gouvernement de Vichy, devient active à Néris. La famille Goltman part se réfugier chez des amis, dans une villa isolée hors du bourg.
22 mai : des résistants attaquent un bureau de tabac. Pierre les rencontre, leur indique un chemin sûr. Un certain Marcel Limoges, au service de la Gestapo, l’apprend et le dénonce.
27 mai : la Gestapo fait irruption dans le garage Tixier, où Pierre et ses parents sont venus prendre quelques affaires. Pierre et son père sont arrêtés et emmenés dans les locaux disciplinaires des casernes de Montluçon, réquisitionnées aux sapeurs-pompiers.
31 mai : ils sont transférés à Moulins, dans la prison de la Malcoiffée. Pierre devait ce jour-là commencer à passer les épreuves du premier bac.
2 juin : ils sont transférés au camp de transit de Drancy (de nos jours en Seine-Saint-Denis).
30 juin : ils sont déportés par le convoi n° 76 à destination du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz (Haute-Silésie, Pologne).
4 juillet : Pierre et son père sont sélectionnés pour le travail forcé à leur arrivée sur la rampe de débarquement du camp d’extermination d’Auschwitz II-Birkenau. Dépouillés de tout, rasés partout, désinfectés, « lavés », Pierre et Marcel sont transférés à pied au camp d’Auschwitz III-Monowitz.
Ils y seront tatoués de leur numéro matricule (A 16664 pour Marcel et A 16665 pour Pierre), sur l’avant-bras gauche.
Les détenus, en très grande majorité juifs, servent de main-d’œuvre au complexe industriel de la Buna de l’IG-Farben.
14 octobre : le père de Pierre est sélectionné pour la chambre à gaz d’Auschwitz II-Birkenau où il est transféré le jour même.
1945 17 et 18 janvier : face à l’avance de l’Armée rouge, les SS évacuent Auschwitz et ses camps satellites. Ils abandonnent à leur sort environ 7 000 Juifs incapables de marcher, dont Pierre (qui pèse moins de 35 kilos). Il est à l’ « infirmerie » de Monowitz, comme Primo Levi. Ils éviteront ainsi sans le savoir « la marche de la mort ».
٢٧ janvier : libération d’Auschwitz par l’armée soviétique qui stationnait à moins de ١٠٠ km du camp depuis le mois d’août ١٩٤٤.
8 et 9 mai : fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe.
12 juillet : sur la route de son rapatriement de Pologne par la Croix-Rouge, Pierre séjourne pendant près de deux mois à l’hôpital d’évacuation militaire (HEM 413) de Reichenau Mainau, au bord du lac de Constance, en Allemagne.
31 juillet : il est à peine conscient de son 18 e anniversaire.
1er septembre : Pierre arrive seul à Paris par le train, à la gare de l’Est.
28 septembre : Pierre passe la première partie du bac à laquelle il est reçu avec la mention « bien ».
Après cet examen, il part pour Combloux, en Haute-Savoie, au chalet des Étudiants, où étaient accueillis les étudiants résistants et déportés. Il y rencontre sa future épouse, Irène Kotomkine, fille d’immigrés russes blancs.
1946 Printemps : Pierre adhère au parti communiste français (PCF), section du XXe-Belleville. En attendant la rentrée universitaire, en tant que chauffeur à l’Agence Fra