L homme de Durango
104 pages
Français

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Description

À Bilbao, durant la nuit, le gardien d’un immeuble en construction est poignardé à mort.


Le lendemain soir, après une enquête sommaire, une reconstitution est organisée.


Alors que les autorités remarquent, contre la palissade, des cartouches de dynamite absentes pendant les premières investigations, un policier venant tout droit de Durango, lui, ne s’intéresse qu’à une conduite intérieure rouge garée non loin, depuis la veille.


Plus étrange encore, le médecin ayant constaté le décès de la victime ne s’est pas présenté et demeure introuvable.


Mais ce dernier mystère va vite être résolu par l’homme de Durango qui découvre, dans la malle de la voiture, le corps sans vie du fameux docteur... et celui de son épouse...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 mai 2023
Nombre de lectures 2
EAN13 9782385011543
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0019€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

COLLECTION
« POLAREKE »

L'HOMME DE DURANGO
Roman policier

par
Paul MAX
I
L'auto rouge
 
Les freins grincèrent.
L'auto s'arrêta en rasant le trottoir.
C'était une conduite intérieure, de fabrication italienne, d'un rouge passé, d'une propreté relative. Un homme en sortit, dès que les phares furent éteints, et s'éloigna rapidement au moment précis où neuf heures du soir sonnaient à l'église de Santiago.
Cela se passait à Bilbao, capitale de la Biscaye, exactement devant le n° 484 de la Gran'Via, vingt heures environ après l'assassinat d'un sereno, le long des palissades du grand building qui grandissait, étage par étage, un peu plus bas, dans la même avenue.
Il y avait foule pour regarder les planches tragiques sur lesquelles le sang du malheureux traçait en taches brunâtres un singulier dessin aux contours géographiques. Et personne ne s'inquiéta de l'auto rouge qui s'était arrêtée en bordure du trottoir.
Un jeune voyou, remarquant son abandon, hésita à voler le bouchon du radiateur. Mais il y avait trop d' alguazils aux environs. Il s'éloigna en sifflant. Dix heures sonnèrent ; la bousculade des curieux se calma un peu et les alguazils purent élargir leur terrain de va-et-vient. L'officier dit à ses hommes :
— Je vais jusqu'au poste de l'Arenal ; s'il se produit quelque incident, avertissez-moi.
Puis en s'éloignant déjà :
— Dites donc à cet automobiliste de garer sa voiture un peu plus loin. On fera une reconstitution du crime, dans la soirée ou dans la nuit. Il nous faut de la place !
Un des agents alla, sans hâte, jusqu'à l'auto rouge et, comme la portière du siège avant n'était pas fermée, il klaxonna à plusieurs reprises. Puis, cela ne donnant aucun résultat, il revint vers ses camarades, en haussant les épaules :
— Un caballero qui est au théâtre ou en galante compagnie, sans doute, fit-il. Il finira bien par avoir assez de l'un ou de l'autre et il rappliquera de lui-même.
La Gran'Via, maintenant, était calme. Pour l'agitation de la rue, c'était l'heure de la trêve du spectacle ; pour les gens casaniers, c'était l'heure de la lecture, du tricot, de la cigarette... ou du sommeil.
De temps à autre, une voiture lourde passait, se dirigeant vers l'Arenal et le centre de la ville ; une autre, plus légère la croisait, filant vers les lointains extérieurs, vers les docks, vers Las Arenas, vers la mer... Et sous le ciel aux teintes de feu, un gros bateau poussif se mit à geindre en reprenant haleine à plusieurs reprises, tandis que le bourdonnement des hauts fourneaux des monts d'Archanda augmentait d'intensité à mesure que les bruits de la vie courante s'apaisaient.
Les alguazils trouvaient le temps long.
— C'est d'un coup de couteau qu'on a tué le sereno ? demanda l'un.
— Oui, répondit l'autre en bâillant, d'un coup de couteau entre les épaules. Tu vois, on distingue très bien la place où le sang a giclé, sur la palissade.
— On voit, en effet... Pauvre type !
— Et un brave homme, avec ça ...Tu le connaissais, n'est-ce pas ?
— Mais oui, Ramon Toriza...
— Lui-même. Il n'aurait pas fait de mal à une mouche, et le jour où il a été nommé sereno, les malandrins du quartier ont dansé de joie.
— Pourquoi diable l'ont-ils tué ? Pour lui prendre son trousseau de clefs et cambrioler quelques appartements ?
— Non : on ne lui a rien pris, ni clefs ni argent. Rien !
— Alors...
— Il paraît que c'est une histoire de femme.
— Jésus-Maria, les femmes, c'est la catastrophe !
Les heures continuèrent à s'égrener dans la belle nuit que les lueurs dansantes des fonderies de fer des environs prenaient d'assaut. Un cri strident de femme qu'on égorge descendit brusquement des montagnes : c'était la façon de protester du petit train de La Gorreta contre son dernier voyage.
Après cela, chose admise par l'usage, la nuit s'installait, la vraie nuit, la nuit espagnole qui commence vers trois heures du matin, par la rentrée chez eux des derniers noctambules et finit à six par le départ des ouvriers vers leur travail.
Il fallait en profiter : à trois heures dix, exactement, tout l'appareil judiciaire, voitures des magistrats, cars de police, camions des techniciens, se trouva sur place et se prépara immédiatement à reconstituer l'ignoble assassinat qui avait coûté la vie au veilleur de nuit.
Le sous-commissaire Perez, du poste de l'Arenal, revint alors à la charge :
— Je vous avais dit, cria-t-il à ses hommes, de faire reculer cette voiture qui va se trouver dans notre chemin.
— C'est que... risqua un policier... le propriétaire n'est pas encore revenu...
L'officier de police se fâcha pour tout de bon :
— C'est inadmissible ! s'exclama-t-il... Voilà un personnage qui dépose sa voiture en bordure du trottoir à... à... Quelle heure était-il donc ?
— À peine un peu plus de neuf heures !
— Et depuis neuf heures, il a abandonné son auto ?
— Il y a parfois des types qui abandonnent leur bagnole pour toute la nuit.
— Mais ce sont généralement des gens qui rentrent tard, qui n'ont plus le temps d'aller conduire leur véhicule jusqu'à leur garage. Ici, ce n'est pas le cas : à neuf heures, tous les garages de Bilbao étaient encore ouverts. En tous cas, s'il s'agit d'un personnage de l'espèce, il nous sera difficile de changer cette voiture de place, car il l'aura, très probablement, verrouillée.
— Non, chef, la portière de droite est ouverte.
— Ouverte ! Ça, c'est renversant ! Il faut que je me rende compte par moi-même de ce que cela signifie.
—  Señor Perez, cria une voix, nous allons commencer la reconstitution.
— Je suis à vous dans une minute, répondit le sous-commissaire.
Il était déjà auprès de l'auto rouge, y était entré et s'asseyait au volant.
— Ça, c'est formidable ! s'écria-t-il : la clef de contact est restée sur le tableau de bord ! Il y a vraiment des gens qui tentent les voleurs !
Mais il ne poursuivit pas ses investigations. Le substitut Pardo, lui-même, absolument surexcité, venait de surgir à ses côtés et, la moitié du corps enfournée dans l'auto, bafouillait :
—  Señor... au lieu... de vous prélasser... sur ces coussins... il faut... il faut que vous veniez tout de suite... On a trouvé une bombe !
— Une bombe ?... Où ça ?
— Contre... contre... non, en dessous... enfin, à la palissade du crime !
L'officier de police ne fit qu'un bond jusqu'à l'endroit indiqué. Le juge d'instruction, deux délégués de la police judiciaire, les alguazils et les experts formaient un groupe ahuri et contemplatif devant un bas de planche scié, en dessous duquel, dans un creux pratiqué à même le trottoir, reposait la « bombe » en question.
Ce n'était pas une bombe, d'ailleurs, mais quelques cartouches de dynamite, comme celles dont on se sert, dans les mines, pour faire sauter quelque roche récalcitrante. Une mèche assez préhistorique en formait le dangereux prolongement et laissait pendre, ainsi qu'une queue de rat, son extrémité carbonisée dans la rigole.
Le sous-commissaire Pérez, qui s'était occupé de l'affaire depuis le début, en resta stupéfait.
— C'est prodigieux, murmura-t-il, je n'ai pas la moindre souvenance d'avoir vu cet engin à cette place !
— Je le pense bien, riposta le juge Echavarry, car je suppose que vous nous auriez fait part d'une pareille découverte.
— Bien entendu !
— Elle clarifie bien des choses, cette découverte. Elle nous révèle, si je puis dire, le mobile du crime : on a voulu faire sauter le bâtiment en construction. Le sereno passait par là, il a surpris les malfaiteurs et ils l'ont tué. Cela explique les circonstances dont ce meurtre est entouré...
— ...et fait singulièrement rebondir l'affaire, coupa le sous-commissaire d'un ton rogue.
Il y eut un silence.
— Croyez-vous qu'il s'agisse d'un attentat carliste ? risqua le jeune substitut.
On le regarda avec pitié, mais personne ne lui répondit.
Perez, dont la mauvaise humeur mijotait, annonça brusquement et même brutalement, en désignant, du bout du pied, les cartouches liées par un brin d'osier :
— Je vais faire enlever ce paquet de bougies !
— Gardez-vous en bien, protesta aussitôt le juge d'instruction. Vous allez, au contraire, faire établir une petite palissade supplémentaire, afin de dissimuler complètement, aux yeux des curieux, ce nouvel aspect de la question. Ensuite, vous me laisserez prendre certaines dispositions que je crois utiles et dont je vous entretiendrai dans les plus brefs délais.
Par-dessus ses lunettes d'écaille, il lança un regard circulaire et également dédaigneux sur le petit substitut et sur les deux frères siamois de la police judiciaire puis, sur le ton de l'affirmation, articula cette question :
— Vous n'y voyez pas d'inconvénients, n'est-ce pas, Messieurs ?
Qui aurait osé répondre : « si ! » et se lancer dans quelque joute oratoire ? Le juge d'instruction Echavarry était connu, à Bilbao, aussi bien par son entêtement que par son orgueilleuse intransigeance. Aller à l'encontre de sa volonté ne pouvait conduire à rien de bon. Le substitut susurra, cependant :
— Alors, on ne fait plus la reconstitution ?
— Il n'en est plus question, répondit le magistrat instructeur. Nous ne nous trouvons plus en présence d'un cas concret, mais d'une tout autre histoire !
Et ces mots, tout en étant péremptoires, ne l'engageaient pas à grand-chose.
Les résultats immédiats de la reconstitution manquée furent un accès de rage dont faillit suffoquer le sous-commissaire Perez et un coup de téléphone par lequel le juge Echavarry appela le centre judiciaire de Durango.
— Le détective Porphyrio-Gil Cendrola y Guimon gravite-t-il toujours dans votre orbite ? demanda-t-il au fonctionnaire endormi qui lui répondait.
— Oui, Señor, c'est-à-dire que, depuis l'affaire Morroyek, il a été mis à pied.
— Diable ! Avec blâme ?
— Non, Señor, avec félicitations, car il a résolu cette énigme de façon à mériter l'admiration universelle. Mais, pour arriver à ce résultat, il dut passer outre aux ordres de ses chefs. Alors, tout en appréciant comme il convient sa remarquable performance, les autorités se sont vues

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