Les Escapades de Fransou et Mona à Salazie
96 pages
Français

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Les Escapades de Fransou et Mona à Salazie , livre ebook

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Description

« Dans la fraîcheur des hauts de l’île Bourbon, Françou et moi avions vu le jour au sein de familles nombreuses. Les couleurs, les senteurs, la beauté de notre cirque aux multiples cascades et rivières ont contribué à la douceur de notre enfance gaie et riche en aventures. Petites filles de Salazie, petites fées de montagnes, voici combien ces moments inoubliables et irremplaçables ont fait des années 1970 les plus belles parmi toutes les autres. »




Illustrations : Anne-Sophie Morin.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 16 novembre 2018
Nombre de lectures 0
EAN13 9782414276318
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0045€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Couverture
Copyright













Cet ouvrage a été composé par Edilivre
175, boulevard Anatole France – 93200 Saint-Denis
Tél. : 01 41 62 14 40 – Fax : 01 41 62 14 50
Mail : client@edilivre.com
www.edilivre.com

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction,
intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique : 978-2-414-27632-5

© Edilivre, 2018
 
 
« Il y a deux choses plus belles que le bonheur : le rêve qu’on en fait et le souvenir qu’on en garde. » Claire Masselet.
Aussi loin que ma mémoire se souvienne je devais avoir quatre ou peut-être cinq ans, je portais une robe rose cousue par ma mère, j’étais pieds nus avec un « ferblanc » dans la main. J’allais préparer ma popote et à la radio France Gall chantait : « Sacré Charlemagne ». C’était un jeudi car les grands n’avaient pas école. J’avais pris une poignée d’herbes, une boite de conserve vide et un mon petit couteau en plastique pour composer ma soupe. C’est là que j’ai pris conscience de ce que c’est la vraie vie, pour manger il faut se bouger et avoir de quoi faire dans son jardin. C’est la aussi que j’ai découvert que j’étais un être a part entière. Le monde, c’était mes parents, mes frères et sœurs, ma tante Adèle et surtout ma cousine. Comme moi, Fransou découvrait son monde à elle aussi car on avait le même âge, sauf qu’elle était toujours perchée sur les côtés de sa mère et ses grandes jambes pendaient dans le vide.
Elle n’aimait pas marcher et me narguait du haut de son perchoir. Des fois, j’aurais voulu que a mère me porte ainsi mais elle l’a toujours refusé. Lorsqu’on a été à l’église de la Délivrance, c’est là que j’ai beaucoup pleuré car il a fallu grimper une côte et j étais fatiguée. J’ai compris par la suite pourquoi ma mère ne pouvait pas le faire comme pour Fransou. Elle a été gravement malade quelques années avant ma naissance et suite à une phlébite, elle avait des problèmes pour se déplacer. Cette révélation m’a beaucoup affectée, je croyais vivre une injustice et c’était loin d’être le cas. Depuis ce jour, je ne lui ai plus demandé de me porter. De cette façon, je fais attention aux faits et aux gestes de tout un chacun avant de me faire une opinion sur quelqu’un. Par pudeur et avec de la retenue, nos proches ne nous disent pas tout, et c’est peut-être dommage.
Mon monde, c’était aussi mon village, ma rivière et surtout mes montagnes. Tous les matins, lorsqu’il faisait beau, je marchais avec les rayons du soleil. La montagne à côté de la maison prenait une jolie couleur dorée et je trouvais cela mystérieux. Suivre le déplacement du soleil, pour moi, cela n’existe que dans les livres. J’ai pu bénéficier de ce privilège et ce fut une découverte sensationnelle : Dieu a vraiment fait des merveilles.
Depuis que je considérais comme un être à part entière, j’ai fait mon petit bonhomme de chemin. Ma passion, c’était d’écouter la radio, de trimbaler un grand chat maigre partout avec moi et, des fois, je lui coupais un peu les moustaches ou je lui maquillais les yeux avec du charbon. Il n’était pas beau mais c’était mon chat et je l’adorais. Par la suite, j’ai failli perdre la vie à cause d’un matou noir qui s’était échappé de mes bras.
J’étais au bord de la route comme d’habitude pour regarder passer les rares voitures de l’époque. Mon chat a sauté et il a filé comme une flèche. Je l’ai rattrapé par la queue et je me suis étalée par terre au beau milieu de la chaussée. Une voiture est arrivée à cet instant et, Dieu merci, elle ne roulait pas vite. C’était une « traction » noire et le chauffeur a freiné en me voyant par terre. Même aujourd’hui, je revis cette scène et je me revois, la tête à cinq centimètres du pneu puant le « cramé ». Je sens encore cette odeur de caoutchouc brulé qui m’obsède. J’ai failli mourir mais au lieu d’être consolée, j’ai eu la plus grande engueulade de ma vie.
Nous avions un voisin qui habitait à quelques virages de la maison. Il était chauffeur de maître et, parfois, il faisait le taxi « marron » avec une traction noire aussi. C’est lui qui m’a emmenée à Saint-André un dimanche matin avec mes parents pour me faire percer les oreilles. Pendant que ma mère me peignait les cheveux en friche à grands coups de « râteau », les graissant avec de la crème « qui fait briller », je pleurais toutes les larmes de mon corps. Était-ce la peur du « piercing » ? La peur de la voiture ? Ou la douleur de mes cheveux arrachés ? Je ne le saurai jamais… À la radio, Henry Salvador chantait « Le lion est mort ce soir ». Papa et maman n’étaient pas trop de deux pour m’accompagner chez le bijoutier. Et d’une ! Voilà un joli trou dans mon oreille. Il était minuscule mais j’avais l’impression d’avoir eu le lobe arraché. Je me suis sauvée en courant dans la rue, hurlant comme la sirène des pompiers. Ils m’ont couru après et, à grands coups de réconfort et un ballon bleu, je me suis résignée à me laisser faire.
J’ai eu mon premier bijou, des « anneaux créoles » qui ont fait le bonheur d’une autre petite fille par la suite mais je n’en parlerai pas. C’est ainsi que j’ai appris qu’il ne faut pas s’attacher aux biens matériels. Au moins, ça a rendu quelqu’un heureux et c’était là l’essentiel.
La découverte de la vie scolaire
Mon entrée en maternelle a été très « folklorique ». En ce temps-là, c’était le frère ou la sœur plus âgée qui accompagnait les petits nouveaux. Ma maîtresse était petite, ronde, brune avec un gros chignon « patate » sur la tête. Elle avait un rouge à lèvres couleur « sang de bœuf » et, surtout, elle portait un tailleur « jaune canari » qui m’avait donné la nausée et, inutile de le dire, la nounou, une vieille fille sans âge, avait du travail en perspective… J’étais en pleurs et ma petite voisine de table me tenait la main et me consolait. Je portais une petite jupe écossaise que ma sœur avait commandée dans le catalogue des « Galeries Lafayette ».
J’en avais « gros sur la patate » car mon chat me manquait et ma radio aussi. La matinée n’en finissait pas et il a fallu manger à la cantine. J’avais peur des cantinières, elles étaient toutes grosses et elles parlaient fort. Ainsi, profitant d’une occasion où personne ne faisait attention à moi, le portail n’étant pas fermé complètement, je me suis sauvée et j’ai fait plus d’un kilomètre à pieds sous le soleil. Tout cela, pour aller retrouver mon chat et ma radio. A cinq ans, j’avais accompli un « exploit » et, depuis, on m’avait à l’œil… La maîtresse m’a secoué de toutes ses forces et m’a hurlé dessus en disant : « tu es toujours collée dans les jupes de ta sœur » car j’avais dit que c’était pour aller la retrouver que je me suis sauvée.
J’ai encore le souvenir de sa hargne et de sa colère. Son regard de dragon m’a hanté toute ma vie. Comme entrée en matière, on n’en fait pas mieux. Heureusement que la nounou était douce, gentille et elle sentait bon. Elle a lavé ma petite culotte plus d’une fois car j’avais peur d’aller aux toilettes. Celles-ci ressemblaient à des trônes en bois avec un trou profond qui, pour moi, abritait des fantômes. Souvent, en tenant mon mouchoir pour pleurer, il glissait dans le trou. Je sursautais à chaque fois qu’une élève entrait dans les toilettes d’à côté. J’avais pris l’habitude de me faire pipi dessus, tout simplement pour éviter d’entrer là-dedans. Heureusement qu’en grandissant, on devient plus raisonnable.
Ma première année d’école s’est à peu près bien passée mais comme j’étais une bonne élève, j’ai provoqué la jalousie de deux petites pestes. Elles ne rataient pas une occasion pour me faire du mal, soit en me tirant les cheveux, soit en me pinçant. Elles craignaient les représailles de ma sœur, alors elles ont vite fait de m’oublier. Pour la fin de l’année, j’ai été récompensée par le premier prix de sagesse, un livre de coloriage avec un cochon rose en couverture. Lors de cette remise de prix, il y avait un spectacle de danses traditionnelles des régions de France. C’est où la Bretagne ? Et la Provence ? Et la Bourgogne ? C’était beau mais je préférais écouter ma radio. Ce défilé de personnes en habits de toutes les couleurs, les foulards, les chapeaux, les dentelles, « très peu pour moi ».
J’étais mieux pieds nus avec ma petite robe de toile et la culotte assortie que ma mère raccommodait tout le temps. Je m’amusais à grimper dans les branches des arbres, à glisser sur les feuilles de canne à sucre et à faire du toboggan dans les sentiers. J’avais une peau à toute épreuve et à part une allergie au duvet de chenille et parfois à l’eau de rivière, je supportais à peu près tout. Je ne comptais pas les « coups de cogne » dans les orteils, les ongles de pieds arrachés, les « gravillons » accrochés dans les genoux et les « croûtes de bobos » que le coq de la basse-cour s’amusait à arracher à grands coups de bec. Je n’étais que plaies et bosses mais j’étais forte, j’arrivais à surmonter ma douleur et je voulais le prouver.
Lors des campagnes de vaccination à l’école, j’étais la première volontaire pour me faire piquer. La tête haute et les yeux secs, je prenais l’allure du soldat vainqueur et j’étais fière de moi. Fransou se cachait. Elle n’aimait pas voir les aiguilles et les seringues.
Et Dieu dans tout ça ?
Par contre, je craignais le curé du village. J’ai découvert qu’il n’était pas Dieu lorsque je l’ai vu manger une pomme, qu’il portait un pantalon sous sa soutane et surtout qu’il parlait souvent du feu de l’Enfer.
Puis j’ai eu six ou sept ans, mon année de cours préparatoire s’annonçait sous les meilleurs hospices. Il faut préciser que je suis née en début d’année et, la rentrée étant en septembre, je ne savais pas si j’étais en avance ou en retard d’après l’âge des autres élèves. Le cours préparatoire, c’était du sérieux. On devenait une vraie et grande écolière. Il n’y a plus de nounou pour nous accompagner aux toilettes. Il y a les devoirs à faire à la maison et, surtout, des nouvelles copines, des redoublantes ou des nouvelles résidentes. L’école des garçons était un p

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