Diasporiques : Mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain , livre ebook

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Au Québec, en France, dans la Caraïbe, en Afrique, les fictions de la diaspora veillent sur l’absence, en évoquant ce qui n’est plus là, ce qui se construit en lieu et place de cette disparition. L’écrivain charrie la mémoire de tous les départs et se penche sur cette vive séparation au cœur du sujet contemporain. Aujourd’hui, l’énigme du déracinement impose ses fictions. Quels sont ces univers en déplacement, ces algorithmes de l’absence dont l’intelligibilité nous échappe encore ? Communautés de l’écart et de l’implantation, les diasporas imposent à la littérature des formes inédites qu’il nous revient de théoriser.
Ce volume comporte des études réalisées par :
Adina Balint-Babos, Université de Winnipeg / Justin Bisanswa, Université Laval / Charles Bonn, Université de Lyon 2 / Ileana Daniela Chirila, Duke University / Geneviève Chovrelat-Péchoux, Université de Franche-Comté / Jeanette den Toonder, Rijksuniversiteit Groningen / Gilles Dupuis, Université de Montréal / Léontine Gueyes, Université de Cocody-Abidjan / Nadra Hebouche, Franklin & Marshall College / Mariana Ionescu, Huron University College / Marie-Christine Lambert-Perreault, Université du Québec à Montréal / Renée Larrier, Rutgers, The State University of New Jersey / Claver Kahiudi Mabana, University of the West Indies, Cave Hill / Carmen Mata Barreiro, Universidad autónoma de Madrid / Johanne Melançon, Université Laurentienne / Robert Alvin Miller, University of British Columbia / Jean Morency, Université de Moncton / Gloria Onyeoziri, University of British Columbia / Pascal Riendeau, University of Toronto / Emmanuelle Tremblay, Université de Moncton / Alisha Valani, University of Toronto
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Publié par

Date de parution

23 septembre 2013

Nombre de lectures

18

EAN13

9782895974031

Langue

Français

Poids de l'ouvrage

4 Mo

Sous la direction deFrànçoISPàréEtTàràCoILnGton
Diasporiques
Mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain
DIASPORIQUES
Mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain
DIASPORIQUES
Mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain
SOUS LA DIRECTION DE
François Paré et Tara Collington
Remerciements
La préparation et la publication de cet ouvrage n’auraient pas été possibles sans le soutien généreux du Conseil de recherche en sciences humaines du Canada, du Département d’études françaises de l’Université de Waterloo et de son directeur, le professeur Guy Poirier. Nous leur en sommes très reconnaissants. Nous remercions également Liam Mulroy, dont le travail minutieux a permis de préparer, sur plusieurs mois, le contenu de ce volume.
Les Éditions David remercient le Conseil des Arts du Canada, le Secteur franco-ontarien du Conseil des arts de l’Ontario et la Ville d’Ottawa. En outre, nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition.
C    B  A C Mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain (Conférence) (11 : Kitchener, Ont.)  Diasporiques : mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain / sous la direction de François Paré et Tara Collington. (Voix savantes ; 7) Communications présentées lors du colloque international Mémoire, diasporas et formes du roman francophone contemporain tenu à Kitchener, Ontario, en 11. Comprend des références bibliographiques. Publié en formats imprimé(s) et électronique(s). ISBN 978--89597-76-8. — ISBN 978--89597-4-1 (pdf ) e  1. Roman français —  siècle — Histoire et critique — Congrès. . Roman français e — 1 siècle — Histoire et critique — Congrès. . Roman francophone — Histoire et critique — Congrès. 4. Mémoire dans la littérature — Congrès. 5. Identité collective dans la littérature — Congrès. I. Paré, François, 1949-, éditeur intellectuel de compilation II. Collington, Tara, 1969-, éditeur intellectuel de compilation III. Titre. IV. Collection : Voix savantes ; 7
PQ67.M46 11 84.9'55 C1-989-  C1-9894-9
Les Éditions David 5-B, rue Cumberland Ottawa (Ontario) K1N 7J www.editionsdavid.com
Téléphone : 61-8-6 Télécopieur : 61-8-819 info@editionsdavid.com
Tous droits réservés. Imprimé au Canada. e Dépôt légal (Québec et Ottawa),  trimestre 1
Introduction
Tara Collington et François Paré
Université de Waterloo
  jamais l’énigme du déracinement impose ses fictions. P Plus que jamais le sujet contemporain est façonné par le renonce-ment à toute origine. Comment alors évoquer de façon vraisemblable et structurée ces nouveaux univers en déplacement, ces algorithmes de l’absence dont l’intelligibilité nous échappe ? Comment parler de ce qui se dérobe, de ce qui est toujours en avant de soi, de ce qui renonce au présent ? Il est certain que, depuis l’effritement des régimes coloniaux, ces questions ne nous étonnent plus, bien qu’elles convoquent encore chez plusieurs un imaginaire de la perte dont notre époque pensait s’être affranchie depuis longtemps. Hybrides et peut-être plus dis-jointes qu’on ne le croit souvent, les identités contemporaines ne cessent pourtant de s’appuyer sur le rêve d’une naissance univoque et toujours recommencée à la culture. Ainsi, l’immigrant cherche à se libérer du souvenir de son départ, car ce moment crucial, toujours rempli de doute et de chagrin, lui semble définitivement rompu. Sur un plan plus large, les communautés diasporiques, si nombreuses aujourd’hui, entreprennent à leur tour de se reconstruire dans la distance explicite
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DIASPORIQUES
des lieux d’accueil, nourries par l’impossibilité de concevoir le retour vers les lieux et les êtres quittés une fois pour toutes. Cela, pourtant, ne se passe pas toujours de cette manière. Et nous le savons, nous tous et toutes qui travaillons sur la littérature ! Rompre aurait dû être un acte de naissance, une venue à la clarté de la parole res-ponsable. Mais comment assumer la fragilité constitutive des espaces diasporiques ? Voilà qu’une écriture asymptotique tisse désormais des liens occultes, refonde les blessures du passé. Voilà que l’écrivain — et nous tous à sa suite ! — se met à parler d’exil, de migrance, de sépara-tion, de fuite et de retour. Il n’a rien oublié. Il charrie la mémoire de tous les départs. De nombreux récits se penchent sans relâche sur cette vive séparation au cœur du sujet contemporain. Le départ n’avait fait de l’immigrant qu’une figure allégorique, inséparable du récit qui lui donne maintenant le jour. Peut-être est-ce là, comme l’avance Pierre Ouellet, le principe même de la littérature :
Comme les premières communautés humaines se sont réunies autour de leurs morts pour leur donner une sépulture, dans la terre et dans la pierre d’abord, puis dans les pleurs et dans les chants, dans les images ou les statues, et dans le verbe enfin, mythique ou poétique, la com-munauté de parole que la littérature dessine entoure un vide sur quoi se tourne ou se retourne le double regard qui en témoigne et en reçoit le témoignage. (p. 95)
Les fictions de la diaspora veilleraient ainsi sur l’absence, en évoquant ce qui n’est plus là et ce qui se construit, dans des communautés de langage, en lieu et place de cette disparition. Au fond, les cultures s’étoilent. Chacun part seul, un jour. Le mythe veut que ce soit toujours le matin à l’aube. Tant de romans contemporains reprennent cette scène inaugurale sous le regard inquiet de la mère. DansL’Énigme du retour, Dany Laferrière s’y attarde quelques fois :
Je me retourne pour voir ma mère debout près de la grande barrière rouge. elle a dû se réveiller en sursaut et s’habiller à toute vitesse quand elle a su que je partais. Ce visage aigu que je connais bien. Comme si elle percevait un danger permanent. (p. 14)
INTRODUCTION
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Une vingtaine d’années plus tôt, dans un récit paru d’abord à Alger, Rachid Boudjedra retraçait lui aussi ce « lever du jour » fatidique où, sous les yeux noirs des oiseaux, le drame de la filiation rompue s’était déployé :
Tous ces yeux d’oiseaux immobiles et effrayants restaient donc là à regarder fixement, droit devant eux, durant de longues et ennuyeuses minutes, avec ce vide qui les caractérise si bien, cette sorte d’atroce néant, d’indifférence, de mélancolie, de tristesse, de détresse et de ten-tation presque suicidaire. Comme s’ils portaient dans leurs prunelles toutes les larmes du monde et, surtout, celles de ma mère qui étaient restées, dans ses yeux, comme solidifiées depuis le jour où elle avait perdu son fils aîné. (p. 41-4)
Le « fils » s’installe ainsi ailleurs dans une mouvance dont il tentera de formuler la secrète attraction, ne serait-ce que pour dissiper la mau-vaise conscience du départ. Avec lui, des communautés de la distance se forment et s’institutionnalisent. Leur taille est restreinte et leurs manifestations ponctuelles. Peu à peu, une certaine expérience de la durée s’installe. Il faut bien se dire que les immigrants ne ressentent pas tous de manière univoque le besoin de « faire société » (ériault) dans la distance qui constitue désormais leur mode de vie. Certaines communautés ne s’instituent jamais et restent purement dispersées. Le déplacement diasporique devient avant tout une façon de penser et surtout un laboratoire individuel sur la mémoire.
Qu’est-ce que l’espace diasporique ?
Le présent recueil porte sur un grand nombre d’œuvres romanesques francophones issues de ces espaces diasporiques contemporains ou inspirées par les formes instables de la diaspora. Comme certains anthropologues l’ont déjà fait remarquer, la défi-e nition du terme de diaspora a beaucoup évolué au cours du  siècle. D’abord utilisé principalement pour décrire la dispersion du peuple juif à travers le monde antique, ce concept peut maintenant signa-ler la dispersion d’une variété de communautés, venant de plusieurs contextes ethniques (Médam, p. 59 ; Schnapper, p 9). C’est ainsi qu’on parle aujourd’hui de la diaspora arménienne ou chinoise, ou même
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DIASPORIQUES
de la diaspora québécoise à l’intérieur de l’espace national canadien. En fait, dans les sciences sociales, l’emploi du terme est relativement récent, l’usage du mot n’étant répandu qu’à partir des années 198 (Helly, p. 19 et ). Les espaces diasporiques sont, en réalité, d’une grande plasticité et permettent de rendre compte de façon cohérente d’un ensemble d’ima-ginaires apparemment contradictoires : d’abord, le déracinement, la disjonction, l’absence des proches, la disparition des langues et des cultures, les colonisations ; ensuite, la fin des esclavages, la décolonisa-tion, le besoin de vivre ensemble, l’interrelation, la mémoire, l’écriture de soi. William Safran dresse une liste de quatre traits fondamentaux qui peuvent caractériser une culture diasporique : 1) la dispersion d’une population (forcée ou non) ; ) un fort sens de la mémoire collective qui tend à préserver dans les lieux d’accueil l’héritage culturel du groupe ; ) le désir de survivre comme une minorité en protégeant cet héritage ; et enfin 4) une identité collective orientée vers l’extérieur, vers le pays perdu et non vers le pays d’accueil (1999, p. 55). Selon ce chercheur, la mondialisation, le mouvement des populations, la technologie qui facilite la communication instantanée et les échanges culturels qui traversent les frontières nationales et politiques contribuent tous à une remise en question de l’idée de « nation ». Cette interrogation s’accompagne d’une valorisation des identités de l’entre-deux, les indi-vidus s’identifiant à un lieu d’origine qui n’est pas celui où ils résident habituellement (ibid.). Pour sa part, Dominique Schnapper constate que « l’immédiateté ou la compression du temps et de l’espace grâce au progrès technique — symbolisée par Internet — viennent renfor-cer un phénomène qui existait du temps des États-nations et parfois leur préexistait, mais à une tout autre échelle » (p. 5). Il ne faut pas s’en étonner : notre époque est ainsi marquée par la propagation du terme de diaspora, à tel point que certains théoriciens dénoncent une tendance à l’employer pour décrire tous les phénomènes migratoires (Hovanessian, p. ). Schnapper attire encore notre attention sur le fait que l’emploi de ce concept est subjectif, puisqu’il désigne certains groupes et non d’autres ; elle propose plutôt de l’étendre à toute popu-lation dispersée (p. 1), quelle qu’elle soit, dans la mesure où cette utilisation élargie permettrait de
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