Les Veillées de saint Hubert
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Les Veillées de saint Hubert , livre ebook

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Description

Créateur du roman cynégétique, dont le sujet est la traque d'animaux, Théodore Foudras décrit à merveille l'univers des chasseurs dans cette œuvre publiée pour la première fois en 1848.

Informations

Publié par
Date de parution 01 janvier 2012
Nombre de lectures 79
EAN13 9782820630513
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0011€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Collection
«Contes & nouvelles»

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ISBN : 9782820630513
Sommaire


Deux vieux passionnés
Deux vieux passionnés
I
Il m’est arrivé quelquefois, dans un de ces accès de morosité et de découragement auxquels tous les hommes sont plus ou moins sujets, quand la riante saison de leur jeunesse est passée, de penser et même d’écrire que la passion de la chasse était morte en France, comme une multitude d’autres bonnes choses qui ont été, durant des siècles, l’objet du culte fervent de nos robustes aïeux. Mais qui ne se trompe pas une fois dans sa vie ? Le plus grand génie des temps modernes ne s’est-il pas écrié, dans une heure d’amertume : « Les rois s’en vont ! » Il est descendu dans la tombe, convaincu qu’il était tout aussi bon, et peut-être même meilleur prophète qu’Isaïe, et cependant, moins de trois ans après, nous étions devenus tous si royalistes, à commencer par les républicains effrayés d’eux-mêmes, qu’il nous fallait quelque chose de plus qu’un roi. Amusez-vous donc à faire des prophéties sans en avoir reçu la permission d’en haut.
Plus heureux que l’immortel Chateaubriand, j’ai le temps de reconnaître mon erreur, et j’aurai la loyauté de la confesser, ce qu’il aurait fait sans doute pour la sienne s’il eût vécu. Non, la foi du veneur ne s’est pas éteinte ! quelques hommes d’élite la gardent toujours précieusement au fond de leurs âmes, et, pour ceux qui conserveraient encore quelque incertitude à cet égard, je vais raconter un fait dont j’ai été récemment témoin. Je ne l’ai point recueilli, je l’ai vu. Ami lecteur, je vous prie de prendre note de ces trois mots en lettres italiques : ils doivent vous inspirer toute confiance.
Au mois de décembre dernier ce n’est pas plus vieux que cela des circonstances, dont il est inutile de parler ici, m’avaient obligé à traverser un département du centre de la France, qu’il ne me convient pas de désigner d’une autre manière qu’en disant qu’il est en grande partie couvert de vastes forêts très giboyeuses et merveilleusement bien percées. La route que je suivais, au petit trottinement d’un mauvais cheval de louage, passait au beau milieu d’une de ces forêts, la mieux peuplée et la plus pittoresque de toutes, au dire des naturels du pays. Il n’avait pas encore gelé sérieusement de l’année, et la brise du sud-est qui soufflait était si faible, qu’elle ne soulevait pas même les mèches de la crinière inculte de ma monture. « Quelle admirable journée pour la chasse ! » pensais-je tout en plongeant mes regards à droite et à gauche sous les futaies séculaires qui bordaient les deux côtés du chemin, et en cherchant la trace d’une bête fauve sur le revers des fossés jonchés de feuilles mortes. Tout à coup des sons de trompe peu éloignés arrivèrent distinctement à mon oreille, et je reconnus les notes lentes, pleines et sonores de la quête. Il va sans dire que j’arrêtai court mon locati , qui ne demandait pas mieux que de se reposer sur trois jambes au lieu d’en remuer péniblement quatre, et que je mis à écouter avec l’attention dévorante d’un vieux disciple de saint Hubert dont la ferveur ne s’est pas encore évanouie. La trompe allait toujours son train, accompagnée cette fois de cris harmonieux d’une meute assez nombreuse qui se rapprochait chaudement en se dirigeant en droite ligne sur moi. À la rigueur, j’étais bien un peu tenu d’arriver le soir même dans le lieu où je me rendais, puisque j’avais commis l’imprudence de m’annoncer chez des amis ; mais cette coquine de trompe et ces diables de chiens me clouaient à la place où j’avais fait halte, et je ne pouvais plus songer à autre chose. « Ma foi, tant pis ! m’écriai-je, dût-on m’attendre une heure ou deux pour dîner, je verrai au moins le début de cette chasse. C’est une jouissance si rare pour moi aujourd’hui, que je ne m’en priverai certainement pas. »
Ces paroles étaient à peine prononcées, que la meute lança tout de bon, et presque aussitôt un magnifique brocard, la tête haute et la croupe insolente, traversa la route à vingt pas devant moi.
Je n’en fis ni une ni deux, et je poussai de toute la force de mes poumons le joyeux cri : « Tayaut ! Tayaut ! » Il me semblait que j’avais rajeuni de vingt ans en quelques secondes.
Sous l’empire de cette illusion, je mis lestement pied à terre, et quand la meute arriva je lui indiquai avec ma casquette l’endroit où l’animal venait de passer.
Puis, toujours comme si la chose me regardait, je remontai sur mon souffre-douleur, et je suivis sous bois, sans plus songer aux amis, pour lesquels je m’étais mis en campagne, que s’ils n’étaient pas de ce monde.
Je n’eus pas besoin de me presser beaucoup pour rattraper les aimables chiens dont je venais de faire la connaissance. Il y en avait une quinzaine à peu près, de tous poils, de différentes races, en général bien gorgés, mais peu vites. Le brocard en prenait donc à son aise devant eux, ce qui m’était d’autant plus agréable, qu’autrement il m’eût été difficile de jouir longtemps du plaisir que leur ravissante musique me faisait éprouver.
L’angélus, qui sonnait dans quelque bourgade du voisinage, m’apprit qu’il était midi.
Bon ! me dis-je, si ces braves toutous ont un peu de fond, nous en avons au moins pour quatre heures : c’est tout ce qu’on peut espérer dans cette maison.
Un peu plus tard, j’aperçus de loin le piqueur qui s’efforçait de gagner les devants comme s’il voulait contraindre l’animal à rebrousser chemin. J’en conclus qu’il y avait des tireurs embusqués aux alentours du lancer, et que j’assistais tout simplement à une de ces bonnes petites chasses bourgeoises qui ont bien aussi leur charme pour les âmes candides que n’a point encore atteintes le corrupteur amour du bâtard anglais.
À une autre époque, j’aurais très probablement dédaigné ce passe-temps un peu primitif ; mais tout ragoût paraît savoureux au palais de celui qui jeûne.

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