L'Adolescence aux mille visages , livre ebook

Odile Jacob - Daniel Marcelli , Alain Braconnier

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

140 pages

Français

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

A propos
Informations
Extrait

Description

Autonomes et dépendants, individualistes et fascinés par le groupe, péremptoires et sujets au doute, les adolescents sont les champions du paradoxe. Comment cerner leurs « mille visages » et les aider à franchir cette étape cruciale de leur vie ? Comment ne pas abuser de son autorité sans devenir un parent complice ? Qu'en est-il de la vie amoureuse ? Quand s'inquiéter de manifestations anxieuses ou dépressives ? Qu'est-ce qu'un adolescent « à problèmes » ? Que faire face au danger de la drogue, au risque du sida ? Depuis sa première parution en 1988, ce livre est devenu un classique. Entièrement remis à jour pour la présente édition, il fournit des données épidémiologiques approfondies et propose une vision nouvelle de la dépression à l'adolescence et des relations entre l'adolescent et sa famille. Médecin psychanalyste, directeur de l'Association de santé mentale du XIIIe arrondissement de Paris, Alain Braconnier enseigne à l'université de Paris-V. Il est notamment l'auteur, aux éditions Odile Jacob, de Tout est dans la tête, en collaboration avec Éric Albert , et du Sexe des émotions. Psychiatre, Daniel Marcelli est spécialiste de l'enfance et de l'adolescence.

Sujets

Psychology

Sociologie, société et politique

Adolescent

Developmental

Informations

Publié par	Odile Jacob
Date de parution	01 février 1998
Nombre de lectures	1
EAN13	9782738182142
Langue	Français
Poids de l'ouvrage	1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0500€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© ÉDITIONS ODILE JACOB , JANVIER 1998
15, RUE SOUFFLOT , 75005 PARIS
www.odilejacob.fr
EAN : 978-2-7381-8214-2
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo
Avant-propos

Seconde naissance, ailes du désir, adieux à l’enfance, années sauvages, les métaphores sont nombreuses pour évoquer l’adolescence. Cette longue période de mutation entre l’enfance et l’âge adulte revêt en effet de multiples aspects, de multiples « visages ».
Et ce d’autant plus que l’adolescence a changé. Nous assistons aujourd’hui à une mondialisation de la jeunesse : mondialisation de son autonomie, mais aussi mondialisation de son exigence de repères et de sens, face à un monde d’adultes parfois trop préoccupé, lui, par la mondialisation de l’économie et des capitaux.
La durée de l’adolescence a également changé : en trente ans elle s’est nettement allongée ; la puberté survient de plus en plus tôt : 12,5 ans dans les pays occidentaux en 1996, contre 14,5 en 1960 et 16,5 ans en 1850. On note de plus la recrudescence de pubertés précoces, survenant dès 8 ans pour les filles et 10 ans pour les garçons et touchant sept filles contre trois garçons.
Mais les changements ne sont pas seulement physiques : la précocité concerne également les aspects affectifs, relationnels ou intellectuels. Les comportements typiques de l’adolescence, souvent marqués par des attitudes paradoxales, surgissaient il y a encore vingt ans vers l’âge de 14 ans ; ces mêmes comportements se voient maintenant chez des « enfants » de 10, 12 ans.
À l’autre extrême, la transition de l’adolescence vers l’âge adulte s’allonge et les étapes en sont plus floues. Une étude portant sur les quatre-vingts millions de jeunes Européens âgés de 15 à 29 ans montre que ceux-ci retardent ou se voient refuser le passage de la formation à la vie active ; en 1987, 50 % des jeunes de 18 ans travaillaient ou étaient à la recherche d’un emploi. En 1995, ils n’étaient plus que 41 % dans cette situation. Autre signe de cet allongement, l’âge moyen des mariages a pris un sacré coup de vieux : en 1995, il est de 32 ans pour les hommes et de 29,6 ans pour les filles ; quinze ans plus tôt il était respectivement de 28,4 et de 26,1 ans.
L’adolescence constitue donc aujourd’hui une période plus longue que par le passé, semblant justifier le proverbe africain selon lequel « Tu es plus le fils de ton époque que le fils de ton père. » Cependant les adolescents contemporains restent confrontés aux mêmes réalités que ceux des générations précédentes. Comme eux, ils doivent affronter des changements, parfois même des ruptures brutales. Ces transformations évidentes affectent aussi bien le corps que la relation à soi et aux autres, aussi bien les comportements les plus apparents que la personnalité profonde. Ce développement irréversible, radical, a toujours été source d’une formidable potentialité, mais aussi d’une véritable difficulté pour ceux qui le traversent en principaux acteurs, en partenaires ou en témoins.
Tous ces aspects, et les questions qu’ils engendrent, sont abordés dans cet ouvrage. Ils sont surtout mis en perspective : chaque dimension y est décrite sous ses angles psychologiques, sociologiques, pédagogiques et médicaux. Selon les cas, ces diverses approches permettent en effet soit de relativiser les difficultés qui risquent de conduire à une dramatisation dommageable, soit au contraire d’éviter de négliger des symptômes qui doivent être pris sérieusement en compte.
Les auteurs de ce livre sont des praticiens qui, depuis plus de vingt ans, sont en contact quotidien avec des adolescents en difficulté et avec leurs familles. Grâce à leur pratique, grâce à une réflexion théorique et pédagogique qu’ils tentent de mener, travaillant avec les enseignants, les travailleurs sociaux et les médecins, généralistes ou pédiatres, ils constatent que les comportements des jeunes et les idées sur l’adolescence ont évolué. Des notions nouvelles sont apparues que ce livre aborde, non seulement pour faire le point, mais pour servir de lecture aux adultes qui guident et accompagnent les adolescents. Il s’adresse ainsi à tous ceux qui sont en relation avec ces adolescents qui doivent être compris et aidés au moment où ils franchissent une étape décisive de leur vie.
Introduction

La fin de l’enfance
En 1533, âgée de 14 ans, Catherine de Médicis est déracinée de Florence, sa ville natale, pour être mariée à Henri d’Orléans, deuxième fils de François I er . Sans aucun ménagement, elle est transplantée dans le lit de son jeune mari, dans une cour et un pays étrangers et plutôt hostiles. À ses yeux, son enfance est sans nul doute définitivement terminée. Aujourd’hui, confrontés aux violences urbaines ou aux propos de trop d’adultes en peine de leur proposer un avenir, comment les adolescents sortent-ils de l’enfance, et le désirent-ils ?
Problèmes d’époque ou questions universelles ? Dans l’enfance, après une première période marquée par le fameux stade œdipien, une deuxième phase survient, désignée sous le terme de « latence ». Malgré l’activité intellectuelle, physique et psychique qui se déroule alors chez le sujet, cette phase se situe entre les deux périodes les plus « chaudes » du développement. D’où son nom. L’enfant ne dit plus qu’il veut épouser sa mère ou son père ; il s’intéresse à des histoires de savants ou de héros, dessine une maison avec des personnages symboliques dont le sens est clair pour nous mais occulté pour lui. Le soleil œdipien s’est estompé à l’horizon mais il va reparaître sous une forme beaucoup plus agie et comportementale au moment de la puberté.
Cette fin de l’enfance correspond donc à un déclin. En allemand, le terme Untergang est employé pour désigner :
– la perte d’un bateau (Untergang eines Schiffes) ;
– le déclin (la chute, la décadence) d’un empire (Untergang eines Reiches) ;
– le coucher du soleil (Sonnenuntergang) .
La métaphore du coucher du soleil nous paraît particulièrement pertinente, appliquée à la phase de latence. Tandis que le soleil se couche quelque part, il se lève ailleurs, et surtout il ne se couche jamais sans se relever : ainsi surgit l’adolescence.
Tout développement psychique s’inscrit dans une histoire, le souvenir de l’avant, l’attente et l’appréhension de l’après. En termes psychologiques contemporains, on pourra dire que si le désir œdipien implique une interrogation sur ce que deviendra le rival, sur son idéal et sur l’intériorisation des imagos parentales, le surgissement de la pulsion pubertaire marque une transformation compliquée et contradictoire des exigences corporelles et sociales.

Le temps des paradoxes
L’adolescent contemporain est avant tout un être de paradoxes.
Il veut être totalement autonome, mais en même temps il sollicite ses parents pour des actes banals de la vie quotidienne.
Il énonce des vérités absolues, intangibles ; en même temps il doute profondément de lui-même, de son corps, des autres.
Alors même que sa pensée s’ouvre aux catégories du possible et au champ infini des hypothèses, son corps se transforme irrémédiablement dans un sexe rigoureusement défini.
Il est souvent extraordinairement altruiste en même temps qu’il peut se révéler fantastiquement égoïste.
Il ne cesse de se dire profondément individualiste et en même temps il se fond dans un groupe ou dans une mode qui le rendent difficilement discernable de ses pairs.
On pourrait continuer ainsi à énoncer de multiples paradoxes que tout adulte perçoit dans le comportement, les pensées, les sentiments, les émotions que vit et traverse tout adolescent. Cependant il éprouve ces contradictions : on pourrait dire que l’adolescence est précisément cette période où l’individu fait l’expérience des contradictions, du paradoxe et de la souffrance qu’elles engendrent.
Dans les années cinquante et soixante, il a beaucoup été question de « crises d’adolescence ». Aujourd’hui, les spécialistes ont tendance à abandonner ce terme pour passer à des notions plus précises : on parle désormais de travail psychique du pubertaire, de second processus de séparation-individuation, de travail de deuil, etc. Nous aurons l’occasion de préciser le sens de ces différentes expressions au cours des chapitres ultérieurs.

Des étapes à franchir
Pour décrire de façon simple ce travail psychique propre à chaque adolescent, nous dirons qu’il se caractérise d’abord par une période d’attente, puis par une période de changement, enfin par une phase de découverte.
L’attente correspond à l’entrée dans l’adolescence qui est plus précoce qu’il y a encore quinze ans. Elle se situe aux environs de 10-13 ans et se marque par le début de la puberté. La grande majorité des enfants est désormais prévenue de l’irruption prochaine de la puberté et des transformations qu’elle suscitera dans leur corps. Les filles et les garçons savent qu’ils vont fortement grandir mais aussi prendre du poids, souci tout particulier des futures adolescentes et de leur maman. Les filles sont informées de l’apparition des premières règles et du développement de leur poitrine ; les garçons se préoccupent en général des poils qui vont pousser, en particulier des premiers poils pubiens ou de la taille de leur sexe.
Cette attente se fait souvent dans un climat de désir et de crainte. Elle est le prolongement de l’enfance qui représente en réalité le terreau da