Nous étions quatre
95 pages
Français

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Description

Nous étions quatre ! Quatre célibataires endurcis, amis de longue date, qui se réunissaient régulièrement dans un chalet en pleine forêt pour laisser libre cours à leur passion commune : la chasse.


Mais, ce triste matin, en Sologne, nous n’étions plus que trois, notre hôte, qui était également le plus riche de la bande, était mort, d’une balle dans la tête, durant la nuit.


Difficile de croire au suicide quand l’arme est introuvable...


Et je n’avais pas besoin de mon expérience de policier pour savoir qu’il s’agissait d’un crime puisque le projectile avait été tiré avec mon revolver, que j’avais retrouvé, à sa place, dans ma veste au petit matin.


Ce meurtre, dont je devenais le coupable idéal, avait-il rapport avec la conversation sur le Diable initiée, la veille au soir, par la victime ? Ou à l’apparition quasi fantomatique d’un trimardeur ?


L’assassin était-il à chercher parmi les survivants du quatuor ?


Il me fallait répondre à ces questions avant que les doutes de la Justice ne s’abattent inéluctablement sur moi...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 06 mai 2023
Nombre de lectures 0
EAN13 9782385011567
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0019€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

NOUS ÉTIONS QUATRE
Roman policier

par Maurice LAMBERT
CHAPITRE PREMIER
 
— Ainsi, remarqua Maurice Gray, vous ne croyez pas à Satan ?
La réponse fut un éclat de rire général.
Nous étions quatre célibataires et, si l'on en juge par le poil gris qui, à quarante ans, vient marquer les tempes des hommes, nous étions même des « endurcis ». En dehors de nos occupations respectives, la chasse semblait être notre seule raison de vivre et c'était la chasse qui venait, une fois de plus, de nous réunir, pour quelques jours, trop vite passés, dans la jolie propriété que Maurice Gray possédait au cœur de la Sologne, paradis de tous les chasseurs, à une vingtaine de kilomètres de Romorantin.
L'excellent armagnac brillait au fond des verres, comme un morceau d'ambre blond. Claire, la femme du garde, venait de débarrasser la table, pour nous laisser, comme elle le disait dans sa franchise paysanne, « à nos histoires d'hommes ». Le bon sourire de ses yeux limpides, sous les bandeaux gris, démentait la rudesse de son langage et, malgré son âge (ou à cause de lui !), nous avions l'impression d'être redevenus des jeunes gens, gourmandés par une bonne vieille maman...
C'est une impression à laquelle bien peu d'hommes restent insensibles, surtout lorsqu'une magnifique journée de septembre s'achève et qu'elle a comblé, au-delà de leurs espérances, des chasseurs impénitents. Il y eut, hélas ! d'autres journées de septembre où nous dûmes prendre d'autres fusils... Mais l'histoire que j'ai entrepris de conter se place avant les tristes épreuves que nous vécûmes, en spectateurs impuissants.
De nous quatre, seul Maurice Gray ne prit pas part à l'allégresse générale que sa remarque, au sujet de Satan, venait de provoquer et, lorsque le calme fut rétabli, il ajouta, comme pour nous reprocher notre « chahut » et compléter sa pensée :
— Eh bien, vous avez tort !
Le ton était ferme et pourtant, d'un même regard convergent, nous nous assurâmes que le verre de Maurice n'était pas encore vide.
— Oui, je sais, reprit notre ami, vous pensez que mon armagnac...
— Qui est excellent ! coupa Murois.
— Qui est excellent, je le sais ! Vous pensez, dis-je, continua Maurice Gray, que l'armagnac, joint à la fatigue de la journée, provoque en moi des troubles dont vous constateriez les effets. Eh bien, encore une fois, mes bons amis, vous vous tromperiez ! Barjon, toi qui es le plus brillant disciple d'Esculape que j'aie jamais connu, as-tu l'impression que je divague ?
— Je crois, au contraire, répondit Paul Barjon de sa voix très calme, que tu es dans une forme splendide...
— Ah ! s'enthousiasma Gray. Vous voyez, vous autres, les esprits forts ?
— Seulement, continuait le docteur, imperturbable, je suis obligé de constater, avec ces messieurs, que tu tiens des propos singuliers...
— À cause de Satan ? demanda Gray.
— À cause du diable, oui !
Notre hôte nous considéra en silence, prit son verre d'alcool, qu'il chauffa entre ses doigts, huma délicieusement l'arôme et but une gorgée du précieux liquide. En temps ordinaire, nous n'aurions prêté aucune attention à ces manipulations qui nous sont familières, mais le visage de notre ami paraissait tendu vers quelque chose d'insaisissable ; un souvenir, peut-être, dont il hésitait à nous faire part.
Ce fut encore plus particulièrement à Paul Barjon qu'il s'adressa :
— Dans ta déjà longue carrière de clinicien, demanda-t-il, as-tu jamais soigné un malade qui se croyait possédé du démon ?
Selon son habitude, qui prouvait sa probité professionnelle, Barjon ne répondit pas sans réfléchir. Nous respectâmes sa réflexion, attendant avec curiosité la suite de cet entretien.
— Je n'ai jamais soigné de fous ! murmura enfin le docteur, comme s'il venait, au cours de ces quelques secondes de silence, de revivre toute sa carrière.
— Tu crois donc, fit Maurice Gray, qu'il faut être fou pour être ou se croire possédé ?
— Mon Dieu, assura le docteur, je crois tout au moins qu'il faut se trouver dans un état anormal, où le système nerveux a son mot à dire...
Notre hôte ne se tint pas pour battu et déclara :
— Ce qu'il y a d'extraordinaire, chez vous autres, les médecins, c'est que vous ramenez tout ce qui vous est inconnu à ce qui vous est connu. Naturellement, tu le sais bien, je ne veux pas te froisser en disant cela, pas davantage que je n'entends mettre en cause la science et le dévouement de tes confrères. Non ! Je veux simplement exposer ma pensée, avec les arguments dont je dispose et ils sont pauvres, je le reconnais. Dès qu'un être humain manifeste des aptitudes exceptionnelles ou est seulement différent de la moyenne de ses concitoyens, on pense qu'il est tributaire d'une thérapeutique quelconque et, s'il a été un génie ou un imbécile, on s'empresse, après sa mort, de le disséquer pour classer son cas, parmi d'autres cas, comme les mots sont classés dans un dictionnaire. De doctes savants se penchent sur ce cadavre dépecé et cherchent quels remèdes auraient dû être appliqués, en temps voulu, bien entendu, pour que le malheureux n'ait pas été un imbécile... ou un génie ! Étonnez-vous, après cela, que notre triste époque soit si pauvre en ce qu'on pourrait appeler : des êtres supérieurs innés.
— Si elle est également pauvre en imbéciles, remarqua froidement Barjon, on peut tout de même rendre justice à la science médicale.
Un éclat de rire, auquel le docteur lui-même prit part, clôtura cette petite passe d'armes. L'armagnac diminua d'un centimètre dans les verres, mais on sentait bien que Maurice Gray voulait encore parler. Il n'était cependant pas bavard, d'habitude, bien qu'il fût avocat, et c'est pourquoi, in petto, nous nous demandions où il désirait en venir.
Abandonnant Barjon qui, en riant, lui tâtait le pouls, il se pencha vers Murois, dont le talent de romancier commençait à porter ses fruits.
— Et toi, Pierre, demanda-t-il, as-tu jamais étudié la question ?
— Quelle question ? répondit Murois, qui semblait être toujours plongé en quelque méditation d'ordre professionnel.
Mais avant que Gray ait précisé ce dont il s'agissait, le romancier se réadapta à notre « climat ».
— Ah ! oui ! s'écria-t-il. L'histoire de Satan ? Eh bien, non ! Je l'avoue, je n'ai jamais étudié cette question. Je reconnais qu'elle offre de l'intérêt, mais je n'y ai pas encore cherché le sujet d'une œuvre. A priori, j'estime qu'il ne faut négliger aucune documentation ; j'écoute donc votre discussion, avec l'intérêt le plus vif...
Et Pierre Murois, ayant dit cela, se replongea dans une rêverie qui paraissait ne devoir finir, ou n'être interrompue, que par l'apparition d'un faisan doré s'envolant dans un froissement d'ailes...
— Et toi, Mios ?
Cette fois, c'était à moi que Maurice Gray s'adressait. Il continua :
— Tu n'es ni médecin ni romancier. Tu n'es pas comme Barjon qui n'a jamais soigné de fous ; les fous, ou ceux que l'on croit tels, ce sont les événements qui te les ont fait dépister... et, nos amis en sont témoins, tu es autre chose qu'un simple policier. Tu as résolu des problèmes complexes devant lesquels plus d'un aurait perdu son latin et...
— N'en jette plus ! dis-je en souriant. Tu vas me faire rougir...
Il était vrai que ces compliments, venant d'un ami cher, me gênaient horriblement.
Grâce à la bienveillance de mes chefs, dont je conserve le souvenir ému, j'ai pu, dans un métier plus délicat qu'on ne le suppose habituellement, donner libre cours à mes dispositions innées pour tout ce qui est mystérieux. Le mystère, avec la chasse, c'est sans doute tout ce que j'ai aimé au monde... C'était encore à la bonté de mes supérieurs que je devais de pouvoir, entre deux affaires, passer quelques jours en compagnie de mes trois meilleurs amis.
— Si, si ! protestait encore Gray. Tu es un « as » dans ton métier et c'est pourquoi je t'interroge le dernier. Réponds franchement, Mios ! As-tu jamais eu des accointances avec Satan ?...
— Des « accointances », répondis-je, c'est beaucoup dire ! Tout au plus ai-je eu, avec ce haut personnage, des relations d'affaires par... intermédiaires.
— Veux-tu dire, demanda Barjon, que tu as eu des preuves de sa manifestation diabolique ?
— À la vérité, expliquai-je, j'ai eu à m'occuper, en deux ou trois circonstances, d'agissements mystérieux que l'on mettait à l'actif du démon... Je dois avouer que ces faits, dépouillés, comme il se doit, du mystère qui les enveloppait, sont apparus, dans mes rapports, comme étant l'œuvre de fumistes sans envergure.
Maurice Gray, qui avait d'abord semblé satisfait de voir enfin quelqu'un prendre au sérieux ce qui lui tenait à cœur, parut déconcerté par ma conclusion.
— Ainsi, me dit-il, tu ne crois pas, toi non plus, qu'en notre siècle de Lumière... « et d'électricité », comme on dit, il puisse subsister quelque chose d'une époque où « se donner à Satan » était, dans tous les milieux, une façon de conquérir un cœur rebelle ou de vaincre un ennemi inaccessible ?
Je pris le temps de la réflexion, car il me plaît d'être consciencieux, moi aussi, dans tous les faits de l'existence, puis je répondis :
— Non ! Je ne disconviens pas que certains adeptes des sciences occultes sont, incontestablement, des gens sincères, intelligents et qui, autant que possible, appuient leur conviction sur des bases solides et définitivement acceptées par la Science tout court. Je pense toutefois, et je n'engage que moi-même, que la sorcellerie est à la magie ce que le particulier est au général. Les adeptes de ces théories distinguent deux classes de forces mystérieuses, sur lesquelles ils prétendent pouvoir agir : les esprits conscients et volontaires des morts auxquels s'adressent les spirites, et les entités inconscientes qui n'ont jamais été désincarnées et ne doivent jamais l'être. Aussi incapables d'agir spontanément que de résister à une évocation, ce sont les fluides passifs ou élémentaux. D'après ce système, on différencie les travaux qui ont un but spéculatif ou un dessein de protection privée ou collective (on appelle cela la magie b

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