background image

Le dilemne de Paul Hoff , livre ebook

110

pages

Français

Ebooks

2023

Écrit par

Publié par

icon epub

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Lire un extrait
Lire un extrait

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus

Découvre YouScribe et accède à tout notre catalogue !

Je m'inscris

Découvre YouScribe et accède à tout notre catalogue !

Je m'inscris

110

pages

Français

Ebooks

2023

icon jeton

Vous pourrez modifier la taille du texte de cet ouvrage

Lire un extrait
Lire un extrait

Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne En savoir plus

Paul Hoff est un jeune urologue aux dents longues, prêt à tout pour s’assurer une brillante carrière hospitalo-universitaire. Aussi, à la seule fin de gravir plus vite les échelons et bien qu’il ne ressente rien pour elle, n’hésite-t-il pas à épouser la fille du patron. De compromis en concessions, il mène une vie sclérosée dans l’univers de la grande bourgeoisie bordelaise, jusqu’au jour où son chemin croise celui d’Anaëlle. L’amour va alors mettre le désordre dans son existence et peut-être la changer pour toujours... Pierre Nagy, lui-même gynéco-obstétricien à Montpellier depuis de nombreuses années, nous livre une description crue et cynique du milieu médical qu’il connaît bien.
Voir icon arrow

Publié par

Date de parution

27 décembre 2023

EAN13

9782382112250

Langue

Français

Le dilemme de Paul Hoff
Pierre Nagy
Le dilemme de Paul Hoff
M+ ÉDITIONS 12 rue de la Part-Dieu 69003 Lyon mpluseditions.fr
 
Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
 
 
 
 
 
 
 
© M + éditions Composition Marc DUTEIL ISBN : 978-2-38211-225-0
PROLOGUE
Me voilà dans l’avion qui m’emmène vers Ouagadougou. Je suis accompagné de médecins et d’infirmières pleins d’allant, profondément désireux de porter secours aux plus démunis de cette planète. Au milieu de la jubilation ambiante, je dois passer pour un blasé qui reste dans son coin. Je me félicite intérieurement que le siège à côté du mien soit vacant. Outre le fait que de disposer de deux places contiguës me permettra de prendre mes aises, il n’y aura surtout pas l’un de ces idéalistes pour m’importuner tout le long du vol en me tenant la jambe avec l’intense joie puérile qu’il ressent à l’idée d’apporter sa pierre à l’édifice.
 
Avec mes trente-trois ans, je ne suis certes pas le plus jeune de l’expédition, mais je suis dans ce domaine le moins chevronné dans la mesure où je suis un bleu en la matière entouré de vieux briscards, rompus à braver l’inconfort et la saleté au bout d’une piste en terre battue semée de nids-de-poule.
En revanche, je dois bien être le seul à bord qui ne soit pas animé par un sincère élan altruiste. Je me dois de reconnaître que je m’inquiète des déshérités de notre monde comme de ma première chemise. À la différence des vétérans de ce secteur, je n’ai aucune envie de vivre aux confins de la civilisation, dans un trou perdu au fin fond de la brousse. Je n’ai rien d’un jeunot totalement inexpérimenté aspirant avant toute chose à se faire la main en toute indépendance, ni d’un grincheux souhaitant ardemment se débarrasser de la pesanteur administrative. Je ne suis pas davantage en quête d’une pratique médicale rudimentaire où prime le bon sens clinique, puisqu’on ne peut tout simplement pas recourir à la technologie moderne. Là où l’on va, il faut se débrouiller avec le peu dont on dispose, sans imagerie médicale – ni scanner ni IRM – et sans laboratoire d’analyses pour aider à poser un diagnostic. Opérer muni d’une lampe frontale pour remplacer la lampe scialytique, et rompre ainsi la monotonie, ne m’attire nullement.
 
Tandis que notre Boeing 707 file dans la nuit, des souvenirs emmagasinés dans les recoins les plus éloignés de ma mémoire remontent à la surface, probablement stimulés par le constant vrombissement des réacteurs. Ils semblent affluer, resurgissant un à un, à mesure que l’appareil prend de l’altitude. À trente-huit mille pieds, y verrai-je plus clair qu’au niveau de la mer ?
 
PREMIÈRE PARTIE
Postuler pour cette mission humanitaire était l’unique moyen crédible que j’avais trouvé pour quitter Bordeaux seul. En effet, il n’y avait pas l’ombre d’une chance pour que Mathilde envisage de m’accompagner. Elle a certes été intriguée par mon subit intérêt pour la souffrance des Africains, mais n’y a rien trouvé à redire, ne soupçonnant pas la véritable motivation à l’origine de mon départ. À mon grand étonnement, elle a admiré mon engagement dans « une noble et juste cause » sans douter un instant de son authenticité, moi qui n’ai pourtant jamais prêté une quelconque attention à quoi que ce soit ne concourant pas à faire progresser ma propre cause. Mais lorsque l’on doit prendre une décision de la plus haute importance, il est vraiment nécessaire de mettre à bonne distance pendant plusieurs jours les personnes concernées afin de méditer sur le sens de sa vie… Sans compter que j’espérais aussi que le simple fait de me confronter à une telle misère m’amènerait peut-être à mettre un peu les choses en perspective…
 
Mathilde ne mérite pas cela. Épouse absolument irréprochable, elle a toujours assuré l’intendance afin de me décharger au maximum des tâches domestiques et de toute obligation superflue, me permettant ainsi de me consacrer entièrement à un métier qui m’accapare du matin au soir.
Au grand dam de son père, bien qu’elle soit allée jusqu’au bout de son internat de gynécologie obstétrique, Mathilde n’a jamais exercé. Le Professeur Martin se désole qu’elle se cantonne à son rôle de femme au foyer, voyant dans son renoncement un sacrifice à ma carrière. Je sais qu’il n’en est rien. Si elle a décidé de rester à la maison, c’était par peur de se retrouver en première ligne avec le stress permanent que cela implique et pour éviter d’infliger une désillusion majeure à son paternel qui avait placé tant d’espoirs en sa fille unique. Plutôt que subir cet excès de pression pour se montrer constamment à la hauteur des expectatives paternelles, elle a pris le parti d’opter pour une existence paisible.
Sans le puissant soutien de mon beau-père, l’éminent et plénipotentiaire Professeur Jacques Martin qui peut, d’un simple mot, faire et défaire les carrières, je n’occuperais pas le poste de praticien hospitalier (PH) dans le service d’urologie qu’il dirige. Ma position d’élève-roi n’est pas sans inconvénients, notamment auprès de mes coreligionnaires qui me jalousent et se plaignent plus ou moins ouvertement du fait qu’il est sacrément pénible de cohabiter avec moi. Néanmoins, je n’ai pas le sentiment d’abuser de mon statut ni l’impression de bénéficier d’un favoritisme outrancier. Il me semble que nous sommes peu ou prou tous logés à la même enseigne.
 
Mon beau-père, homonyme du célèbre animateur du petit écran, est également une vedette, certes nettement moins médiatique et donc au rayonnement moindre. Il compte parmi les grandes figures de la spécialité, siégeant dans de multiples commissions, passant avec aisance de sa chaire professorale aux plateaux de télévision où il intervient régulièrement dans une émission de vulgarisation scientifique.
Ses publications savantes dans des revues prestigieuses, surtout son ouvrage sur le cancer du testicule qui fait référence aujourd’hui encore, lui valent une certaine notoriété. La description de sa technique opératoire du curage per-coelioscopique qui a révolutionné la chirurgie du cancer du rein lui permettra sûrement de laisser son nom à la postérité. Depuis ce coup d’éclat, il est continuellement à la pointe de l’innovation, dispensant des conférences dans le monde entier sur les avancées les plus récentes de sa spécialité.
À la Faculté, il est adulé par un important contingent d’externes éblouis par son charisme. Ces derniers le plébiscitent alors – ou peut-être parce – qu’ils éprouvent une sorte de crainte respectueuse en sa présence. Indubitablement, la crainte respectueuse qu’il inspire est aussi en partie due à sa carrure intimidante de déménageur, résultat d’une pratique impitoyable de l’aviron. Sa voix rocailleuse de basse profonde y participe également pour une certaine mesure. Il occupe invariablement une place de choix dans le classement des membres du corps enseignant que des carabins facétieux remettent infatigablement à jour. À chaque réactualisation, il demeure l’indéboulonnable « prof le plus classe », n’ayant strictement aucune chance de tenir le haut du pavé dans les catégories enviables du plus sexy, du plus sympathique ou du plus drôle.
Ses cours magistraux sont les plus populaires de la Faculté. L’amphithéâtre Gintrac Nord est généralement plein à craquer quand il les délivre. Le Professeur Martin est un orateur hors pair dont l’éloquence, dépourvue de toute coquetterie, attire les foules, doublé d’un excellent pédagogue aimant dispenser son savoir encyclopédique à l’aide de formules incisives. Il estime de son devoir de former correctement sur le plan intellectuel cette horde d’étudiants incultes.
Contrairement au Professeur Dumas qui manque dramatiquement d’autorité, le Professeur Martin n’a pas besoin de faire appel à l’appariteur chargé de la sécurité pour maintenir l’ordre. Sitôt qu’il monte à la tribune et tapote son micro du bout de son majeur recourbé, les bavardages, qui vont pourtant bon train, cessent presque instantanément. Même les aimables plaisantins, habituellement turbulents, l’écoutent avec une attention quasi religieuse dans un silence révérencieux. Dans cette salle bondée, on peut entendre une mouche voler. Si, par malheur, des chahuteurs, massés au dernier rang de l’auditorium dont ils réquisitionnent les places, tentent de semer la zizanie, le Professeur Martin se contente de les mitrailler d’un regard charbonneux et ils se calment comme par magie. Solidement campé derrière son pupitre sur ses jambes courtaudes un poil trop écartées, ses manches démonstrativement roulées au-dessus des coudes pour découvrir ses avant-bras aux muscles noueux, il domine l’auditoire de toute sa hauteur, jetant à peine un œil à ses notes.
 
Des internes frais émoulus aux chefs de clinique en dernière année, tous sans exception ne jurent que par le Professeur Martin. Il est la divinité devant laquelle ses disciples se prosternent. Comment pourrait-il en être autrement ? Son insolente maestria au bloc opératoire force assurément l’admiration, sa virtuosité dans les dissections délicates marquant durablement les esprits. En salle d’intervention, il demeure complètement imperturbable, conservant en toutes circonstances un calme patricien et une voix égale aux inflexions mesurées qui ne trahit aucune émotion particulière. Il n’y a pas le moindre indice de ce qu’il se passe derrière son front impavide. Ainsi remédie-t-il aux maladresses de ses élèves et corrige-t-il le tir en les remettant sur de bons rails – c’est à dire dans le bon plan de dissection – sans se départir de son flegme. Ce n’est pas en vain qu’il se targue d’être de la vi

Voir icon more
Alternate Text