226
pages
Français
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2017
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Ebook
2017
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Publié par
Date de parution
05 avril 2017
Nombre de lectures
3
EAN13
9782897582906
Langue
Français
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Date de parution
05 avril 2017
Nombre de lectures
3
EAN13
9782897582906
Langue
Français
Le ch timent de Clara
SERGINE DESJARDINS
Le ch timent de Clara
Guy Saint-Jean diteur
3440, boul. Industriel
Laval (Qu bec) Canada H7L 4R9
450 663-1777
info@saint-jeanediteur.com
www.saint-jeanediteur.com
Donn es de catalogage avant publication disponibles Biblioth que et Archives nationales du Qu bec et Biblioth que et Archives Canada
Nous reconnaissons l aide financi re du gouvernement du Canada par l entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) ainsi que celle de la SODEC pour nos activit s d dition. Nous remercions le Conseil des arts du Canada de l aide accord e notre programme de publication.
Gouvernement du Qu bec - Programme de cr dit d imp t pour l dition de livres - Gestion SODEC
Guy Saint-Jean diteur inc., 2017
dition: Isabelle Longpr
R vision: Isabelle Pauz
Correction d preuves: Johanne Hamel
Illustration de la page couverture: toile de Marie-Eve Lauzier (lauzierart)
D p t l gal - Biblioth que et Archives nationales du Qu bec, Biblioth que et
Archives Canada, 2017
ISBN: 978-2-89758-289-0
ISBN EPUB: 978-2-89758-290-6
ISBN PDF: 978-2-89758-291-3
Tous droits de traduction et d adaptation r serv s. Toute reproduction d un extrait de ce livre, par quelque proc d que ce soit, est strictement interdite sans l autorisation crite de l diteur. Toute reproduction ou exploitation d un extrait du fichier EPub ou PDF de ce livre autre qu un t l chargement l gal constitue une infraction au droit d auteur et est passible de poursuites p nales ou civiles pouvant entra ner des p nalit s ou le paiement de dommages et int r ts.
Imprim et reli au Canada
1 re impression, avril 2017
Guy Saint-Jean diteur est membre de
l Association nationale des diteurs de livres (ANEL).
Je d die cet ouvrage toutes les femmes d hier et d aujourd hui qui, partout dans le monde, sont accus es, culpabilis es, harcel es, fouett es, bannies, tortur es et emprisonn es parce qu elles ont t viol es.
L h ro ne de ce roman est un amalgame de toutes ces femmes.
AVERTISSEMENT
Afin de faciliter une meilleure compr hension et une lecture plus fluide, j ai parfois utilis des mots qui n taient pas d usage au XVII e si cle. Je ne crois pas avoir trahi pour autant le mode de pens e des gens de cette poque.
" Faire de la victime un coupable, il n y a rien de tel pour d monter une accusation .
J O L D ICKER
" Le viol reste le seul crime dont l auteur se sente innocent et la victime honteuse .
J EAN -C LAUDE C HESNAIS
Table des mati res
PREMI RE PARTIE
DEUXI ME PARTIE
TROISI ME PARTIE
PILOGUE
NOTE DE L AUTEURE
REMERCIEMENTS
PREMI RE PARTIE
Paris, 8 ao t 1688
Comment se fait-il que nous ne pressentions pas l arriv e des grands malheurs? Que des trag dies nous frappent au moment o nous nous y attendons le moins? Pourquoi sommes-nous diff rents des animaux, qui fuient l avance l endroit o leur vie risque d tre bris e par un tremblement de terre?
Si j tais un chien, ou un chat, ou un l phant, ou m me un oiseau, j aurais le bon sens de m enfuir loin d ici, mais contrairement eux, je n ai pas l ombre d un pressentiment. Mon premier geste, aujourd hui, est donc semblable celui que je pose tous les autres matins: j ouvre les volets et regarde le temps qu il fait. Les derni res lueurs rougeoyantes de l aube s effacent devant la claire luminosit du jour: ce sera l une des plus belles journ es de l t . Et pourtant! Aujourd hui est le premier jour d une enfilade d autres jours que je ne souhaiterais personne.
pas de loup, j entre dans la chambre de mon fils, C dric. Il dort avec cet air ang lique qu ont les jeunes enfants dans leur sommeil. J ignore encore que dans quelques mois, le souvenir de mon enfant endormi comme un ange me donnera la force de me battre pour survivre. Je caresse sa joue avec un doigt, replace ses couvertures et descends la cuisine, o je me sers un th , que je bois petites gorg es, debout devant la fen tre.
Tout est silencieux et calme dans la maison. Je pense Nathaniel, mon poux: o a-t-il dormi? Son m tier de chirurgien itin rant l am ne de village en village travers toute la France, au grand dam de son p re, Georges d Angennes, professeur m rite de la Facult de m decine de Paris, qui aurait bien aim que son fils suive ses traces ou, tout le moins, exerce Paris. Combien de fois a-t-il r p t Nathaniel qu aller ainsi, par monts et par vaux, il risquait d tre attaqu par des loups ou de rencontrer des voleurs de tous poils qui n h siteront pas lui planter un couteau dans le c ur afin de le d trousser? Mon poux et moi nous moquons de ses proph ties de malheur, comme nous nous moquons du fait que mon beau-p re refait son testament chaque fois qu il s loigne de quelques lieues de sa maison. Pour lui, voyager un tant soit peu est synonyme de grand danger.
Insensible aux craintes paternelles, Nathaniel r torque que bien des campagnards n ont pas acc s, comme Paris, aux soins d un bon chirurgien et sont, par cons quent, la merci des charlatans ou d ignorants chirurgiens-barbiers. Je ne doute pas un instant de la noblesse des motifs de mon poux, mais je sais aussi qu il aime la libert que lui procure cette vie de nomade. Je ne m en plains pas trop, car j appr cie la solitude. J anticipe d ailleurs avec joie le fait que je serai seule la maison aujourd hui. Id ride, ma cuisini re, est aupr s de sa m re malade et j ai donn cong Cadie, ma servante, afin qu elle puisse participer une procession religieuse extraordinaire. Quant mon fils, j irai le conduire chez mes grands-parents maternels, o il doit passer une quinzaine de jours. Deux ou trois fois par ann e, C dric se fait une f te de s journer chez sa mamie et son papi, ainsi qu il les appelle. Je l entends justement qui descend l escalier et vais sa rencontre.
Il tend les bras aussit t qu il me voit et demande:
- Est-ce qu on va bient t chez mamie et papi?
Cette pens e, avec laquelle il s est endormi, l a poursuivi jusqu au matin. Je l embrasse en riant et r ponds:
- Oui, mais on mange d abord, ensuite on va pr parer les effets que tu veux apporter et on partira imm diatement apr s.
Je le prends dans mes bras et embrasse de nouveau ses joues rondes encore marqu es par le sommeil. Il pose ses mains potel es autour de mon visage et me sourit. Ce geste, pourtant r p t mille fois, fait toujours fondre mon c ur.
D s que nous sortons de la maison, les bruits de Paris nous cernent de toutes parts. Le tintamarre des cloches, les voix tonitruantes des marchands m l es celles des passants, le pr tre qui r cite son credo d une voix vibrante, les claquements des sabots tapageurs, les sons des trompettes, le vacarme des carrosses roulant vive allure, tous ces sons enchev tr s masquent peine les paroles des comm res qui hurlent pour se faire entendre. Toutes les personnes que je rencontre me saluent en souriant. Depuis que j habite ce quartier, je me sens respect e, aim e m me. Si je savais que, bient t, ces marques d amiti me manqueraient autant que de l eau dans le d sert, je pr terais encore plus d attention tous ces gens.
Le soleil est d j son z nith lorsque nous marchons en direction de l auberge de mes grands-parents, situ e trois rues plus loin. Nous croisons milien, leur employ , qui, tirant une charrette remplie de mets de toutes sortes, crie et d bite cette marchandise en plein air. Il me salue en rougissant, mais ne prononce pas un seul mot: cause de son cheveu sur la langue, parler le rend mal l aise. Avant que je ne me fiance avec Nathaniel, mon grand-p re me taquinait souvent: " milien est amoureux de toi! Je n y croyais gu re jusqu ce que je remarque que cet homme perd effectivement toute contenance d s qu il me voit. Mes grands-parents auraient aim que je l pouse, car ainsi, j aurais t chaque jour aupr s d eux.
En approchant de l auberge, nous entendons le crieur qui, plac devant la porte, annonce le vin que mon grand-p re tire de ses vignobles. Je souris d entendre C dric commenter tout ce qu il voit. Ma grand-m re, qui s extasie souvent de l entendre parler, r p te qu elle n a jamais connu un enfant qui, comme mon fils, s exprime aussi clairement, et souvent mieux, qu un adulte. J aime penser que j y suis pour quelque chose: je lui ai lu un nombre incalculable d histoires et lui ai m me d j appris crire quelques mots.
- Papi l a chang e! s exclame-t-il en pointant du doigt l enseigne de l auberge Le Lion d Or, sur laquelle est peint un lion tenant un bouchon entre ses pattes.
- Oui, et elle est tr s belle, dis-je en me penchant pour l embrasser sur la joue.
J ai, mille fois par jour, des lans de tendresse qui me poussent le cajoler. Je mesure pleinement ma chance: un enfant sur quatre meurt avant l ge d un an. Je suis remplie de gratitude parce que C dric a d pass cette tape cruciale depuis plus de trois ans. Certes, il n est toujours pas l abri de maladies mortelles et je m en inqui te souvent, mais je me f licite de ne pas l avoir mis en nourrice: plusieurs en reviennent malades, infirmes, estropi s. D autres n en reviennent jamais et meurent loin de leurs parents.
Je me sens heureuse. Mon pas est toujours plus l ger quand je marche avec mon fils.
Marguerite, ma grand-m re, balaie l entr e de l auberge, l air soucieux. D s qu il l aper oit, C dric l che ma main et court se jeter dans ceux de sa mamie, qui l accueille en le couvrant de baisers.
- Comme tu as grandi, mon petiot, s exclame-t-elle en sachant que ce compliment lui fait d autant plus plaisir qu il veut devenir aussi grand que son p re, un colosse qui d passe tout le monde d au moins une t te.
Ma grand-m re est une femme vive, joyeuse, intelligente et affectueuse. C est en l observant que j ai appris m