Gilles de Cesbres
260 pages
Français

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Gilles de Cesbres , livre ebook

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Description

Delly (1875-1947) (1876-1949)



"Pasca éleva entre ses mains la blanche soierie, et un rayon de soleil, glissant à travers les branches enchevêtrées des vieux hêtres, vint caresser la chatoyante moisson fleurie jetée sur l’étoffe souple par la main de la jeune brodeuse. Campanules, muguets, légères jacinthes, fraîches roses pompon semblèrent un instant, sous ce rapide jeu de lumière, vivre et palpiter, tandis que la brise tiède, venue des profondeurs du bois de Silvi, complétait l’illusion en apportant un délicat parfum de fleurettes cachées.


Un sourire de satisfaction entrouvrit les lèvres de Pasca. Ses yeux noirs, veloutés, dont l’expression était singulièrement profonde, contemplèrent pendant quelques minutes son œuvre. Puis elle étendit sur ses genoux la feuille de soie et pencha vers elle, pour l’examiner dans tous ses détails, sa tête délicate, qui semblait supporter avec peine le poids d’une souple et magnifique chevelure d’un blond chaudement doré, dont une partie retombait sur la nuque et jusque sur le cou élégant que découvrait le col du très simple corsage blanc.


– Je crois que ce sera joli, murmura-t-elle."



Romance.


Suite à un accident, Gilles de Cesbres et Matty, la fille de son cousin François de Combayre, sont hébergés par Pasca et son grand-père. Gilles comprend bientôt que Pasca n'est autre que la fille aînée, née d'un premier mariage resté secret, de François. Il tombe sous son charme... C'est sans compter sur la jalousie de Matty...

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 05 mai 2023
Nombre de lectures 0
EAN13 9782384422258
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,0015€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

Gilles de Cesbres


Delly


Mai 2023
Stéphane le Mat
La Gibecière à Mots
ISBN : 978-2-38442-225-8
Couverture : pastel de STEPH'
lagibeciereamots@sfr.fr
N° 1223
I

Pasca éleva entre ses mains la blanche soierie, et un rayon de soleil, glissant à travers les branches enchevêtrées des vieux hêtres, vint caresser la chatoyante moisson fleurie jetée sur l’étoffe souple par la main de la jeune brodeuse. Campanules, muguets, légères jacinthes, fraîches roses pompon semblèrent un instant, sous ce rapide jeu de lumière, vivre et palpiter, tandis que la brise tiède, venue des profondeurs du bois de Silvi, complétait l’illusion en apportant un délicat parfum de fleurettes cachées.
Un sourire de satisfaction entrouvrit les lèvres de Pasca. Ses yeux noirs, veloutés, dont l’expression était singulièrement profonde, contemplèrent pendant quelques minutes son œuvre. Puis elle étendit sur ses genoux la feuille de soie et pencha vers elle, pour l’examiner dans tous ses détails, sa tête délicate, qui semblait supporter avec peine le poids d’une souple et magnifique chevelure d’un blond chaudement doré, dont une partie retombait sur la nuque et jusque sur le cou élégant que découvrait le col du très simple corsage blanc.
– Je crois que ce sera joli, murmura-t-elle.
Ses doigts agiles et fins se mirent en devoir de plier l’étoffe soyeuse. Quand elle l’eut enveloppée dans une toile blanche, elle la posa près d’elle, sur le vieux banc de pierre, puis, croisant ses mains sur ses genoux, laissant son regard mélancolique et grave errer autour d’elle, Pasca parut s’absorber dans une songerie profonde.
Elle se trouvait dans une petite clairière, son lieu de prédilection, où chaque jour, quand elle le pouvait, elle venait travailler quelque temps. Un vieux banc était là, scellé au mur de l’antique oratoire qui abritait la statue vénérée de la Madonna del Fiore. Ce sanctuaire délabré avait une parure que d’autres plus somptueux eussent pu lui envier ; il disparaissait littéralement sous les roses. Celles-ci l’avaient pris d’assaut depuis la base jusqu’au faîte, elles se glissaient à l’intérieur par d’étroites fenêtres veuves de vitraux, s’avançaient sur le vantail de chêne à demi pourri par les intempéries, s’étendaient en longues traînes le long des colonnes du petit porche, et jusque sur le sol, envahissaient même le banc verdi où s’asseyait Pasca... Et bien loin, dans le bois, se répandait le parfum suave et enivrant de toutes ces roses.
Pasca tenait de sa mère cette prédilection pour le vieil oratoire. Angiolina Neraldi venait aussi, étant jeune fille, travailler et rêver au milieu des roses... Et c’était ici qu’un jour, tandis que sa voix souple chantait une tarentelle, lui était apparu un élégant cavalier blond – un Français égaré dans le bois de Silvi. Il lui avait demandé son chemin, et Angiolina lui avait donné les indications nécessaires, intimidée et charmée à la fois par l’admiration qu’il ne pouvait dissimuler devant la fine beauté de cette enfant de Toscane.
Le lendemain, il était venu, sous un prétexte quelconque, chez le père d’Angiolina, instituteur au petit village de Menafi. Voulant, disait-il, peindre quelques coins charmants du bois de Silvi, il désirait avoir un logement dans le village. Paolo Neraldi lui trouva une chambre chez le barbier... Le Français était aimable et de conversation charmante. Paolo aimait à causer avec des gens intelligents et instruits, qui manquaient un peu à Menafi. Sans songer plus loin, il attirait volontiers l’étranger chez lui, et il tomba de haut le jour où celui-ci lui dit :
– La signorina Angiolina et moi, nous nous aimons. Voulez-vous, signore, qu’elle soit ma femme ?
Ébloui, Paolo dit oui aussitôt. Le Français était riche, il appartenait à une noble famille. Quel rêve pour Angiolina !
Le mariage se fit très simplement, et les jeunes époux demeurèrent ensuite à Menafi. François de Combayre n’avait pas fait connaître son union à l’oncle qui l’avait élevé – son seul proche parent – et il retardait toujours le moment où il lui faudrait rentrer en France, présenter à sa parenté et à ses connaissances la jeune Italienne, dont la beauté et une certaine dose d’instruction ne compenseraient pas aux yeux de ses aristocratiques relations les manières un peu rustiques, l’ignorance des usages et une timidité excessive qui annihilait en certaines occasions toutes ses facultés.
Enfin, six mois après le mariage, comme il recevait de son oncle des lettres de plus en plus étonnées, il se décida à partir pour la France, heureux, au fond, de quitter ce pays qui l’avait enthousiasmé d’abord, et qui devenait maintenant insupportable à ce versatile par excellence.
– Dans peu de temps, je viendrai te chercher, cara mia, dit-il en embrassant sa femme qui sanglotait. Mon oncle t’accueillera comme un père, tu verras, et nous nous installerons en France, à Paris, la ville unique.
Il écrivit tout d’abord deux semaines de suite. Puis les lettres s’espacèrent, se firent plus brèves, très froides. Enfin elles cessèrent. Angiolina comprit alors qu’elle était abandonnée par cet étranger, qui l’avait épousée en un de ces moments d’emballement dont il était coutumier.
Elle n’eut pas une récrimination, pas une parole de colère. Mais elle se mit à dépérir rapidement, minée par son amère douleur, et le jour qui vit naître la petite Pasca fut aussi celui de sa mort.
Paolo Neraldi avait toujours été un homme faible, imprévoyant, et c’était bien vraiment à son imprudence et à son trop prompt enthousiasme pour cet étranger que pouvait être imputé le malheureux mariage de sa fille. Mais le pauvre père était si profondément frappé, que personne, à Menafi, n’eut l’idée de rappeler ses torts, surtout en le voyant entourer de soins touchants la très frêle petite fille que la morte lui avait laissée.
Il se refusa à faire connaître à M. de Combayre le décès d’Angiolina et la naissance de Pasca. Ce fut le curé qui assuma cette tâche. Une lettre de François arriva peu après, lettre très embarrassée et très sèche, où il annonçait l’envoi trimestriel d’une pension pour l’entretien de l’enfant.
Par l’intermédiaire du curé, Paolo lui fit répondre qu’il n’avait pas besoin de son argent et que, puisqu’il avait abandonné la mère, lui, l’aïeul, se chargeait de l’enfant, que son père n’aurait probablement jamais le désir de connaître.
De fait, on n’entendit plus parler de François de Combayre. Ainsi qu’il avait délaissé l’épouse aimée pendant quelques mois, il abandonnait, avec la même désinvolture, la petite Pasca à son beau-père, dont les ressources pécuniaires étaient cependant fort modestes.
Malgré cela, Paolo fit élever soigneusement l’enfant dans un excellent couvent de Florence. Quel que fût son ressentiment contre le père, il n’oubliait pas qu’un sang aristocratique coulait dans les veines de Pasca et ne voulait pas qu’elle fût élevée comme les petites artisanes de Menafi.
Était-ce là imprévoyance ou sagesse ? Il eût été difficile de le dire, car nul ne pouvait prévoir le destin de cette descendante de patriciens et de simples villageois. En tout cas, il se trouva que cette éducation s’adapta merveilleusement à la nature délicate et très affinée de Pasca. L’enfant était réellement patricienne d’instinct.
Longtemps, elle s’était crue complètement orpheline. Ce fut seulement un peu après sa sortie du couvent que son aïeul, au cours d’une maladie dont il pensa mourir, lui révéla l’existence de son père, en s’étendant amèrement sur les torts dont celui-ci était coupable.
Pasca avait été jusque-là une enfant très gaie, et ses dix-sept ans ignoraient encore les tristes dessous de l’humanité. À dater de cette révélation, elle parut avoir mûri de plusieurs années. Ses grands yeux noirs reflétèrent à demeure une mélancolie pensive et une gravité au-dessus de son âge. Sa pitié, déjà très profonde, s’accentua encore, elle partagea désormais son temps entre le travail et le soin des pauvres, en refusant toutes les distractions dont, jusque-là, elle avait pris sa part avec quelque plaisir.
– Elle entrera au couvent, disait-on dans le village.
– Ma foi, elle ferait bien ! Pour tomber aussi mal que sa mère, la pauvre ! ripostaient quelques-uns.
– Bah ! elle trouverait tout de même de bons garçons ! Voyez Rino Baddi, qui en est amoureux fou !... Et Giovanni Averri, donc ! En voilà un beau parti pour elle !
Rino Baddi était le fils d’un riche cultivateur de Menafi. Giovanni Averri, lui, était un jeune professeur de belle tournure et de grand avenir, dont les parents possédaient une petite propriété aux portes du village. Tous deux, en effet, étaient éperdument épris de Pasca, si belle, plus belle encore que ne l’avait été sa mère et plus affinée, physiquement et intellectuellement. Presque en même temps, ils l’avaient demandée en mariage. Mais Pasca, qui paraissait toujours complètement indifférente à l’admiration qu’elle suscitait, avait refusé tout net en déclarant qu’elle ne voulait pas se marier.
– Pourtant, cara mia, si je m’en allais ?... Je serais tellement désolé de te laisser seule ! hasardait le vieux Paolo, à qui Giovanni plaisait beaucoup.
– Ne craignez rien, grand-père, je me retirerais dans un couvent. Mais le bon Dieu vous laissera certainement longtemps encore à votre petite Pasca.
L’aïeul n’avait osé insister. Sa petite-fille était pour lui une idole, une créature supérieure, et sa faible nature cédait sans peine à l’ascendant de ce caractère sérieux et singulièrement énergique sous une apparence d’inaltérable douceur.
... À quoi donc songeait Pasca, durant ces longs instants de rêverie près de la vieille chapelle ?... C’étaient, certainement, des pensées graves, tristes même, car une mélancolie profonde voilait les beaux yeux sombres, et la bouche délicatement modelée prenait un pli d’amertume étrange chez une si jeune créature.
À l’ordinaire, rien ne venait troubler sa solitude. Le bois de Silvi, qui s’étendait derrière le jardin de la maison de Paolo, n’était fréquenté que par quelques bûch

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