440
pages
Français
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2013
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Ebook
2013
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Publié par
Date de parution
01 novembre 2013
Nombre de lectures
94
EAN13
9782812916038
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
4 Mo
Publié par
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01 novembre 2013
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94
EAN13
9782812916038
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Français
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BRIAND - BRUGÈS
DE ROSA - DÉBORDES
lesmystères
d’AUVERGNE
Histoires insolites, étranges, criminelles et extraordinaires
De BoréeLES MYSTÈRES
D’AUVERGNEROGER BRIAND, DANIEL BRUGÈS,
ROBERT DE ROSA, JEAN DÉBORDES
LES MYSTÈRES
D’AUVERGNE
De BoréeEn application de la loi du 11 mars 1957,
il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement
le présent ouvrage sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français
d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.
© De Borée, 2013PREMIÈRE PARTIE
Religions, croyances,
légendes et diablerieseNotre-Dame de Marsat , bois et cuivre doré, XII siècle.
(Photographie de Robert de Rosa.)Chapitre I
Les vierges noires, reines d’Auvergne
I LES PUYDÔMOIS vénèrent leur monarque absolu, le puy de S Dôme, ils se placent avec ferveur sous la protection de
divinités d’une majesté énigmatique. Leur territoire déborde largement
le département, mais elles y sont bien représentées. Les vierges
noires, comme les sources auxquelles elles sont liées, surgissent
de cette terre volcanique pétrie d’eau et de feu. Perséphone, dont
le christianisme n’a pu chasser la noirceur, vit toujours sous le
manteau de la Vierge. Elle accueille, avec bienveillance, la ferveur
qui naît d’une longue pratique, bien avant qu’elle ne porte ce nom.
Ses cousines, ses sœurs, ses filles se sont installées près des
souffrances des hommes, apportant ce qui est indispensable à la vie :
le réconfort et l’espérance.
Une majesté tendre à Marsat
Croyant ou non, personne ne peut rester insensible à la présence
silencieuse de la vierge de Marsat . Une présence qui remplit tout le
modeste édifice qui l’abrite. Assise sans raideur sur son simple banc,
elle présente et protège son fils de ses mains immenses. Le bois
bardé de cuivre doré souligne la noirceur du visage et des mains.
Quel sculpteur a modelé avec génie cette expression grave, sereine
et tendre tout à la fois ? La chevelure ramenée sous le voile doré ne
dissimule aucun des traits qui rappellent un type méditerranéen
9LES MYSTÈRES D’AUVERGNE
du Sud : le nez long et droit, des yeux ouverts sur l’insondable, des
amorces de rides, celles que l’amour des mères dessine une fois
les enfants devenus grands, un léger pli tombant aux commissures
des lèvres, celui que marquent des années de tendre patience. Nous
sommes bien devant une reine sans couronne. Intimidé, on se prend
à chuchoter ; pour un peu on se mettrait à genoux. C’est toujours
avec un peu de gêne que l’on s’éloigne en décidant d’interrompre
ce dialogue silencieux.
Comme beaucoup de ses consœurs, cette statue succède sans
doute à une plus ancienne. Celle-ci est datée, sans plus de
préciesion, du XII siècle. Grégoire de Tours mentionne un culte marial
edès le VI siècle, autour de reliques indéterminées. Il rapporte aussi
deux miracles attribués à sa présence.
Les ouvriers, maladroits ou fatigués, n’arrivaient pas à
construire cette église pourtant modeste. La législation du travail
étant fort limitée à cette époque et les chambres artisanales plus
qu’embryon naires, les travaux traînaient en longueur. Sur le
chantier trop souvent déserté, les échafaudages brinquebalaient, les
pierres se recouvraient de mousse… Peu à peu les maçons,
morteliers, charpentiers partaient cultiver leurs choux. Pourtant il fallait
bien en finir, ne serait-ce que pour toucher le maigre salaire promis
par contrat. Quelle ne fut pas leur surprise, un beau jour, en
revenant sur les lieux de leur travail : l’édifice était quasiment achevé
et, plus étonnant encore, c’étaient les enfants qui l’avaient réalisé,
guidés par la mystérieuse dame noire.
Le second phénomène miraculeux frappa tout autant les
imaginations. En ces temps reculés, la journée commençait au lever du
soleil et s’achevait à son coucher. Seuls la pâleur des chandelles,
la fumeuse clarté des lampes et le rougeoiement du feu trouaient
l’obscurité. Quand on vit la chapelle illuminée toute la nuit sans
que personne n’y soit entré avec une lanterne ou une torche,
il fallut se rendre à l’évidence. Une lumière surnaturelle rayonnait
à l’intérieur… celle qui irradie sur la robe de la dame de Marsat
et qu’elle conserve sous la noirceur de son teint. Il faut ajouter à
son actif l’arrêt de l’épidémie de peste qui a dévasté la région. Une
procession qui remonte à 1631 se déroule encore de nos jours pour
commémorer l’événement. Non seulement la vierge est portée au
dehors, mais une roue sur laquelle est enroulée une chandelle
10Les vierges noires, reines d’Auvergne
dont la longueur représente le trajet Riom Marsat l’accompagne.
Cette roue est toujours suspendue dans l’église entre ses sorties
processionnaires. La datation, l’existence d’une communauté de
bénédictines à Marsat, filiale peut-être du monastère de Mozac,
laissent penser à un culte marial très ancien et renommé. Deux
errois sont venus se prosterner devant elle : Louis XI et François I …
J’imagine que le premier implora sa protection et rajouta
des médailles à son chapeau ; le second dut rendre hommage à
sa beauté.
La grande reine de Marsat n’est pas la seule à produire des
miracles. Ses sœurs en font autant. Souvent c’est leur découverte
même qui est miraculeuse. Il n’est pas inutile d’en préciser les
circonstances tant leur répétition conduit à placer ces statues votives
sur un autre plan que celui de la seule historicité scientifique.
Celles qui sont présentées à la dévotion des fidèles aujourd’hui
n’affichent pas l’ancienneté de leurs origines. Bien des statues
romanes n’ont pas résisté à l’usure du temps et à la cupidité ou à la
fureur des hommes. Quand ce ne sont pas les huguenots qui les ont
brisées, c’est la tempête révolutionnaire qui les a englouties. Mais
la mémoire des hommes de foi n’accorde que peu d’importance à
l’histoire. Elle s’appuie sur un fonds intemporel et inconscient, des
fondations maçonnées d’espoirs et cimentées de peurs, autrement
dit indestructibles. Massacrées, brûlées, noyées par des fanatiques
fous de Dieu ou de liberté, elles reparaissent. Si leurs traits ont
changé, la noirceur demeure.
Les sœurs de l’eau et du feu
À Clermont-Ferrand , dans la basilique Notre-Dame-du-Port, la
evierge de tendresse est une réplique du XVIII siècle de la statue
dise eparue, datant probablement du X ou du XI siècle. Saillens rapporte
qu’elle fut trouvée dans le puits qui existe toujours dans la crypte.
Toujours à Clermont-Ferrand , mais dans la cathédrale cette fois,
des travaux dans la crypte permirent de découvrir une autre vierge
noire en 1974. Complètement oubliée parce qu’aucun culte
particulier ne s’y rattachait, elle a été restaurée en gardant, toutefois,
11LES MYSTÈRES D’AUVERGNE
la sombre couleur du visage et des mains. Elle attend les fidèles
derrière l’autel, dans une chapelle du chevet.
L’église de Besse en Chandesse abrite pendant une partie de
el’année une vierge noire qui ne date que du XIX siècle. La
précédente disparut pendant les événements révolutionnaires de la fin
edu XVIII . Ici c’est auprès d’une source que la première statue fut
découverte. C’est une vierge « nomade » qui partage son séjour
entre Besse et la petite chapelle de Valcivières dans les hauts
pâturages. Elle y monte le 2 juillet avec les troupeaux, les bergers, c’est
« la montade », et elle en redescend le 21 septembre dans la même
compagnie, c’est « la dévalade ». Perséphone l’automne et l’hiver,
Korê au printemps et à l’été… On raconte toujours comment, il y a
bien longtemps, un marchand frappé de cécité a recouvré la vue en
lui promettant d’être « roy de dévotion ».
Dans la chapelle de la Font-Sainte, à Égliseneuve-d’Entraigues,