Le Plaisir de la musique
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Le Plaisir de la musique , livre ebook

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Description

Pourquoi la musique provoque-t-elle autant d’émotions en nous ? Dans son nouveau livre, Bernard Lechevalier nous propose de nous aventurer avec lui dans l’analyse de la musique et des états affectifs qu’elle suscite. S’appuyant sur les découvertes les plus récentes en neuropsychologie, il nous montre notamment que la perception musicale relève d’un processus complexe qui engage la structure de l’œuvre elle-même, les associations d’idées et d’affects qu’elle fait naître et, enfin, le contexte de son interprétation et de son écoute. De Beethoven à Brassens en passant par Debussy et Duke Ellington, une exploration du plaisir musical, tous genres confondus, à partir des émotions qu’elle procure et du sens qu’elle véhicule. Le plaisir musical aux trois stades de la création, de l’interprétation et de l’écoute, sans séparer musique classique, variété ou jazz ! Bernard Lechevalier est neurologue, professeur émérite de neurologie à l’université de Caen. Il a présidé la Société française de neurologie et la Société de neuropsychologie de langue française. Membre de l’Académie nationale de médecine, il y coordonne un groupe de travail en neuropsychologie. Ayant siégé dans la commission nationale de l’Inserm, il a contribué à la création d’une unité de recherche dans ce domaine et à l’édification à Caen du centre de recherches Cyceron connu aujourd’hui internationalement. Par ailleurs organiste classique, il a bénéficié de l’enseignement de grands maîtres parisiens. Il a notamment publié Le Cerveau de Mozart et Le Cerveau mélomane de Baudelaire. 

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 29 mai 2019
Nombre de lectures 15
EAN13 9782738144867
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Informations légales : prix de location à la page 0,0850€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , JUIN  2019 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-4486-7
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
À Jean Cambier.
Préface

Je ne me suis jamais vraiment interrogée sur le pourquoi je suis devenue musicienne, sur cette nécessité impérieuse à laquelle il m’aurait été impossible de résister. Le chemin était là, secret mais certain, et il ne s’agissait que de le suivre. Mais ce livre m’a plongée plus directement dans ces questions, sans doute fondamentales pour un musicien qui, s’il ne se formule pas toujours directement les choses comme c’est le cas pour moi, les ressent très fortement.
La recherche de la beauté de la musique, ou de sa relation étroite avec nos émotions, est sans doute ce qui nous guide dans ce choix-là. Enfant, entendant mes premiers concerts, ou profitant du passage de brillants amis musiciens à la maison, j’ai souvenir d’un éblouissement absolu qui ne m’a depuis pas quittée. Dès lors, je n’ai eu de cesse que cette quête : pourquoi l’œuvre de Bach pour orgue est-elle si belle ? Pourquoi le son du violoncelle nous émeut-il tant ? Pourquoi l’invraisemblable virtuosité d’un Maurizio Pollini nous sidère-t-elle autant ? Comment Schubert, Stravinsky, Ravel ou Rameau atteignent-ils le fond de notre âme ? Percer ce mystère, s’engloutir dans l’océan des chefs-d’œuvre me semblait l’unique vie possible, car la musique est la seule qui puisse nous apaiser.
Quand mon oncle Bernard Lechevalier m’a proposé d’écrire la préface de ce livre Le Plaisir de la musique , j’ai tout de suite accepté, tant je suis fascinée par l’homme, sa double appartenance à la musique et à la médecine, sa curiosité insatiable, son inextinguible ouverture d’esprit doublée d’une intelligence brillante et sensible aux autres. Bénéficiant d’une formation musicale classique dans son conservatoire de région, complétée auprès de deux organistes prestigieux, André Marchal et Michel Chapuis, il est titulaire de l’orgue de l’église Saint-Pierre de Caen. Mais il est également professeur de neurologie et chef de service hospitalier. À ce titre, il a attiré l’attention sur les troubles de la perception et du plaisir de la musique chez des patients cérébrolésés.
Grâce aux études qu’il a menées avec ses collaborateurs, la neuropsychologie de la musique est devenue un axe privilégié d’une unité de recherches universitaire. Ses réponses ô combien éclairées à toutes ces interrogations, ses explorations médicales, qui m’ont initiée à l’approche scientifique à laquelle je n’étais pas habituée, son regard questionnant et bienveillant font de ce livre un ouvrage passionnant, qui m’a amenée à m’arrêter un instant sur ma route d’interprète, pour essayer peut-être de mieux la partager.
Emmanuelle H AÏM , chef d’orchestre et fondatrice du Concert d’Astrée.
INTRODUCTION
« La musique doit humblement chercher à faire plaisir… »

Voici une phrase en apparence bien banale que je n’aurais peut-être pas placée en tête de ce livre si elle n’avait été prononcée par Claude Debussy . Au cours d’un entretien avec le musicologue Paul Landormy , il ajouta : « Il faut que la beauté soit sensible , qu’elle nous procure une jouissance immédiate, qu’elle s’impose ou s’insinue en nous sans que nous ayons aucun effort à faire pour la saisir. » Même si elle n’est tirée que d’une interview, rapportée dans Monsieur Croche, elle a le mérite d’attribuer au plaisir musical l’intention première de cet art.
Certes, le plaisir, heureusement, tout le monde sait de quoi il s’agit. En fait, ce terme traduit des états de conscience de bonheur, de bien-être, d’optimisme, de jouissance communs à toute l’humanité, mais il le fait de façon différente selon de multiples facteurs individuels ou collectifs. Concernant la musique, on peut se demander quels sont ses rapports avec les émotions et quels ensembles de stimuli auditifs le font naître. La courte observation ci-dessous illustre cette question et pourra être le point de départ de nombreuses discussions dont l’examen constituera la trame de cet ouvrage.
Il y a quelques années, un couple d’amis médecins venait d’entrer en fonction dans le secteur de Cherbourg ; ils nous invitèrent à venir voir leur nouvelle installation dans un petit village du Cotentin et à faire la connaissance de leurs parents venus exceptionnellement de Tel-Aviv. Ils ajoutèrent que leur père ne se déplaçait jamais sans sa mandoline. Modeste amateur, il fut heureux de trouver en moi le possible accompagnateur au piano de la réduction d’orchestre du Concerto pour deux mandolines de Vivaldi . Notre ami médecin possédait lui-même une mandoline et devint le second intervenant. Dès la fin de la première page, alors que je n’avais jamais rencontré ce monsieur, nous nous mîmes à discuter du style du morceau, de la façon de jouer les ornements, de faire des nuances. Comme si nous étions de vieux amis habitués à jouer ensemble, nous fûmes vite d’accord sur la meilleure interprétation à donner à cette pièce qui demeure pour moi un grand moment. Pourquoi ce concerto de Vivaldi m’avait-il tant ému au point d’en garder un souvenir précis plusieurs années plus tard ? La musique elle-même en est sans doute la principale raison, inhabituelle du fait des sonorités discrètes mais claires de ces deux instruments à cordes qui souvent dialoguaient, mais ce n’était pas la seule source du plaisir ; la structure de l’œuvre en constituait une deuxième tout aussi importante, opposant ses premier et troisième mouvements : des allegros , dynamiques et bien rythmés, à un admirable andante central, une sérénade vénitienne un peu mélancolique confiée aux seules mandolines, accompagnées seulement par une sorte d’ ostinato des cordes, réduites ce soir-là au piano. Ne serait-ce pas aussi une autre variété de plaisir que ces liens qui s’étaient créés spontanément au service de cette œuvre avec des personnes dont j’ignorais tout quelques minutes plus tôt ? Comme à eux qui venaient de si loin, je pensais à Vivaldi , le « prêtre roux », auteur de plus de quatre cents concertos, harassé par les demandes de ses insatiables collègues du clergé de Saint-Marc de Venise pour qui il devait travailler jour et nuit, et qui dut se retirer incognito à Vienne où il mourut oublié, solitaire et misérable. Il aurait sans doute été étonné d’apprendre qu’un de ses concertos avait été enseigné au pays du Grand Turc, qu’il avait gagné la terre de Moïse et qu’il était devenu une source d’émotions dans un village reculé du royaume de France. C’est donc en raison de plusieurs facteurs que je garde un souvenir ému de cette rencontre.
Si j’ai choisi d’ouvrir ce livre par cet épisode, c’est pour montrer que la perception de la musique et le plaisir qu’elle fait naître relèvent de processus fort complexes qui ne tiennent pas qu’à la structure de l’œuvre elle-même, mais aussi à des associations d’idées et d’affects, et au contexte de son interprétation et de son écoute. Avant cette journée mémorable, nous avions eu l’occasion de prendre en charge, dans notre service de neurologie du CHU de Caen, des patients atteints de troubles de la perception de la musique en rapport avec des lésions cérébrales acquises, vasculaires le plus souvent, qui firent l’objet d’un rapport, présenté au Congrès de psychiatrie et de neurologie de langue française en 1985, édité par la suite. L’examen de ces patients et d’autres malades examinés depuis, joint aux données de la littérature médicale, nous ont permis de constater que de tels troubles perceptifs (ou amusies) s’accompagnaient le plus souvent de perte du plaisir de l’écoute musicale, mais que ces troubles pouvaient être partiels ou, si l’on préfère, dissociés, ce qui nous a conduit à distinguer a contrario dans la perception du plaisir musical trois niveaux.
Pourquoi et comment la musique nous touche-t-elle ? Pourquoi l’aimons-nous ? J’envisagerai ici la musique comme un tout, à savoir le plaisir procuré par la création, l’interprétation, l’écoute d’un objet sonore résultant de l’organisation de sons, ne séparant pas musique classique et musique contemporaine, musique de variété ou de jazz. Je n’exclus pas la musique en tant que réjouissance populaire, qui existe depuis des milliers d’années. Cette « musique-action » est intimement liée à la danse, on peut imaginer qu’elle est inscrite dans les gènes d’ Homo sapiens . Sans doute exista-t-elle avant le langage : la prosodie a précédé la phonétique, des cris modulés ou chantés ont pu représenter un moyen de communication antérieur au langage articulé.
Je ne souscris pas à l’opinion selon laquelle la musique n’exprime rien. Pour moi, elle veut toujours dire quelque chose : tantôt, elle le dit explicitement, l’auditeur suit le « mode d’emploi » fourni par un titre ou un contexte évocateur ; ailleurs, ce qu’a voulu dire l’auteur n’est pas clairement exprimé. Schématiquement, on peut dire de la plupart des œuvres instrumentales écrites avant la période romantique que, sauf exceptions (musique religieuse, musique vocale), elles se présentent « toutes nues » : rien n’indique l’état d’âme du compositeur, elles nous touchent par leur seule beauté, c’est bien là leur intention. En revanche, depuis Beethoven , celui qui compose n’hésite pas à nous parler de lui, allant même jusqu’à nous faire entrer dans son intimité.
Bien sûr, nous ne so

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