Pour une histoire culturelle de l art moderne : Le XXe siècle
1493 pages
Français

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Description

L’art moderne du XXe siècle trouve son unité dans le refus de l’académisme et les innovations successives. De l’éblouissement devant les arts primitifs, qui unit Matisse et Picasso aux expressionnistes, naissent les révolutions du cubisme et de la peinture abstraite. Les deux guerres mondiales viennent ensuite, chacune à sa manière, enrichir la vision de la contre-culture artistique, avec les mouvements dadaïstes et surréalistes, mais aussi le travail de Miro, Dubuffet, l’école de New York, Bacon ou Cobra. Depuis les années 1970, pourtant, face aux conquêtes et aux extensions renouvelées de l’art moderne, se multiplient les ruptures d’un autre ordre. Dès lors, l’art contemporain n’est-il pas devenu une nouvelle forme d’académisme ?Pierre Daix est l’auteur de plus d’une vingtaine d’ouvrages sur la peinture. Les Éditions Odile Jacob ont publié le premier volume de Pour une histoire culturelle de l’art moderne, consacrée à la période qui va de David à Cézanne.

Sujets

Informations

Publié par
Date de parution 01 mai 2000
Nombre de lectures 6
EAN13 9782738137500
Langue Français

Informations légales : prix de location à la page 0,1000€. Cette information est donnée uniquement à titre indicatif conformément à la législation en vigueur.

Extrait

© O DILE J ACOB , MAI  2000 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-3750-0
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo .
Avant-propos

Le tournant du  XX e  siècle

L’art a lieu par hasard – aucun bouge n’en est à l’abri, aucun prince ne peut compter dessus, la plus vaste intelligence ne le peut produire .
Le « Ten O’Clock » de M. Whistler , Stéphane Mallarmé, 1888.

Pour qui le considère sans préjugés à l’aube du XXI e  siècle, l’art moderne, de ses prodromes au temps de Turner ou du Dos de Mayo de Goya jusqu’aux derniers achèvements de Picasso et de Miró, a apporté une ouverture des possibilités de la peinture et de la sculpture qui n’est comparable qu’à celle qui s’est produite entre Giotto et Titien.
J’ai analysé, dans Pour une histoire culturelle de l’art moderne. De David à Cézanne 1 , les problèmatiques de rupture avec l’art antérieur. Elles changent autour de 1900 du fait de la conjonction entre l’arrivée d’une génération qui reçoit de ses devanciers, Cézanne, Degas, Gauguin, Van Gogh, Rodin, que des chemins jamais frayés s’ouvrent à la peinture comme à la sculpture, et le choc culturel dû à l’expansion coloniale qui confirme la révélation de l’exposition de 1889 : les « sauvages » possèdent des arts et de grands arts. Ce choc contribue à la réévaluation des arts négligés, roman, gothique, byzantin, arts populaires, quand la filière de la Renaissance s’exténue en académisme. L’art est à refaire.
Il a fallu deux tiers de siècle pour que l’histoire de l’art commence à prendre la mesure de l’ampleur de cette révision culturelle tant elle heurtait et continue de heurter les idées reçues. Or c’est cette révision qu’on trouve à la base des transgressions à venir. Elle joint Matisse et Derain au Picasso des Demoiselles d’Avignon et aux expressionnistes, ouvre les chantiers interdits par la tradition : la couleur pure, la déformation, l’abstraction, les effets de matière au lieu de la représentation, les assemblages en sculpture. Une triple révolution en est issue, celle des fauves avec Derain et Matisse, celle du cubisme de Braque et Picasso et celle de la première peinture abstraite chez Kandinsky et Mondrian.
Les enrichissements de cette nouvelle vision, la contre-culture qui en naît, donnent sa spécificité à l’art du XX e  siècle, mais annoncent aussi les crises qui l’ont déchiré. Le XX e  siècle a fait face à la prodigieuse accélération des changements dans la civilisation et aux catastrophes culturelles de la modernité qu’ont été les deux guerres mondiales, au prix de ruptures prises pour autant d’agressions contre l’art. Or les collages de Braque et Picasso, Dada et le surréalisme, Pollock et l’École de New York, Dubuffet, Cobra, les nouveaux abstraits en Europe au temps de la prise en compte d’Auschwitz et d’Hiroshima ont, en fait, accru les territoires de l’art de ce qui semblait trop différent, trivial ou accidentel pour y être intégré. En revanche, au cours du dernier tiers du siècle, face aux conquêtes et extensions renouvelées de l’art moderne, se multiplient des ruptures d’un autre ordre, des ruptures de rejet. Leurs poncifs de plus en plus institutionnalisés ont en commun l’autodestruction de l’art.
C’est l’aboutissement et la généralisation de processus où les réussites des innovations de l’art moderne sont devenues tour à tour recettes de nouveaux académismes : cubiste, abstrait, surréaliste, etc. Ce qui vise à renfermer dans des chemins déjà tracés et rassurants l’imprévisible d’une modernité qui met à chaque étape en cause ses propres modèles. La crise et la peur produites par les développements révolutionnaires de l’information et de la communication des années 1960 ont figé ce processus de désintégration de la modernité dans le sacre tardif de Duchamp. Il existe désormais un académisme de transgressions, estampille d’objets et d’intentions de non-art, de non-œuvre, réunis sous le label « art contemporain ». La subversion se déclasse en cuisine de sex-shops.
Nous savons maintenant combien l’évolution du cerveau a privilégié l’information visuelle qui occupe 50 % de notre cortex. Même les plus réfractaires ne peuvent plus voir le monde comme si le cubisme ou les courants abstraits n’avaient pas changé le regard. Aussi la peinture est-elle au cœur du débat. Les théoriciens de l’art contemporain l’attaquent en son principe. Ce n’est pas innocent. Face à la prolifération des flux incontrôlables d’images en déchiquetage accéléré, type jeux vidéo, qui interdisent de les penser, poussent à ne plus penser, la peinture oppose son temps humain, sa puissance d’analyse et de synthèse poétique qu’Homo sapiens a mise en œuvre dès ses premiers pas pour affronter l’inconnu. J’ai essayé de lui rendre son rôle de tête chercheuse.
Les milieux de l’innovation ont été en Europe dispersés par les conflits et les totalitarismes, de sorte qu’en dépit des avancées de l’histoire de l’art moderne aux États-Unis, puis en Europe, il a fallu attendre notre fin de siècle pour que soient restitués la portée du primitivisme, le rôle de Matisse, de Derain, le parcours jusque-là faussé du cubisme de Braque et Picasso, les débats de l’expressionnisme et des abstractions, du cubo-futurisme et de Malevitch, les percées de Miro ou de Giacometti. Il manquait une synthèse. Je l’ai tentée dans une histoire non linéaire soulignant les discontinuités, les bris de clôture.
La quantité des informations croît d’une façon exponentielle, ce qui m’a conduit à laisser de côté nombre d’artistes qui ont produit une œuvre importante, mais sans marquer les courants d’innovations. On prête à Degas d’avoir dit : « C’est drôle, nous passons notre vie à faire un métier que nous ne savons pas. » Ce sont ceux qui ont su qu’ils ne savaient pas que j’ai privilégiés.
Arrêter la synthèse après 1970 tient au fait que la mondialisation contraint à décentrer l’histoire de l’art moderne du couple Europe-États-Unis qui m’a servi de fil directeur. Je ne la crois pas pour autant close. L’intérêt pour les arts premiers, les révisions provoquées par les récentes découvertes sur l’art paléolithique montrent que nous sommes plus que jamais dans le paradigme de l’art moderne, dont rien par ailleurs ne dément jusqu’ici la vitalité.
… 2000.
Jean Claude Groshens et Ted Reff m’ont à nouveau prodigué remarques et suggestions. Je les en remercie bien vivement.
PREMIÈRE PARTIE
L’invasion industrielle du  XX e  siècle et le primitivisme
I
Nouveau défi industriel, contre-culture et primitivisme

L’idée qu’il n’existe pas un modèle universel de la culture, que les différentes cultures ont des évolutions propres, pratiquent des échanges ou leur résistent, émerge dans les années 1880 avec l’envol des sciences humaines et des livres comme L’Origine de la famille, de la propriété privée et de l’État de Friedrich Engels (1884), inspiré par les travaux de l’anthropologue américain Lewis H. Morgan (1818-1881). La multiplication des musées archéologiques comme celui du Trocadéro, l’état d’esprit qui fait montrer à l’Exposition universelle de 1889 autant d’objets d’Océanie et d’Afrique noire, une reconstitution du temple d’Angkor et des sculptures de Borobudur, le confirment.
Dans le même temps, l’expansion de la civilisation industrielle achevait de déclasser la tradition fondée sur l’antique qui la refusait. Cette tradition n’était donc plus un summum valable pour tous les temps et pour tous les pays, mais se révélait historiquement délimitée. Les romantiques avaient déjà mis en cause la supériorité qu’elle revendiquait sur l’art qui la précédait en réhabilitant le gothique. Baudelaire, se demandant pourquoi la sculpture contemporaine était ennnuyeuse, s’étonnait, dans son Salon de 1859 , de

ce singulier art qui s’enfonce dans les ténèbres du temps, et qui, déjà dans les âges primitifs, produisait des œuvres dont s’étonne l’esprit civilisé.
De là, cette découverte, chez Gauguin notamment, qu’on pouvait sortir de la tradition, par le haut, par renouement avec les sources primitives de l’art, plus fondamentales, moins civilisées, mieux capables de transcender la brutalité neuve de l’âge des machines. Ce recours au primitivisme bouleverse l’art qui, en Europe, offre à la fin du XIX e  siècle un formidable bouillonnement comme si d’immenses forces, accumulées en trente années de transformations techniques, économiques, intellectuelles, sociales intenses depuis les derniers grands conflits militaires, convergeaient en une explosion qualitative. Ce bouillonnement atteint les États-Unis et la Russie en décollage industriel.
Il accélère la déréglementation de la sphère culturelle. Lugné-Poe crée à Paris, en 1893, l’Œuvre qui est, plus qu’un théâtre, un lieu de rassemblement des artistes et de discussion, ce que nous appellerions une maison de la culture, que fréquentent les nabis et qui va faire connaître ce qui s’épanouit au nord de l’Europe avec les dramaturges comme le Norvégien Ibsen (1828-1906). Chez lui, la tonalité anarchiste d’exécration de la société bourgeoise, l’exaltation du féminisme dans Maison de poupée s’accompagnent, avec les Revenants , de l’interrogation sur le poids de l’hérédité comme chez Zola, mais étendu aux idées et croyances mortes, à tout le passé qui nous suit. Ces problèmatiques, aiguisées dans l’Europe du Nord protestante, se raccordent à celles

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