73
pages
Français
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2021
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2021
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Publié par
Date de parution
12 mai 2021
Nombre de lectures
9
EAN13
9782738156198
Langue
Français
Publié par
Date de parution
12 mai 2021
Nombre de lectures
9
EAN13
9782738156198
Langue
Français
© O DILE J ACOB , MAI 2021 15, RUE S OUFFLOT , 75005 P ARIS
www.odilejacob.fr
ISBN : 978-2-7381-5619-8
Le code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5 et 3 a, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou réproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Composition numérique réalisée par Facompo
À Leticia. À François, Jacques, Laure et Antoine.
« Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. »
Introduction
En 1800, moins d’un terrien sur dix habite dans une ville. Londres, la cité la plus peuplée du monde après Pékin, compte 850 000 habitants, Paris 550 000, New York moins de 80 000. Aujourd’hui, 55 % des habitants de la planète vivent en ville, soit un peu plus de 4 milliards d’êtres humains. On recense dans le monde une trentaine de villes de plus de 10 millions d’habitants, dont la plupart se trouvent en Asie.
En 2050, probablement plus des deux tiers de l’humanité vivront dans des villes. Près de 6,5 milliards d’enfants, de femmes et d’hommes, 2,5 milliards de plus qu’aujourd’hui, cohabiteront dans de vastes ensembles urbains comptant des dizaines de millions d’habitants. L’essentiel de cette progression se déroulera en Asie et en Afrique subsaharienne.
En un siècle, de 1950 à 2050, la population urbaine de la planète passera ainsi de 750 millions à plus de 6,5 milliards d’individus. Depuis les premières colonies urbaines de Mésopotamie, vers 4000 avant notre ère, le déplacement des populations en direction des villes constitue donc la plus grande migration de toute l’histoire de l’humanité. L’espèce humaine a muté vers l’ Homo urbanus , l’« homme urbain », progressivement arraché de son milieu d’origine, les forêts, les champs et les villages, pour s’enraciner dans un univers de pierre et de béton.
Cette soif inextinguible de la ville est à la fois le fruit de la nécessité et du désir. La ville a toujours été un formidable carrefour d’échanges d’informations, d’interactions entre les êtres humains. C’est dans les villes et leurs universités que l’on a produit des idées, des innovations, des technologies nouvelles. C’est dans leurs rues et leurs faubourgs que sont nées des révolutions qui ont changé l’histoire de civilisations et d’empires. La ville, c’est la lumière, la fête, les rencontres, le travail, le savoir, l’argent, les idées, la création, la culture, la modernité. Selon une étude réalisée par McKinsey en 2018, les 600 plus grandes villes de la planète créent plus de 60 % du PIB mondial et représentent une grande partie du patrimoine, des richesses accumulées. Mais les centaines de millions de citadins qui s’entassent aujourd’hui dans les bidonvilles (ils seront 1 milliard en 2050) font le choix de la ville par nécessité, poussés par la pauvreté et l’isolement. Ils n’aperçoivent que de très loin les éclats de la ville dont ils sont les soutiers fantomatiques.
Cette urbanisation à marche forcée, à la fois subie et choisie, pose toute une série de problèmes. Les premiers sont liés à la capacité des villes à offrir aux habitants les infrastructures et les services qui créent des conditions de vie acceptables et, dans le meilleur des cas, agréables. Les seconds ont trait à ce que l’on nomme aujourd’hui l’« empreinte environnementale » de la ville. Selon les études de l’ONU, les villes consomment 78 % de l’énergie mondiale et produisent 70 % des émissions de gaz à effet de serre. Les troisièmes concernent les conditions mêmes de la vie urbaine, en matière de sécurité, de mixité sociale, de santé publique, de mobilité. Ces problèmes se posent de façon plus ou moins aiguë selon les villes, les régions, les pays, les continents. Les défis auxquels font face, par exemple, Jakarta, Delhi, Paris, New York ou Shanghai sont de nature différente. Dans certains ensembles urbains d’Afrique et d’Asie, les services essentiels, comme l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, la mise à disposition de logements salubres, ne sont pas assurés pour tous les habitants, ce qui reste plus rare dans les villes européennes ou d’Amérique du Nord.
Même chez nous, en Europe, le modèle urbain s’essouffle. La ville devient moins désirable. La crise de la Covid-19 a révélé la fragilité de ce modèle et suscité chez beaucoup d’urbains un désir d’ailleurs, de nature, de campagne, que tous ne concrétiseront pas, mais qui révèle un malaise croissant devant les conditions actuelles de la vie urbaine. Trop de pollution, trop de bruit, des logements précaires, des logements trop chers et/ou trop exigus, des mobilités pénibles, du stress, des tensions sociales…
Ce serait pourtant une erreur de penser que le mouvement d’urbanisation va s’interrompre. Au contraire, la France, comme beaucoup d’autres pays, se dirige vers un modèle d’organisation territoriale fondé sur les métropoles que ceux qui les dirigent et les organisent aspirent à rendre à nouveau « désirables ». De toute part naissent des réflexions sur la « ville durable », la « ville intelligente », la « ville apaisée ». Elles témoignent d’une volonté de réformer le modèle urbain tel que nous le connaissons et qui s’est forgé au cours des décennies précédentes. Ce n’est pas une tâche facile. Car tenter de concevoir la ville de demain, ce n’est pas partir d’une feuille blanche. Les villes existent, elles sont le produit de nombreuses strates de l’histoire, le fruit de plusieurs modèles urbanistiques qui se superposent, s’entremêlent et avec qui il faut bien composer, faute de pouvoir faire table rase du passé.
Repenser la ville, c’est vouloir la mettre en situation de relever les défis climatiques, environnementaux, technologiques, sociétaux qui se posent à elle, de telle sorte que le « désir de ville » renaisse et que la « cité » continue de jouer son rôle de créatrice de valeur économique, sociétale, culturelle, environnementale au service d’une croissance durable et inclusive.
C’est l’objet de ce livre que de proposer cette nouvelle approche de la ville. Il n’est pas écrit par un urbaniste, un architecte, un dirigeant politique, mais par un chef d’entreprise, une entreprise étroitement impliquée dans la fabrique de la ville, par les nouvelles technologies qu’elle y implante, notamment dans le domaine de la construction. C’est aussi le livre d’un voyageur qui, au cours des dernières décennies, a été le témoin du développement d’un grand nombre de villes à travers le monde et qui a tiré de cette observation des enseignements qu’il souhaite aujourd’hui partager, au bénéfice, espère-t-il, de la réflexion globale sur la ville de demain.
Mon propos est de tenter de répondre à trois grandes questions : pourquoi l’humanité a-t-elle choisi, dès l’origine, de « faire ville » et qu’ont produit ces villes dans l’histoire des hommes ? Pourquoi sommes-nous fatigués de ce modèle aujourd’hui ? Que changer pour en faire renaître le désir et transformer la ville en un objet nouveau, amical aux hommes et à l’environnement ? Cette dernière question est cruciale, car elle met en jeu des changements très profonds dans nos façons de vivre, de produire, d’échanger, de faire lien.
Je crois à l’avenir de la ville. En dépit de la crise de la Covid-19, je ne vois guère d’alternatives crédibles, et certainement pas une sorte d’exode rural à rebours. Et, d’ailleurs, s’il se produisait, nous nous retrouverions alors dans la logique absurde énoncée en son temps par Alphonse Allais, qui conseillait de construire les villes à la campagne « car l’air y est plus pur ». En revanche, je suis convaincu que notre modèle urbain doit changer. Cela ne veut surtout pas dire qu’il faut détruire les villes anciennes pour en édifier de nouvelles. Il faut les transformer de l’intérieur, sans renier les traces de l’histoire qu’elles peuvent encore porter. La ville doit répondre à deux objectifs essentiels : réduire son empreinte carbone globale, offrir à ses habitants un confort de vie au sens large. Sur le premier point, cela signifie que la ville doit réduire progressivement sa dépendance à l’automobile et adopter des systèmes de « mobilités propres » ; cela suppose aussi d’entamer un vigoureux effort de rénovation thermique des bâtiments afin de diminuer drastiquement leurs émissions de CO 2 . Et de réintroduire le végétal dans la cité, sous toutes les formes possibles. S’agissant du confort des habitants, il sera grandement amélioré si les deux conditions précédentes sont remplies. Mais il ne faut pas oublier l’une des fonctions essentielles de la ville : un lieu d’échanges, de rencontres, de dialogues. Pour que cette fonction soit préservée et renforcée, c’est l’organisation même de la ville qui doit être repensée afin qu’elle favorise la mixité sociale et l’inclusion. Le chantier est vaste, mais il n’est plus possible d’en retarder la mise en œuvre si nous voulons que nos enfants puissent s’épanouir au sein d’espaces urbains à leur mesure.
CHAPITRE1
Toutes les lumières du monde
Des villes aux rues désertes, vidées de toute présence humaine. Une impression de fin du monde, évoquant les films de science-fiction dans lesquels les êtres humains sont brutalement effacés de la surface de la terre par quelque catastrophe mystérieuse. Avec un mélange de stupéfaction et d’incrédulité, nous avons tous regardé ces images, entre mars et mai 2020, filmées à Paris, Londres, Rome, Barcelone, Munich, Berlin, Jérusalem, New York, Calcutta, La Paz, San Francisco, Wuhan pour ne citer qu’elles. On a beau chercher, on ne trouve pas de précédent à cette situation singulière, sauf peut