La morsure de la passion
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Description

Depuis qu’un combat sans fin les oppose, le sang des sorcières est fatal aux vampires. Pourtant, l’un d’entre eux, Nikolaus Drake, a survécu à ce poison mortel. Devenu invincible, il n’a plus qu’une idée en tête : se venger de Ravin Crosse, la sorcière qui a failli le tuer. Mais il est loin de se douter qu’il va se retrouver lié malgré lui à celle qu’il hait le plus au monde. Car, s’étant introduit chez Ravin, il absorbe par mégarde un philtre d’amour qui ne lui était pas destiné… et tombe en quelques secondes amoureux de celle qu’il s’apprêtait à abattre. Pure sorcellerie, simple hasard, ou manœuvre diabolique, il ne connaît pas la cause de l’étrange état dans lequel il est plongé. Ce qu’il sait en revanche, c’est qu’aimer une sorcière est un crime chez les vampires …

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Publié par
Nombre de lectures 8 771
EAN13 9782280223027
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

MICHELE HAUF La morsure de la passion
MICHELE HAUF
La morsure de la passion
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Deux mois auparavant, une tueuse avait abattu Nikolaus Drake. Cette tueuse, sorcière au regard chargé de mort, était une Vigilante, dont le sang rongeait les chairs de ses ennemis. Touché à mort, Nikolaus s’était effondré, la respiration coupée, puis son cœur avait cessé de battre. Un vampire n’est pas censé survivre au contact mortel du sang de sorcière, mais la chance ce jour-là était du côté de Nikolaus. Tombé sur l’un de ses camarades mourants, rendu fou par la décomposition de son propre corps, il s’était nourri de son ami, avait aspiré son sang avec avidité, avant que la fuite de son âme mortelle ne le rende inutile. Et c’est grâce à ce sang que le cœur de Nikolaus s’était remis à battre. Un véritable miracle auquel, aujourd’hui encore, il avait du mal à croire. Pourtant, quelles que soient les raisons de cette résur-rection, Nikolaus avait survécu. Pendant quelque temps, il avait été contraint de s’isoler pour soigner les blessures dont il gardait encore d’affreuses cicatrices. Puis il était devenu un phénix, c’est-à-dire un vampire qui avait su renaître de ses cendres. L’expérience de sa convalescence avait implanté en Nikolaus une terrible soif de vengeance. Lui, l’ancien chirurgien qui consacrait sa vie aux autres, n’aspirait plus désormais qu’à des châtiments sanglants. Il savait
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qu’il ne trouverait pas la paix tant que la sorcière rôde-rait dans l’ombre, à la recherche d’un nouveau vampire à transformer en cendres. Il ne restait que deux semaines avant le solstice d’été et c’est cette nuit-là que Nikolaus avait choisie pour se présenter de nouveau devant les Kilas, la tribu qu’il dirigeait depuis vingt ans. Mais avant de retrouver les siens, il devait dompter la colère qui bouillait en lui depuis deux mois. Puisqu’il était maintenant immunisé contre le cocktail de mort et que la sorcière ne pouvait plus lui faire de mal, il allait se battre pour ses frères et détruire l’ennemi. C’était la seule chose qui pouvait lui rendre la sérénité dont il avait besoin pour diriger sa tribu. Ce soir, il tuerait la sorcière.
Elle s’appelait Ravin Crosse, roulait sur un chopper noir sur lequel était peint le motvenin, et, comme Nikolaus lui-même, était entièrement vêtue de cuir noir. Petite, mais impressionnante par son allure, elle était équipée d’armes capables d’annihiler un vampire en moins d’une minute et semblait croire que le monde lui appartenait. A la connaissance de Nikolaus, c’était la seule tueuse dans la région des Villes Jumelles. Plus pour longtemps… Nikolaus avait localisé le repaire de la sorcière. Elle vivait en bordure de Minneapolis, à quelques kilomètres à l’ouest de son propre appartement, au sommet d’un hangar récemment reconverti en lofts luxueux. L’endroit était coquet et bien plus abordable que son propre quartier. Il n’accordait pas la moindre valeur à une sorcière, qu’il s’agisse de sa vie ou de son âme perverse. Son seul
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souhait était qu’elles brûlent toutes… Et il allait être er de présenter les cendres de celle-ci à ses hommes. Il observait ses allées et venues à bonne distance depuis dix jours, c’est-à-dire depuis qu’il s’était senti capable de sortir de chez lui. La tueuse allait chasser trois soirs par semaine : le mardi, le jeudi et le samedi. Nikolaus ne l’avait pas encore vue exécuter un de ses semblables. Sa propre tribu comptait onze membres et avait gagné le territoire du centre-ville de Minneapolis en se battant contre deux bandes rivales. Il y avait bien quelques vampires indépendants, qui n’appartenaient à aucune tribu, mais ils étaient discrets et vivaient le plus souvent en banlieue ou dans de petites villes. En réalité, les vampires n’étaient pas très nombreux dans le Minnesota, ce qui, de prime abord, avait surpris Nikolaus qui considérait cet Etat comme un vrai paradis. En effet, l’hiver y durait au moins six mois, l’ensoleillement y était faible et de nombreux sous-sols pouvaient servir de repaires. Et comme les vampires pouvaient réguler la température de leur corps, les plus grands froids les affectaient peu. La tribu des Kilas était petite mais pas stupide. Nikolaus l’avait prudemment tenue éloignée de New York, de Miami ou de La Nouvelle-Orléans, les plus grands berceaux de vampires. Nikolaus était er de diriger la tribu la plus civilisée de tous les Etats-Unis. Alors que d’autres, comme les Navas, les Zmaj ou les Veles, chassaient sauvagement et créaient des descendants sans aucune forme de sélec-tion, les Kilas gardaient leur lignée pure et veillaient à leur tranquillité. Pas de transformations accidentelles, pas de témoins, pas de bavures. C’était devenu la devise personnelle de Nikolaus.
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Bien sûr, il devait tout de même gérer un incident de temps à autre. Après tout, il s’agissait de vampires et la soif de sang était un instinct puissant avec lequel il fallait compter. Pourtant, bien qu’appartenant à ce qu’ils nommaient eux-mêmes « le côté obscur », aucun membre des Kilas ne tuait pour se nourrir. Pendant ces dernières semaines, Nikolaus avait lente-ment guéri de ses blessures. Au début, Gabriel Rossum, son plus proche allié, lui avait apporté des donneurs quotidiennement. Ce régime avait été agrémenté d’une dose hebdomadaire prise sur Gabriel lui-même. Pour l’aider dans sa guérison, le sang de vampire s’était révélé plus efcace que celui des mortels. En trois semaines, la chair avait repoussé sur ses côtes mises à nu, puis la peau avait lentement recouvert ses bras et son torse. Désormais, seuls son bras et tout son côté gauche, du cou à la hanche, étaient encore zébrés du rose de la chair à vif. C’était affreux, mais Nikolaus se souciait peu des apparences. Il lui était déjà arrivé d’exposer à dessein son crâne rasé et couvert de tatouages pour provoquer les curieux qui l’accueillaient avec des grognements menaçants. C’était à l’époque où il croyait sa vie chue. Mais ne l’était-elle pas réellement ? Le Dr Nikolaus Drake n’existait plus. Comment aurait-il pu opérer et garder son calme en voyant couler autant de sang ? En entendant la porte d’entrée se refermer, Nikolaus posa le poids de vingt kilos avec lequel il était en train de s’entraîner et passa dans le salon. A travers l’unique fenêtre qu’il n’avait pas murée, la lumière du soir ltrait, éclairant faiblement un assortiment de grandes plantes vertes.
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Après l’attaque de la sorcière, Gabriel avait annoncé à la tribu que son chef, devenu un phénix, était en vie et qu’il avait besoin de temps pour guérir de ses blessures. Un mois plus tôt, Gabriel avait emménagé avec Nikolaus après avoir laissé son appartement à la petite amie dont il voulait se débarrasser. Ayant horreur des confrontations, il avait trouvé plus simple de partir que de trier leurs affaires en écoutant les jérémiades de la lle et depuis il cherchait un nouveau repaire. Une situation qui conve-nait parfaitement à Nikolaus qui, même s’il n’avait plus besoin de soins permanents, appréciait cette compagnie et n’était pas pressé de voir Gabriel déménager. — C’est pour ce soir ? demanda ce dernier en jetant le journal sur la table basse avant d’aller ouvrir les persiennes. La fenêtre s’éclaircit et offrit une vue du Mississippi au crépuscule et des péniches amarrées devant des bâti-ments industriels sur l’autre berge. — Il est encore tôt pour que tu ailles chasser, insista-t-il. Tu es sûr de ce que tu fais ? — Je n’ai jamais été aussi sûr de quelque chose, grogna Nikolaus en frappant sa paume de son poing. Nikolaus tenait à garder intacte sa colère, ce qui n’était pas difcile. Mais Gabriel, avec ses cheveux blonds et son visage d’ange couvert de taches de rousseur, cherchait toujours à apaiser sa fureur et son exaspération. Toute la patience et la capacité d’empathie que sa profession de médecin lui avait enseignées autrefois avaient disparu en même temps que sa mortalité, la nuit fatale et sanglante de sa transformation. — Ça te permettra de tourner la page, remarqua Gabriel. — Ce sera bon, répondit Nikolaus en se frottant le torse.
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La chair à vif sur son côté gauche attirait l’attention. Elle le désignait comme incomplet et affaibli. Il se rua dans la cuisine et abattit son poing sur le comptoir de marbre gris. Il voulait voir le corps inerte de cette sorcière étendu à ses pieds. C’était le seul baume qui pouvait guérir ses blessures physiques et émotionnelles. Dans le réfrigérateur, il découvrit les bouteilles de vin que Gabriel réservait à son sacrement du soir. Il en déboucha une et la renia. Son bouchon sentait la terre e duxviiisiècle, les framboises et le raisin noir à petits grains mûri par le soleil. — Tu m’as ramené de l’huile de poisson ? — Dans le sac, sur le comptoir. Même si le sang était son principal moyen de régéné-ration, Nikolaus pensait que des remèdes plus naturels ne pouvaient pas lui faire de mal. Qu’auraient pensé ses collègues en le voyant ingurgiter de telles potions ? Nikolaus plia son bras gauche et passa doucement sa main sur sa blessure. — Tu sais, tu aurais une occasion de voler à cette sorcière un peu de sa magie si tu ne la tuais pas trop rapidement…, remarqua Gabriel. Exact. Nikolaus était désormais immunisé contre son sang empoisonné. Ou devait l’être. C’était un risque qu’il était tenté de prendre. Si un vampire parvenait à boire le sang d’une sorcière sans en mourir, il lui volait une partie de ses pouvoirs. Les anciens, ceux qui avaient su asservir les sorcières et consommer leur sang pour accroître leurs pouvoirs, avaient reçu le surnom d’« ensorcelés ». Nikolaus n’avait jamais rencontré d’ensorcelés, même si l’on racontait qu’une demi-douzaine d’entre eux vivaient encore.
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— Tout ce que je pourrai gagner comme magie sera un plus, dit-il en mettant ses lunettes noires. Il était un phénix. Et même s’il savait qu’il était encore convalescent, il s’interrogeait sur les légendes selon les-quelles un phénix était invulnérable. Car il neressentaitpas cette invulnérabilité. — Avant tout, je veux la tuer, ajouta-t-il en se tournant vers Gabriel. — Est-ce que tu te rends compte à quel point il est surprenant d’entendre de tels mots dans ta bouche ? Nikolaus haussa les épaules. — Oui. Il savait bien qu’il avait toujours été contre la morsure mortelle. — C’est nécessaire, Gabriel. Je le fais pour la tribu tout entière. Une sorcière de moins dans ce monde est une nuisance de moins pour la communauté des vampires. Cela dit, j’y vais. — Passe une bonne soirée. Nikolaus quitta l’appartement avec sur les lèvres un sourire cruel. Bonne? Il n’avait pas éprouvé d’émotion plus délicieuse depuis longtemps. Pas depuis l’époque où il était un jeune neurochirurgien qui rêvait de changer le monde et se sentait habité d’une toute-puissance qui aurait fait honte au plus arrogant des hommes. Le monde n’était pas tendre. Le monde… exigeait qu’on se batte pour trouver sa place. Et cette place, Nikolaus avait bien l’intention de la reprendre ce soir-là. En se vengeant. Tout simplement.
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Faire un pacte avec le diable n’est jamais une bonne idée. Elle s’était endettée de trois obligations en échange du talent appréciable de la Vision. Lorsqu’il lui avait fait la proposition, quelques mois plus tôt, Ravin n’avait pas hésité. Elle n’aurait reculé devant rien pour avoir le don de voir ses ennemis ; et de ne plus courir le risque de tuer un mortel par accident. Un « bien sûr » insouciant avait conclu le pacte, et son âme l’avait alors quittée. Elle ne l’avait pas vraiment vendue au diable, plutôt prêtée. Les marques qui striaient sa poitrine indiquaient qu’elle s’était déjà acquittée de la première obligation. Si facilement qu’elle se demandait maintenant pourquoi cette histoire de pacte lui avait fait perdre le sommeil. En fait, il lui avait suf de localiser un avaleur de péchés et de neutraliser ses sorts de protection pour faire un immense plaisir au diable. Et elle n’avait pas jugé bon alors de s’interroger sur la facilité de l’épreuve. Pourtant, elle aurait dû se méer : quand le diable était heureux, il ne fallait pas douter de l’issue de la partie qui venait de se jouer. Quoi qu’il en soit, il ne lui restait plus que deux épreuves à affronter pour rembourser sa dette… et retrouver son âme. Pour le moment, elle s’occupait de la seconde, qui semblait elle aussi étonnamment simple. Penchée au-dessus du plan de travail qui séparait son
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réfrigérateur de son évier en acier d’une propreté irrépro-chable, Ravin xait une ole de verre de dix centilitres. Sa langue dépassait au coin de ses lèvres. Elle avait passé toute la semaine à rassembler les ingrédients de ce philtre d’amour — l’innocence d’un enfant et la septième vie d’un chat ayant été les plus difciles à trouver. Après des mesures précises et des incantations, elle avait fait bouillir le tout, puis l’avait laissé refroidir pendant une heure. A présent, elle versait le contenu de son chaudron dans la ole. Un diffuseur de parfum faisait otter dans la pièce un arôme de poires et d’épices pour neutraliser la puanteur du contenu du chaudron. Elle faisait bien attention à ne pas en perdre une seule goutte. Dans ce cas précis, il fallait soit ingurgiter, soit étaler sur la peau dix centilitres de ce philtre, an que les ingrédients pénètrent dans le système sanguin. La magie rendait l’absorption immédiate. — Un philtre d’amour terriant…, marmonna-t-elle. Après avoir reposé bruyamment son chaudron sur ses plaques de cuisson froides, elle se lança à la recherche du carré de Cellophane qu’elle avait découpé un peu plus tôt. Les longues feuilles des plantes suspendues au plafond lui caressèrent la tête, lui insufant leur énergie vitale. Ravin soupira bruyamment et secoua la tête. — Ce n’est pas ça que je devrais être en train de faire… Pourtant, faire une potion de temps à autre lui permet-tait de ne pas perdre la main, tout en faisant pencher la balance dans le sens qui lui était favorable — du moins l’espérait-elle. Ravin était sorcière depuis plus de deux siècles. Elle avait maîtrisé les magies de la terre et de l’eau, mais l’air était encore un mystère pour elle, et en aucun cas elle ne songeait à manipuler le feu.
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