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pages
Français
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2012
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2012
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Publié par
Date de parution
04 octobre 2012
Nombre de lectures
54
EAN13
9782864249719
Langue
Français
Au début du mois de juin, sous la pression de Trausti Löve, son directeur de rédaction, avide d'informations à sensation, Einar, le correspondant du Journal du Soir à Akureyri, publie un article sur une vieille bâtisse abandonnée dont la rumeur affirme qu'elle est hantée. Une femme qui se présente sous le nom de Victoria et se prétend médium contacte Einar.
Alors que la grande fête du Week-end des Commerçants va commencer, Einar accueille à l'aéroport sa fille et son petit ami. Il remarque sur la piste la présence d'un jet privé qui appartient à une compagnie de cinéma américaine qui prévoit de tourner dans la maison hantée un film intitulé Hot Ice qui traitera de brûlantes passions en terre d'Islande.
Le lendemain de la fête tout le monde a beaucoup bu, plusieurs agressions ont été commises, plusieurs viols aussi. Einar reçoit à nouveau un appel de Victoria qui, d'une voix alcoolisée, lui demande de se rendre au plus vite et avec des policiers dans la vieille maison. Avec le commissaire Olafur Gisli, il découvre le corps d'une jeune fille étranglée serrant dans sa main le message : Attention à toi, mon chou. L'identité de la jeune fille reste plusieurs jours inconnue de la police ; personne n'a signalé sa disparition.
Victoria l'appelle pour lui dire qu'elle entre en cure à Virkid, un centre de désintoxication alcoolique. Le lendemain matin, il apprend que Victoria a été assassinée au centre. Il décide de s'y faire admettre afin d'éclaircir l'affaire. Ancien alcoolique, il sait y faire illusion.
Il parvient à découvrir l'identité des deux victimes, puis à dénouer l'intrigue grâce à l'enthousiasme de sa fille pour le cinéma.
Plus qu'un thriller, Thorarinsson écrit ici un roman sur le passage rapide de l'Islande paysanne à la mondialisation et la destructuration sociale qui l'accompagne avec son cortège de violences et de drogue.
L'auteur prend le temps de nous présenter ses personnages et leurs motivations et de nous embarquer dans le monde qu'il construit avec beaucoup d'ironie et de tendresse avec une bande-son très rock d'où est tiré le titre du livre.
Arni Thorarinsson est né en 1950 à Reykjavik, où il vit actuellement. Après un diplôme de littérature comparée à l'université de Norwich en Angleterre, il travaille pour différents grands journaux islandais. Il participe à des jurys de festivals internationaux de cinéma et a été organisateur du Festival de cinéma de Reykjavik de 1989 à 1991. Ses romans sont traduits en Allemagne et au Danemark.
Il est l'auteur du Temps de la sorcière, Le dresseur d'insectes et Le septième fils, tous publiés aux Editions Métailié.
Publié par
Date de parution
04 octobre 2012
Nombre de lectures
54
EAN13
9782864249719
Langue
Français
Arni THORARINSSON
LE DRESSEUR D'INSECTES
Traduit de l’islandais par Éric Boury
Éditions Métailié 20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris www.editions-metailie.com 2008
Titre original : Dauði trúðsins
© Arni Thorarinsson, 2007
Published by agreement with Forlagið, www.forlagid.is
Traduction française © Éditions Métailié, Paris, 2008
ISBN : 978-2-86424-971-9
Arni Thorarinsson
Le dresseur d’insectes
A u lendemain de la grande fête des commerçants de Akureyri, la grande ville du Nord de l’Islande, on dénombre de nombreuses gueules de bois, quelques dépucelages, plusieurs agressions, plusieurs viols aussi. Mais une femme qui se présente sous le nom de Victoria demande à Einar, le correspondant local du Journal du soir , de se rendre immédiatement, avec la police, dans une “maison hantée” de la vieille ville : ils y découvrent le corps d’une jeune fille étranglée. Personne n’a signalé de disparition.
Peu après, Einar apprend que son informatrice, entrée dans une clinique de désintoxication, a été assassinée. Fort de son expérience d’ancien alcoolique, il se fait interner pour mener son enquête.
Résistant à la pression de son rédacteur en chef avide de sensationnel, il saura découvrir l’identité réelle des deux victimes, engluées dans des relations perverses, et impuissantes devant les puissances de la modernité qui transforment à marche forcée une société dans laquelle la famille a gardé toute son importance.
L’auteur prend le temps de nous présenter ses personnages et leurs ressorts intimes, il nous embarque dans un monde qu’il construit avec beaucoup d’ironie et de tendresse et dont la bande-son très rock and blues , d’où est tiré le titre du livre, donne l’ambiance.
Arni T HORARINSSON est né en 1950 à Reykjavik, où il vit actuellement. Après un diplôme de littérature comparée à l’Université de Norwich en Angleterre, il travaille pour différents grands journaux islandais. Il participe à des jurys de festivals internationaux de cinéma et a été organisateur du Festival de cinéma de Reykjavik de 1989 à 1991. Ses romans sont traduits en Allemagne, et au Danemark.
Ma mère dans l’enclos à brebis . Je vous ai demandé si vous connaissiez ce conte populaire islandais. Je l’ai lu pour la première fois quand je n’étais encore qu’une môme ignorante et innocente. À cette époque, je ne l’ai pas bien compris. Je l’ai souvent relu depuis, au point de m’en souvenir par cœur. Le voici :
Il était une fois une servante. Ayant été engrossée, elle avait donné naissance à un enfant qu’elle avait abandonné dans la nature, pratique commune en Islande à l’époque où l’adultère était un crime passible de sévères punitions, de lourdes amendes voire de la peine de mort. Après l’événement, il advint qu’un jour devait avoir lieu l’une de ces fêtes auxquelles on donnait le nom de vikivaki et qui étaient très répandues dans le pays. Cette servante fut conviée au bal, mais n’étant pas aisée au point de posséder des vêtements à la hauteur des distractions qu’étaient autrefois les vikivakar et n’aimant que le clinquant, elle était furieuse à l’idée de devoir rester chez elle et de se voir privée de la fête. Quelque temps plus tard, alors que les réjouissances battaient leur plein, la servante trayait les brebis dans l’enclos en compagnie d’une autre femme : la première se plaignait auprès de la seconde de n’avoir rien à se mettre sur le dos pour se rendre à la fête. Au moment même où elle prononça le mot, les deux femmes entendirent une voix caverneuse déclamer ces vers de l’autre côté de l’enceinte de l’enclos :
Oh, ma mère dans l’enclos à brebis,
Ne te lamente pas ainsi
Mes guenilles je te prêterai
Pour que tu puisses danser, danser.
Celle des deux femmes qui avait abandonné son enfant reconnut là son rejeton, du reste, elle fut tellement bouleversée en entendant ces vers qu’elle perdit la raison pour le restant de ses jours.
Notez bien qu’il n’est fait nulle part mention de celui qui l’avait sautée ou de celui avec qui elle avait baisé.
Pas un mot à propos du père. Pas un mot quant à sa responsabilité. Peut-être avait-elle été violée. Peut-être que non.
En tout cas, peu de choix s’offraient à elle.
N’est-ce pas, en réalité, simplement des remords de cette femme dont il est question dans ce conte ?
Ce fantôme n’étant que la matérialisation de son sentiment de culpabilité ? Ne s’agissait-il que de revenants qui hantaient son âme ? Ou bien était-ce réellement le fantôme de son enfant ?
Comprenez ça comme vous voudrez.
L’abandon qu’avait commis cette femme, c’était son avortement à elle.
Vous ne croyez pas que vous vous sentiriez hanté, vous aussi, si vous aviez subi un avortement ?
Mais qu’auriez-vous fait s’ils vous étaient montés dessus à trois ? Au moment où elle a ouvert les yeux, ils étaient en train de danser avec elle.
Elle a cru qu’il ne s’agissait que d’une simple danse. Alors elle a refermé les yeux.
Au moment où elle les a rouverts, elle en avait un entre les cuisses, un autre dans l’anus et le troisième dans la bouche.
Et vous, qu’auriez-vous fait ?
1
UNE NUIT AU DÉBUT DE JUIN
Le silence.
On affirme du silence qu’il cache bien des choses. À moins qu’on ne le dise à propos du brouillard ou de l’obscurité ?
Je ne m’en souviens pas.
Ici et maintenant, il fait grand jour 1 .
Quand on s’efforce de se taire, de prêter l’oreille et qu’on n’entend rien, on se met machinalement à penser au silence lui-même.
Le silence est une cachette qui couvre d’un voile le non-dit. Le silence est une discussion, une dispute menée par d’autres moyens, comme disait Che Guevara, si je me souviens bien, rompant ainsi son silence avant de sceller la paix.
À trois heures du matin, en cette nuit de milieu de semaine à Akureyri, règne un silence absolu que rien ne vient troubler.
Pas un klaxon, pas le moindre bruit, pas même un pépiement d’oiseau ne nous parvient de l’extérieur, mais j’entends peu à peu ma respiration mêlée à celle de Joa.
Le silence n’a jamais posé le moindre problème entre elle et moi ; nous ne nous en sommes jamais servi à des fins de dispute. Nous avons toujours pu parler ou bien nous taire ensemble, en fonction des exigences du moment.
À cet instant, le silence est un mur qui nous sépare. Il est brusquement rompu et le mur disparaît.
– C’était quoi, ça ? lançons-nous, d’une seule voix.
Je me lève péniblement, engourdi d’être resté assis trois heures les jambes allongées sur le vieux parquet, pour m’approcher en chaussettes et à pas de loup de la fenêtre qui donne sur la rue Hafnarstraeti. Rien ni personne. Immeubles et maisons semblent dormir d’un sommeil de plomb, il n’y a pas un chat sur les trottoirs, qu’on regarde à droite en direction de l’hôtel ou bien à gauche, aussi loin que portent les yeux, en remontant la rue qui mène jusqu’à l’ancien théâtre. J’essaie de voir s’il y a quelqu’un devant la porte d’entrée juste en contrebas, mais le petit porche couvert de tôle ondulée m’en empêche.
Le ciel laisse présager une journée d’été calme et ensoleillée dans la capitale du Nord.
– Je ne vois personne, je marmonne.
– Les fantômes sont à l’intérieur, Einar, répond Joa assise par terre avec son appareil photo sur les genoux. Enfin, si tant est qu’ils soient quelque part.
– En dehors de toi, je ne vois personne non plus ici. Elle bâille.
– Pour ma part, je me sens comme un fantôme enfermé dans un cercueil et qui a bien envie d’en sortir.
– Mais d’où venait ce bruit, tout à l’heure ?
– Les vieilles maisons en bois sont pleines de bruits bizarres. Nous ne devons pas nous laisser impressionner par de simples craquements.
– On aurait dit que quelqu’un s’impatientait derrière une porte quelque part dans la maison. Et qu’il avait saisi la poignée. Je vais aller voir.
Je m’allume une cigarette avant de me lancer dans la périlleuse expédition qui me mènera du premier étage au rez-de-chaussée.
– Tu vas m’abandonner toute seule ici ? demande Joa, d’un air endormi. À la merci des forces des ténèbres.
Le bois des marches usées craque sous mes pas alors que je descends lentement l’escalier en me tenant à la rampe peinte de laque marron. L’entrée est aussi déserte et vide que le reste de la maison. Je ne vois personne de l’autre côté de la porte vitrée. Je m’approche pour jeter un œil au dehors. Si quelqu’un a effectivement posé sa main sur la poignée, il y a belle lurette qu’il a disparu.
J